[M] [Critique] La Légende du Lac

 
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mallox
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MessagePosté le: Lun Déc 03, 2007 2:34 pm    Sujet du message: [M] [Critique] La Légende du Lac Répondre en citant




La légende du lac - 1972
(Sui woo juen)

Origine : Hong-Kong
Genre: wu xia pian

Réalisé par Chang Cheh & Pao Hsueh-li
Avec David Chiang, Kuan Tai Chen, Chung Wang, Tetsuro Tamba, Feng Ku, Lily Ho, Toshio Kurosawa, Feng Chin, Ti Lung, Miao Ching

Autre titre: Water Margin


Dans la Chine du XIIe siècle, la dynastie des Songs du nord règne sans partage tandis qu’évolue en marge dans le comté sauvage et montagneux de Liang Shan, un groupe de guerriers hors la loi qui n’entendent pas se soumettre au pouvoir despotique et corrompu de l’empereur Hui Zhong et de son administration. Pour garder leur liberté, ils se sont entraînés jusqu’à une profonde maîtrise de leur art belliqueux et restent prêts à tout. Plutôt mourir libre que vivre assujetti.



Inspiré du roman picaresque « Au bord de l’eau » de Shi Nai-An et Luo Guan-Zhong, classique de près de deux mille pages de la littérature chinoise, Chang Cheh n’en adapte ici qu’un court passage. Il réitérera en 1975 avec l’adaptation d’une autre partie de ce roman fleuve, livrant alors ce qui sera considéré comme la suite de cette « Légende du Lac », « All Men are brothers ». Autant dire qu’il s’agit là d’un gros morceau de la culture chinoise auquel s’attaque le réalisateur, livrant sans doute son film le plus ambitieux, une fresque prestigieuse, monumentale, convoquant la majeure partie des stars alors sous contrat avec la Shaw Brothers. On retrouve donc au générique une flopée de noms célèbres vus dans d’autres classiques de l’incontournable firme. En vrac on verra ou apercevra (Certains acteurs ne font qu’une simple apparition) David Chiang (« La rage du tigre »), Lily Ho (« Intimate Confessions of a chinese courtesan »), Yueh Hua (« L’hirondelle d’or »), Paul Chun (« Les 14 Amazones »), Ti Lung (« Frères de sang ») ainsi que des pointures du Chambara ou de l’exploitation japonaise comme Tetsuro Tamba (« Goyokin ») ou Toshio Kurosawa (« Lady Snowblood »)…bref, que du beau monde. On peut également ajouter le nom de John Woo en tant qu’assistant réalisateur, qui du reste, revendiquera toujours ensuite l’influence de son maître Chang Cheh.



Tout est donc réuni pour livrer un film somme, un phare lumineux du film d’aventures, mais plane également le risque d’un naufrage colossal, au regard notamment du nombre de protagonistes mis en scène, de l’ampleur du projet à priori faramineux. Qu’en est-il donc ? Sans hésitation je peux dire qu’il s’agit d’un bien chouette trip auquel nous convie Chang Cheh, un beau film d’aventures trépidant et sans temps mort, dans lequel étrangement et même paradoxalement il se tire avec les honneurs dans sa gestion de la multitude de personnages. En effet, celui-ci use d’un procédé simple qui fonctionne étonnamment bien, faisant apparaître au fur et à mesure de leur irruption à l’écran, le nom du personnage et de l’acteur qui l’incarne, et de fait, aide à la lisibilité de l’ensemble qui il faut tout de même le dire n’est pas très développé. Une fois le premier quart d’heure passé, on peut même dire que l’histoire pourrait presque tenir sur un ticket de métro. Pour compléter le résumé plus haut, les nobles insoumis vont mettront malgré eux en difficulté par leur intrusion chez lui et au sein du royaume de l’empereur tyrannique Zhong, un maître qui sera pour le coup accusé d’héberger, puis d'avoir aidé à fuir, des hors la loi dont les têtes sont mises à prix, et sera alors emprisonné. Les affranchis n’auront alors de cesse, dans leur marginale noblesse, de le libérer, se faisant capturer puis s’évadant et ainsi de suite, dans un jeu de gendarmes et voleurs très classique, ce, jusqu’à un dénouement final entendu et attendu, un combat final homérique mettant en scène tout ce beau monde.

C’est un film à l’affiche impressionnante et prometteuse qui accouche d’une addition inégale. Certes il ne s’agit pas d’un film d’arts-martiaux à proprement parler, et on ne retrouvera pas dans « Water Margin » l’efficacité minérale des combats qu’on pouvait encaisser dans ce que je considère comme l’un des meilleurs films de Chang Cheh, le formidable « Justicier de Shanghaï ». Quand bien même on trouvera un charme brouillon et suranné aux multiples affrontements, on aura à juste titre, droit de les trouver dans un même temps grossiers et assez mal fichus dans l’ensemble. Il n’empêche que de par la présence d’aussi grosses pointures du Wu Xia Pian tels David Chiang, Ti Lung, Chen Kuan Tai, Yueh Hua ou Wong Chung, conjuguée à celle de quatre spécialistes parmi les meilleurs aux chorégraphies, les spectateurs avides de joutes au poings ou à l’arme blanche et venus au spectacle uniquement dans ce but, partiront déçus tant certaines pirouettes paraîtront presque sortir d’une production de troisième zone. Le film étonne même en cela. Est-ce un film décevant pour autant ? Et bien pas vraiment, car il tient à mon avis, à peu près partout ailleurs ses promesses…



D’abord, comme tout film de Chang Cheh des années 70 qui se respecte, « La légende du lac » est un film où la violence graphique est abondamment mise à contribution. On y trouvera une influence flagrante de Sam Peckinpah, dans l’utilisation des ralentis et la présence de moult fulgurances bien saignantes. Giclées de sang, corps transpercés de flèches et de lances, égorgements au sabre, éventrations à la hache, si bien qu’on pourra même parler de gore. Si les temps ici décrits sont barbares, Chang Cheh s’applique à nous le souligner. A ce titre et d’un point de vue strictement visuel le film est remarquable. Pas uniquement dans sa violence graphique, car ailleurs les décors extérieurs ou intérieurs sont somptueux. A ce titre la présentation du personnage de Yen Ching (David Chiang), dit ‘le libertin’, est carrément savoureuse. Entouré d’une cours de femmes à ses pieds, il évolue dans des décors à dominante rose évoquant une vanité pseudo romantique d’un monde fait de fleurettes pour Dom Juan de pacotille. Beaucoup d’humour de la part de Chang Cheh à cet égard. Son personnage séducteur se jettera d’ailleurs ridiculement du balcon, arborant un sourire suffisant pour aller braver un butor sur la place publique, promettant de ramener la prime de la victoire afin que ses femmes s’achètent des fleurs. Difficile de faire plus tête à claque que ce personnage qui s’anoblira pourtant peu à peu dans une tenace et vigoureuse défense de son maître injustement spolié de ses droits.

Si j’évoque David Chiang ici excellent, l’une des forces du film est l’abondance de figures charismatiques. On pourra bien regretter que certains soient sous-employés en ne les apercevant pas plus de deux minutes (Ty Lung n’apparaît par exemple qu’à la toute fin du film), mais la prestation de Tetsuro Tamba pour ne citer que lui, crève l’écran et le film pourrait bien avoir certaines faiblesses, qu’un acteur de cette trempe a non seulement la capacité de porter un film, mais également celle d’en amenuiser les défauts, tant que ce ne sont pas des précipices, ce qui n’est tout de même pas le cas, je vous rassure, dans cette aventure très épique.
Dernière chose, à la fois au crédit et au discrédit du film: sa partition musicale. Tout comme le Chambara, on a souvent rapprochés les films d’arts martiaux du western, et l’on se souvient comment Chang Cheh en utilisait les codes dans sa très estimée et populaire « Rage du Tigre ». Ici, ce qui étonne et désarme quelque peu, c’est qu’elle contraste assez souvent avec les séquences en action, avec même parfois au-delà du western spaghetti des accents Goblinesques, alors qu’ailleurs mes oreilles ont frémies à l’écoute de ce qui ressemblait fort à un stock shot musical de « Pendez-moi haut et court » de Ted Post.
En revanche le leitmotiv qui accompagne les apparitions de David Chiang est ironique à souhait, bien adapté au personnage et au final drôle et jouissif. Bref, tout ça pour dire que la musique, à l’instar de cette « Légende du lac » dans son ensemble, reste inégale mais passionnante, remportant en tout et pour tout la partie.



Note : 7,5/10
Accroche : Belle constellation inégale.

P.S : Le roman "Au bord de l'eau" (Shui-Hu-Zhuan) de Shi Nai-An et Luo Guan-Zhong est disponible en texte intégral en deux tomes dans la Bibliothèque de la Pléïade - NRF et dans la collection de poche Folio Gallimard. Comme dit plus haut, « Water Margin » comme « All Men are brothers » ne couvrent seulement quelques chapitres.
A noter que la télé nippone lui consacra également une série connue en France sous le nom de "La légende des chevaliers aux 108 étoiles", diffusée dans les années 80 le samedi soir sur TF1 en seconde partie de soirée. (ça y est, j’ai réussi à le caser ! )

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flint
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MessagePosté le: Lun Déc 03, 2007 4:03 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Comme tu l'as souligné, le fait de nommer à l'écran chacun des protagonistes dès leur première apparition à l'écran était une excellente trouvaille, en plus de donner un côté "bande dessinée" à cette fresque fort bien réussie dans l'ensemble.
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Kidam
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MessagePosté le: Mar Déc 04, 2007 4:05 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Très bonne critique de Mallox pour un film en effet inégal et pas commode à condenser en quelques lignes vu le grand nombre d'acteurs en jeu. La fin a en effet des allures d'Asterix.
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MessagePosté le: Mar Déc 04, 2007 4:30 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Ca reste du Shaw Brothers de haut niveau malgré les quelques défauts du film - le plus gros étant David Chiang lors de ses peu crédibles prestations au ralenties...
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mallox
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MessagePosté le: Mar Déc 04, 2007 4:57 pm    Sujet du message: Répondre en citant

C'est vrai qu'il térasse de façon quelque peu grotesque des gens qui font le double de lui...
En même temps oui, c'est un fort bon Shaw Brothers. On se y ennuie pas une seconde malgré les défauts, et c'est quand même le principal.
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