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mallox Super héros Toxic


Inscrit le: 10 Sep 2006 Messages: 13982 Localisation: Vendée franco-française
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Posté le: Mar Juin 08, 2010 10:59 am Sujet du message: [M] [Crit] Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon |
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Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon – 1970
(Indagine su un cittadino al di sopra di ogni sospetto)
Origine : Italie
Genre : Thriller / Jeu de massacre politique kafkaïen
Réalisé par Elio Petri
Avec Gian Maria Volontè, Florinda Bolkan, Salvo Randone, Gianni Santuccio, Arturo Dominici, Orazio Orlando, Sergio Tramonti, Massimo Foschi, Aldo Rendine…
Un inspecteur de police, récemment promu à la tête de la section politique de la préfecture de Rome, tue sa maîtresse Augusta. « Comment vas-tu me tuer cette fois-ci ? » lui demande-t-elle au préalable. « En t’égorgeant », lui répond l’inspecteur avant de passer à l’acte. Voici qu’il laisse quelques indices de son propre crime avant de quitter les lieux. En partant, il croise un jeune homme, devant lequel il s’arrête afin de se faire bien voir, et sûr de lui que son statut le rend intouchable. Par une succession de flash-back, nous découvrons la nature de leurs rapports : dans son appartement, Augusta joue avec son amant le rôle de la victime d’un crime sadique, se laissant complaisamment photographier par lui, dans une mise en scène macabre. Tout en se moquant de sa virilité, elle lui avoue qu’elle partage ses faveurs avec un jeune anarchiste du nom d’Antonio Pace. Après avoir laissé, par bravade, les indices compromettants sur le lieu du crime, l’inspecteur y revient avec ses collègues afin d’enquêter. Personne ne le suspecte, et le seul qui ait des doutes garde le silence. Ayant fait part de ses soupçons à un ingénieur, il lui demande d’en avertir la police, mais l’homme se rétracte quand il apprend qu’il s’agit d’un inspecteur. Au cours d’une enquête sur un attentat de l’extrême gauche, l’inspecteur cherche à accuser Pace de son propre crime. Mais celui-ci révèle qu’il a vu son accusateur sortir de l’appartement de la victime…
« Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon » est le premier film italien qui ait osé présenter un haut fonctionnaire de police sous un éclairage à la fois cru et peu reluisant. En 1969, lorsque Petri tourne cette farce pamphlétaire au vitriol, cette démarche constituait un véritable acte de courage, à moins que ce ne soit l’œuvre d’un cinéaste davantage soucieux de se faire le miroir déformant d’une société bancale, selon lui, oubliant par là même les dangers qu’un tel engagement pourrait impliquer, aussi virulent puisse-t-il être. A revoir « Indagine su un cittadino al di sopra di ogni sospetto », on comprend bien pour quelles raisons des amis du cinéaste, eux-mêmes réalisateurs, à l’instar de Dino Risi, Comencini ou Scola, lui aient dit qu’il risquait la prison si le film sortait, ce, lors d’une projection privée. Pour la première fois depuis 1923, on passait outre à un code de censure et à une vigilante surveillance qui avaient toujours refusé ce droit à la critique dont bénéficiaient les réalisateurs et scénaristes américains. Cet accès de libéralisme, de la part d’une administration jusqu’alors si chatouilleuse sur tout ce qui touchait aux institutions, s’explique par le contexte socio-politique de l’Italie du début des années 70. Les derniers vestiges d’autoritarisme ont été en effet balayés par la contestation de 1968 : le cinéma allait donc pouvoir enfin aborder les thèmes les plus brûlants et se lancer dans la bataille politique.
Ici, le message est on ne peut plus clair. Selon Petri, l’Etat se manifeste au travers de la police. A l’égard du citoyen, l’État s’exprime par des lois qui sont normalement appliquées par l’exécutif ; or, l’exécutif est composé par la police et la magistrature. Les institutions qui représentent l’État dans la vie quotidienne sont toujours répressives ; il n’y en a pas une seule qui ne le soit pas, pas une seule qui puisse réellement être appelée démocratique. L’Etat a une telle méfiance à l’égard des citoyens que toutes les institutions tendent au contrôle et à la vigilance. L’architecture de l’État est répressive et isolante : il s’agit de diviser les propriétés, de dresser des murs, de séparer, surveiller, contrôler… Il n’existe pas dans le corps de la société un seul moment qui soit libérateur à l’exception du vote. L’Etat concède au citoyen la possibilité de s’exprimer par le vote, mais nous savons de quelle manière se manipule une élection. Ainsi, il s’agit d’une forme illusoire de libération. La magistrature, les codes sont répressifs. Un code n’est jamais une affirmation, il est toujours une négation, une interdiction : le code ne dit jamais ce que l’on peut faire mais ce que l’on doit faire. L’Etat est réellement le supérieur, le supérieur érigé en pouvoir universel.
Elio Petri et son scénariste Ugo Pirro, issus des rangs du néoréalisme, choisirent pour illustrer ce propos l’ossature du thriller à l’américaine pour mettre à mal les vices de la société italienne. Tout tourne en effet autour d’un crime : celui d’une femme peu avare de ses charmes (superbe Florinda Bolkan) et portée aux pratiques sadomasochistes, qui reçoit ses amants dans un immeuble des beaux quartiers. Le meurtrier est un inspecteur de la section politique d’un poste de police ; violent, paranoïaque, il abuse volontiers de son pouvoir, un peu comme une excroissance de son métier, de sa propre condition. Pour détourner les recherches des enquêteurs, il tente de faire endosser à un étudiant, déjà accusé d’activités terroristes, la responsabilité de son crime. Même si, car il y a un os dans la moulinette, la vanité de son poste le prédispose à se croire protégé, au-dessus de tout soupçon au sein d’une société honorable.
Concis et passionnant, très bien mené, le film suscite la défiance sur les pratiques des organismes chargés de la sécurité, tout en brossant un portrait au vitriol d’un policier. Ce champion de la légalité, tour à tour servile avec ses supérieurs et tyrannique avec les faibles, est l’héritier direct du fascisme. Son caractère et son comportement s’expliquent en effet par toute une tradition culturelle et historique dont l’Italie reste profondément imprégnée.
Empruntant la voie du thriller, pour bifurquer vers le pamphlet aux traits volontairement grotesques, le film de Petri s’élève par sa tension dramatique sans failles, et son parti pris expressionniste à la dimension d’un cauchemar kafkaïen, dans lequel la machine bureaucratique, échappant à tout contrôle, broie tout sur son passage. Plus qu’une simple dénonciation tonitruante et sensationnelle, « Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon » exprime la douloureuse conviction du cinéaste, que le pouvoir affecte aussi bien les démocraties malades que les régimes totalitaires.
Servi par un prodigieux Gian Maria Volontè dans l’un de ses meilleurs rôles, si ce n’est son meilleur, il s’agit d’un très grand film, loin d’être daté, comme il est souvent dit à son propos.
Aussi bien dans sa forme, révélant un cinéaste magistral, totalement maître de son art, que dans son propos on ne peut plus pertinent en plus d’échapper à la simple charge synonyme d’une vaine rébellion, il s’agit d’une véritable méditation sociale couchée sur pellicule.
Soit, on pouvait trouver la forme de « Un coin tranquille à la campagne » encore sous le joug de la nouvelle vague, avec une succession d’ellipses toutefois somptueuses, mais finalement dès « A chacun son dû », l’univers du cinéaste était installé. Un univers que l’on retrouvera à nouveau dans son film suivant : l’assommant « La classe ouvrière va au paradis ». Assommant comme une journée laborieuse d’un ouvrier contraint à répéter les mêmes gestes, à la même cadence, faisant de chaque journée une musique « martelante » semblable à celle de la veille.
Accompagné d’une partition exceptionnelle d’Ennio Morricone qui achève littéralement de le transcender, « Un citoyen au-dessus de tout soupçon » est un film daté, parce que c’est un film comme on n’en fait plus. A comprendre par là que depuis Petri, finalement, on n’ose plus s’attaquer aussi frontalement aux institutions, auquel cas, on se voit directement taxé de manichéisme dans une société qui pourtant n’en est pas exempte. Il n’est pas étonnant que le cinéaste soit, depuis lors, tombé dans les oubliettes, ou presque. Comme s’accordent à dire quelques acteurs ayant travaillé avec l’homme, finalement il est plus facile de faire disparaître quelque chose de dérangeant, ne serait-ce qu’en la tenant sous silence. Restent les films, et au crédit de Petri d’avoir au minimum ouvert quelques portes pour certains cinéastes de son époque ou quelques autres qui suivirent, lesquels, au-delà des réquisitoires anti-mafieux, pouvaient dès lors, avec fougue et passion, dénoncer une société viciée par le haut. De Damiano Damiani, en passant par Dallamano ou Ercoli, finalement, peut-être que leurs films auraient été autres si celui-ci ne fût pas.
« Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon » est un grand film insolent et mordant ! Et un film moderne par bien des aspects, quoiqu’on en dise ! D’ailleurs les américains ont voulu acheter les droits du film pour en faire un remake il y a peu de temps. La paranoïa distillée par les pouvoirs reviendrait-elle en force ? A moins que le peuple ait fini par accepter, ou bien encore qu’il soit blasé… En tout cas, il est toujours aussi jubilatoire d'entendre un Volontè s'écrier devant une assistance de flics : "La répression, c'est la civilisation !"
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Fiche dvd :
Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon - Carlotta Films
DVD 9 – Nouveau Master restauré
Edition collector 2 dvd (limitée à 3000 ex)
Editeur : Carlotta Films
Pays : France
Sortie film : 1970
Sortie dvd : 16 juin 2010
Image : Format 1.85 respecté (16/9 compatible 4/3)
Audio : Mono
Langues : italien, français
Sous-titres : français
Bonus :
Disque 1 :
- Film
- Regards croisés (20')
Paola Pegoraro Petri, épouse d’Elio Petri, et la productrice Marina Cicogna évoquent leurs souvenirs sur le tournage du film au gré de nombreuses anecdotes.
- La stratégie de la tension (25')
Un entretien avec Fabio Ferzetti (critique de cinéma au Messaggero), dirigé par Annarita Zambrano (réalisatrice), sur le contexte politique de l’époque et la manipulation de l’opinion par le Pouvoir, incarné à l’écran par Gian Maria Volontè.
Disque 2 :
- Ennio Morricone, la musique au corps (19')
Dans cet entretien exclusif dirigé par le critique de cinéma Fabio Ferzetti, M° Ennio Morricone évoque son travail sur « Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon », deuxième des sept films d'Elio Petri dont il a composé la musique.
- Elio Petri, notes sur un auteur (2005 – Couleurs et N&B – 84 mn)
un film de Federico Bacci, Nicola Guarneri et Stefano Leone & produit par Paola Petri
Le documentaire phare sur Elio Petri, avec les témoignages exceptionnels de Robert Altman, Ursula Andress, Bernardo Bertolucci, Dante Ferretti, Ennio Morricone, Franco Nero, Vanessa Redgrave...
Inclus :
- Le CD de la bande originale du film composée par Ennio Morricone
Commentaire : Cette édition est une aubaine et un régal, tant au niveau de l'image (somptueusement restaurée) que du son. Surtout qu'on avait le plus souvent l'habitude de le voir passer sur le câble dans une version Pan & Scan un brin délavée.
Le travail fourni par Carlotta Films est ici exceptionnel, autant sur le film lui-même que sur les bonus qui nous sont offerts.
Le premier document, "Regards croisés", propose des interventions intéressantes de la veuve de Petri ainsi que de la productrice, laquelle revient sur ses désaccords avec le metteur en scène ; autant sur ce film-ci que le suivant, où il y aura carrément une scission entre eux jusqu'à ce qu'elle se désengage du projet. Elle affirme cependant que techniquement, c'est sans doute le meilleur metteur en scène avec lequel elle a travaillé. Sur le moment, ils ne se sont pas forcément rendu compte de la bombe qu'ils étaient en train de tourner. Ce n'est qu'ensuite qu'ils ont pris conscience du scandale que celui-ci allait provoquer, tant et si bien qu'Elio Petri s'est sauvé en France, très inquiet quant aux répercussions.
Paola Pegoraro Petri parle quant à elle de l'élaboration du scénario au sein d'une petite villa retranchée. Selon elle, il s'agissait d'une machine assez parfaite, d'un scénario sans failles, prenant le thriller à revers pour suivre des ramifications multiples. Les propos sur Gian Maria Volontè sont un peu plus contrastés ; l'acteur était quelqu'un d'exigeant et de difficile. Certaines scènes ont été improvisées et parfois, sur le tournage, on avait peur de ses réactions (voir la scène du sable dans la bouche par exemple).
L'oscar du meilleur film étranger était tellement inattendu que personne ne s'est déplacé aux Etats-Unis.
Le second, "La stratégie de la tension" est tout aussi intéressant, revenant sur les attentats ayant eu lieu à l'époque, distillant un climat paranoïaque dans le pays. Les anarchistes étaient alors souvent montrés du doigt. 1969, c'est également l'année de grandes grève ouvrières calmées dans la répression ; bref, un contexte on ne peut plus tendu, dont rend compte le film de Petri de manière quasi-prophétique, devançant même les événements. Les officiers de police ayant vu le film à Milan ont de suite demandé aux magistrats d'empêcher le film de continuer de sévir. Certains magistrats de gauche ont refusé. Fabio Ferzetti revient également sur le fait que l'Italie est un pays avant tout très catholique et dans ce cadre, le thème des écoutes téléphoniques, présent dans le film, gênait. Autant l'Etat que le Vatican, deux garants du pouvoir, redoutaient une méfiance croissante du peuple. Il revient aussi sur le fait que certaines scènes ont été tournées à la manière d'un rêve pour atténuer le côté provocant. Finalement, c'est l'extrême gauche qui a le plus mal accueilli le film, se sentant visée. ("Ce sont les mêmes en prison ! Ils sont là depuis à peine deux heures qu'ils sont déjà divisés en quatre groupes !" entend-t-on dans le film. Finalement, Petri était un libertaire de gauche. A noter l'apparition de Petri dans le film, lors de la nomination de Volontè.
Passons au second disque présent dans l'édition collector. Dans "Ennio Morricone, la musique au corps", le compositeur se livre avec générosité, n'hésitant pas à se mettre au piano pour montrer certaines variations sur le même thème ("Le clan des siciliens" par exemple). Petri lui a laissé une liberté totale. Il s'agissait de sa seconde collaboration avec le musicien ; le cinéaste l'avait prévenu qu'il en changeait à chaque film et que ce serait sa première et dernière collaboration ensemble. Finalement, il l'a rappelé ensuite pour chacun de ses films.
Quant au dernier bonus, il s'agit d'un gros morceau. "Elio Petri, notes sur un auteur » est un documentaire passionnant sur le cinéaste, insérant de manière judicieuse certaines interventions des bonus précédents. C’est riche, varié, complet, rempli d'anecdotes, de chutes de tournages, d'interventions diverses et complémentaires, de propos de Petri ; il s’agit de 80 minutes de plongée au cœur du cinéaste ainsi que d'une époque. On y apprend énormément de choses.
Selon Franco Nero, Petri était le plus grand cinéaste "d'avant", car il a livré une douzaine de films totalement différents. Dès son premier, "L'assassin", Petri eut des problèmes avec la censure pour une simple scène, dans laquelle des policiers ne s'essuyaient pas les pieds ; ils outrepassaient, en cela, la légalité. Ce qu'il ressort également, c'est que Petri était un communiste sceptique. Celui-ci a vite pris ses distances avec le parti, contrairement à d'autres artistes de l'époque, plus orthodoxes, qui le suivaient au pied de la lettre (Gian Maria Volontè, qui reprocha d'ailleurs au réalisateur, lors de sa collaboration suivante avec Petri, de ridiculiser le dit parti). Pas de doute, il s'agit d'un libre penseur, issu d'un père ouvrier et d'une mère catholique, c'est également un laïque dont les films, notamment les premiers, oscillent entre réalisme et existentialisme. Ses déboires avec les gros pontes de la production sont également restés célèbres, que ce soit avec Dino De Laurentis ou Carlo Ponti, tant et si bien, qu'après avoir écrit le scénario des "Monstres", il fut débarqué du tournage. Petri a toujours tourné « contre ». Contre un cinéma aristocratique. On apprend également qu'il avait pressenti Jack Nicholson pour "Un coin tranquille…", lequel n'était alors pas libre. Tous s'accordent à penser que le cinéaste gênait, autant les démocrates chrétiens que la gauche elle-même. Après avoir eu la reconnaissance, le cinéaste, au début des années 70, fut alors rejeté autant par la critique que par le peuple. Se sentant alors incompris, il a radicalisé son cinéma et s'est mis, je cite, à "faire des films déplaisants pour une société réclamant du plaisant même dans un film engagé". Le cinéaste ne se retrouvait alors plus dans une société en pleine mutation au niveau du spectacle, et l'on peut même dire qu'il devançait ce que nombreux dénoncent à ce jour. Bref, un excellent document dont je ne vous ferai pas l'offense de vous en dévoiler tout le contenu.
La cerise sur le gâteau, c'est bien entendu l'admirable bande originale signée Morricone. Un bonus de plus qui achève de faire de cette édition un objet sublime, indispensable. Après, bien entendu, cela reste à chacun de voir sa proximité avec le cinéaste, mais c'est en tout cas l'avis de votre chroniqueur ici présent.
Note : 10/10
Existe en édition classique, avec les bonus commentés du premier disque.
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Dernière édition par mallox le Ven Fév 02, 2018 5:22 am; édité 11 fois |
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sigtuna Super héros Toxic


Inscrit le: 08 Jan 2010 Messages: 3818
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Posté le: Mer Juin 09, 2010 7:00 am Sujet du message: |
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Une critique qui fait envie (plus que Florinda Bolkan ) pour un film devenu un grand classique et qui dans mon souvenir doit beaucoup à l'interprétation de GM Volonte. |
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John Pipo 20 % irradié


Inscrit le: 25 Oct 2008 Messages: 245
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Posté le: Mer Juin 09, 2010 10:17 am Sujet du message: |
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Je n'ai jamais revu ce film depuis une diffusion lointaine au cinéma de minuit.
J'en garde un excellent souvenir, tant au niveau de la mise en scène, de la direction d'acteurs que de la montée crescendo dans la paranoïa de Volonte.
Y a une scène géniale à la fin, si je me souviens bien. Il fait d'abord un rêve dans lequel il déclare un truc du genre "Je confesse mon innocence" ( ) à ses collègues et supérieurs hiérarchiques qui ne veulent pas entendre parler de ses preuves contre lui-même histoire de ne pas entacher l'image de la police.
Et puis ensuite, il se réveille, et là, je ne veux pas trop en dire, mais la réalité semble rejoindre le rêve. Y a même une phrase de Kafka assez explicite qui clôt le film. Je me trompe Mallox ? _________________
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mallox Super héros Toxic


Inscrit le: 10 Sep 2006 Messages: 13982 Localisation: Vendée franco-française
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Posté le: Mer Juin 09, 2010 2:38 pm Sujet du message: |
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Non, c'est exactement ça !  _________________
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Camif 99 % irradié


Inscrit le: 16 Mai 2008 Messages: 1560 Localisation: Délocalisation
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Posté le: Mer Juin 09, 2010 5:40 pm Sujet du message: |
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Les bonus ont l'air à la hauteur du film  _________________ "Du 2 au 22 mai, y avait pas loin" Mallox |
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Walter Paisley 99 % irradié


Inscrit le: 27 Nov 2004 Messages: 1332 Localisation: Place du Colonel Fabien
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Posté le: Mer Juin 09, 2010 10:38 pm Sujet du message: Re: [Critique] Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soup |
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mallox a écrit: | Ce qu'il ressort également, c'est Petri était un communiste sceptique. Celui-ci a vitre pris ses distances avec le parti contrairement à d'autres artistes de l'époque, plus orthodoxes qui la suivaient au pied de la lettre (Gian Maria Volonte, qui reprocha d'ailleurs avec sa collaboration suivante avec Petri, de ridiculiser le dit parti). |
Et il a bien eut raison, le Chuncho ! Mais c'est un vaste débat.
eh, camarade, t'as oublié un "que" dans le passage que j'ai cité |
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mallox Super héros Toxic


Inscrit le: 10 Sep 2006 Messages: 13982 Localisation: Vendée franco-française
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Posté le: Jeu Juin 10, 2010 5:54 am Sujet du message: Re: [Critique] Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soup |
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Walter Paisley a écrit: | mallox a écrit: | Ce qu'il ressort également, c'est Petri était un communiste sceptique. Celui-ci a vitre pris ses distances avec le parti contrairement à d'autres artistes de l'époque, plus orthodoxes qui la suivaient au pied de la lettre (Gian Maria Volonte, qui reprocha d'ailleurs avec sa collaboration suivante avec Petri, de ridiculiser le dit parti). |
Et il a bien eut raison, le Chuncho ! Mais c'est un vaste débat.
eh, camarade, t'as oublié un "que" dans le passage que j'ai cité |
Le "que" a été remis. Idem pour le "vite" qui s'était transformé en "vitre" par la magie du clavier.
Sinon, si tu veux parler de la façon dont sont montrés les syndicats dans "La classe ouvrière va au paradis", je trouve que Petri n'épargne personne, y compris son propre camps dont il dissèque les contradictions et il a bien raison. C'est assez désillusionné à ce niveau. Idem pour le fossé entre "l'intellectuel" gauchiste qui pérore dans le vide un idéalisme infantile et vain, et "l'ouvrier" qui a chaque jour les mains dans cambouis. Je trouve que c'est extrêmement bien vu et montré.
Y a d'ailleurs la même liberté de point de vue dans ce film, et je trouve ça parfait. Faut aussi voir que El Chuncho ne jouait dans un film qu'à la seule condition que le parti le lui permette ou que rien dans le scénario ne s'écarte de sa ligne, ce qui à son échelle me paraît légèrement arbitraire donc forcément un peu fascisant dans l'âme. J'ai toujours préféré les libres penseurs aux endoctrinés, les enfants un peu dissipés aux gosses sages, malgré toute l'admiration que je porte à Volonte. _________________

Dernière édition par mallox le Jeu Juin 10, 2010 2:30 pm; édité 2 fois |
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flint Super héros Toxic


Inscrit le: 13 Mar 2007 Messages: 7606 Localisation: cusset-plage
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Posté le: Jeu Juin 10, 2010 6:43 am Sujet du message: |
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Question technique (je suis en pleine phase de correction), je me rends compte que l'orthographe de notre ami Gian Maria diffère d'une source à l'autre.
Alors, doit-on écrire Volonte, Volonté ou Volontè ? |
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flint Super héros Toxic


Inscrit le: 13 Mar 2007 Messages: 7606 Localisation: cusset-plage
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Posté le: Jeu Juin 10, 2010 6:59 am Sujet du message: Re: [Critique] Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soup |
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mallox a écrit: |
Disque 1 :
- La stratégie de la tension (25')
Un entretien avec Fabio Ferzetti (critique de cinéma au Messaggero), dirigé par Annarita Zambrano (réalisatrice), sur le contexte politique de l’époque et la manipulation de l’opinion par le Pouvoir, incarné à l’écran par Gian Maria Volonté.
Disque 2 :
- Ennio Morricone, la musique au corps (19')
Un entretien avec Fabio Ferzetti (critique de cinéma au Messaggero), dirigé par Annarita Zambrano (réalisatrice), sur le contexte politique de l’époque et la manipulation de l’opinion par le Pouvoir, incarné à l’écran par Gian Maria Volonté.
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Il n'y aurait pas comme un "bug", là ? |
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mallox Super héros Toxic


Inscrit le: 10 Sep 2006 Messages: 13982 Localisation: Vendée franco-française
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Posté le: Jeu Juin 10, 2010 7:07 am Sujet du message: |
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Oh que si !
Je pense que j'ai dû reprendre le même passage en éditant pour déplacer certaines captures menu. Surtout que le nom du critique apparaît dans les deux bonus et la longueur du texte n'a pas aidé dans la petite lucarne pour éditer. Enfin bref, merci flintos, c'est réparé.  _________________
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mallox Super héros Toxic


Inscrit le: 10 Sep 2006 Messages: 13982 Localisation: Vendée franco-française
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Posté le: Jeu Juin 10, 2010 8:37 am Sujet du message: |
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flint a écrit: | Question technique (je suis en pleine phase de correction), je me rends compte que l'orthographe de notre ami Gian Maria diffère d'une source à l'autre.
Alors, doit-on écrire Volonte, Volonté ou Volontè ? |
Mes excuses Flintos, je n'avais pas vu ton post !
Ceci dit, je ne t'avancerai pas davantage vu que j'ignorai également que Volonte était écrit de diverses manières selon les sources.
Pour moi, il n'y a jamais eu d'accent et celui-ci ne s'entend que par la prononciation latine du nom. Mais je peux me tromper.
Edit : par contre flint, j'ai vu que tu avais opté pour Volontè. Mais je ne sais pas si tu as vu l'affiche italienne, il est écrit Volonté _________________
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flint Super héros Toxic


Inscrit le: 13 Mar 2007 Messages: 7606 Localisation: cusset-plage
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Posté le: Jeu Juin 10, 2010 8:49 am Sujet du message: |
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mallox a écrit: | flint a écrit: | Question technique (je suis en pleine phase de correction), je me rends compte que l'orthographe de notre ami Gian Maria diffère d'une source à l'autre.
Alors, doit-on écrire Volonte, Volonté ou Volontè ? |
Mes excuses Flintos, je n'avais pas vu ton post !
Ceci dit, je ne t'avancerai pas davantage vu que j'ignorai également que Volonte était écrit de diverses manières selon les sources.
Pour moi, il n'y a jamais eu d'accent et celui-ci ne s'entend que par la prononciation latine du nom. Mais je peux me tromper.
Edit : par contre flint, j'ai vu que tu avais opté pour Volontè. Mais je ne sais pas si tu as vu l'affiche italienne, il est écrit Volonté |
Finalement, j'ai opté pour le "è", c'est ainsi que le nom de l'acteur est orthographié sur son site officiel :
http://www.gianmariavolonte.it/
(correction achevée, prête pour le site ; et encore bravo, très belle chronique, une masse de boulot, un plaisir à relire, et l'envie de revoir le film) |
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Walter Paisley 99 % irradié


Inscrit le: 27 Nov 2004 Messages: 1332 Localisation: Place du Colonel Fabien
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Posté le: Jeu Juin 10, 2010 9:19 am Sujet du message: Re: [Critique] Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soup |
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mallox a écrit: | Sinon, si tu veux parler de la façon dont sont montrés les syndicats dans "La classe ouvrière va au paradis", je trouve que Petri n'épargne personne, y compris son propre camps dont il dissèque les contradictions et il a bien raison. C'est assez désillusionné à ce niveau. Idem pour le fossé entre "l'intellectuel" gauchiste qui pérore dans le vide un idéalisme infantile et vain, et "l'ouvrier" qui a chaque jour les mains dans cambouis. Je trouve que c'est extrêmement bien vu et montré.
Y a d'ailleurs la même liberté de point de vue dans ce film, et je trouve ça parfait. Faut aussi voir que El Chuncho ne jouait dans un film qu'à la seule condition que le parti le lui permette ou que rien dans le scénario ne s'écarte de sa ligne, ce qui à son échelle me paraît légèrement arbitraire donc forcément un peu fascisant dans l'âme. J'ai toujours préféré les libres penseurs aux endoctrinés, les enfants un peu dissipés aux gosses sages, malgré toute l'admiration que je porte pour Volonte. |
Mais rompre avec le Parti, c'est déjà être récupéré par le capitalisme. Pour lui, c'est tout bénéf de voir un artiste connu rompre avec le Parti : ça fait de la contre-propagande, ça permet de propager la "désillusion", et surtout ça créé un allié de poids qui servira éventuellement sciemment ou non d'argument contre le Parti en montrant que mêmes des cocos n'aiment plus le Parti (c'est pour ça que des gars comme Trotsky et ses héritiers ont meilleure presse : ils sont respectables car contre le Parti, d'ailleurs on finit par ne plus savoir qui est leur ennemi principal...). Le Parti qui reste l'organisation de la classe ouvrière, et qu'un Petri isolé ne sert pas à grand chose pour la classe ouvrière, voire est devenu contre-productif pour les raisons évoquées plus haut. Se poser en libre penseur, jouer la division, je ne trouve pas que ce soit à son honneur. C'est une position rebelle à l'intérieur du Parti, mais c'est au contraire très conformiste dans la société entière. Il ne faut pas oublier que le PCI restait l'ennemi principal de la bourgeoisie (d'ailleurs des archives anglaises récemment déclassifiées ont établit qu'en 1976 l'OTAN avait prévu d'intervenir militairement en Italie si les communistes remportaient les élections). Donc oui, la "libre-pensence" de Petri est pour moi bien moins courageuse que la fidélité au Parti de Volontè, du moins si on veut que leur cinéma soit politiquement utile.
Et quand tu parles de l'endoctrinement de Chuncho, je ne pense pas que ça en soit : c'est la discipline de Parti, liberté totale dans le Parti, unité totale à l'extérieure, et ce pour éviter les divisions et imposer une ligne politique claire. En France, celui qui à officiellement mis fin à ce système, c'est Robert Hue... On voit ce que ça a donné. La libre pensence, c'est de l'individualisme, c'est chacun qui affirme son propre point de vue dans son coin, avec éventuellement quelques adeptes, et ça ne sert pas à grand chose à part gêner la construction d'un parti capable de redevenir de masse (ça me rappelle un slogan stalinien : "deux trotskystes c'est un parti, trois trotskystes c'est la scission").
Après, faudrait voir quels sont les reproches exacts faits par Petri au PCI. Et c'est vrai qu'il y a de quoi faire (Berlinguer en Italie et Marchais en France ont fait de sacrées conneries). Mais claquer la porte pour se poser en libre penseur, c'est contre-productif. Mieux vaudrait des critiques constructives à l'intérieur même du Parti, et essayer de changer son orientation pendant qu'il en est encore temps (c'était le cas à l'époque, maintenant non... le PCI n'existe plus).
D'ailleurs c'est pour ça que je te soutiens encore, toi le petriste, malgré les attaques incessantes que tu encourages contre la Tortilla volontèiste.  |
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mallox Super héros Toxic


Inscrit le: 10 Sep 2006 Messages: 13982 Localisation: Vendée franco-française
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Posté le: Jeu Juin 10, 2010 9:51 am Sujet du message: Re: [Critique] Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soup |
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Walter Paisley a écrit: | Mais rompre avec le Parti, c'est déjà être récupéré par le capitalisme. |
Il ne s'agit pas de "rompre" avec le parti. D'ailleurs Petri en faisait toujours parti, sauf qu'il n'était plus activiste, même s'il venait toujours discuter aux réunions. C'était prendre certaines distances avec lui. C'est d'abord penser, ensuite éventuellement adhérer. Petri était tout simplement un non orthodoxe. Un peu comme à l'église il y a ceux qui remettent en cause leur foi et certains agissements sanglants faits en son nom, et d'autres, quoiqu'il se passe, défendent ces actions au nom d'une religion.
Défendre un bureau politique moscovite prêt à envahir la Hongrie pour installer de force un communiste au pouvoir, c'était aux yeux de Petri condamnable, propre au méthodes fascistes ou même impérialistes américaines ( ) . Qu'il ait été critiqué parce qu'il n'était pas d'accord avec ça est une erreur du parti communiste italien non celle de Petri. De fait, ce n'est pas Petri qui donne du grain à moudre au capitalisme alors, mais ce même PC dans sa mauvaise foi et son aveuglement.
Walter Paisley a écrit: | Se poser en libre penseur, jouer la division, je ne trouve pas que ce soit à son honneur. |
Toujours pareil. Je vois une passerelle qui me semble un peu grossière entre être libre penseur (garder sa liberté de pensée donc) et jouer la division. Une liberté de pensée devrait logiquement enrichir les idées et idéologies de tout parti. Lorsque ce dernier invoque l'unité à hue (pas Robert !) et à dia, c'est selon moi l'appauvrissement de la pensée et donc de la construction de tout projet politique. C'est réfuter l'évidence pour se réfugier derrière une doctrine figée dans une société en perpétuelle mutation. Et comme toute doctrine, ses interprétations sont multiples, à l'instar des livres religieux. Donc chaque pensée sensiblement divergente de Petri envers le parti communiste de l'époque aurait pu être une pierre à l'édifice de ce même parti si celui-ci ne s'était pas bêtement aveuglé.
Walter Pailey a écrit: | le PCI restait l'ennemi principal de la bourgeoisie (d'ailleurs des archives anglaises récemment déclassifiées ont établit qu'en 1976 l'OTAN avait prévu d'intervenir militairement en Italie si les communistes remportaient les élections). Donc oui, la "libre-pensence" de Petri est pour moi bien moins courageuse que la fidélité au Parti de Volontè, du moins si on veut que leur cinéma soit politiquement utile. |
Sauf que Petri n'a pas attendu 76 pour affirmer ses propres opinions. Dès 56, il a renvoyé chacun à ses responsabilités, ce qui constituait un véritable acte de courage.
Ensuite, il y a eu le printemps de Prague peu avant le tournage du film, et Petri n'était pas d'accord avec l'envoi de tanks russes pour soi-disant imposer une "normalisation". Cette action étant alors défendue par le PCI. Petri a marqué son désaccord, préférant rester dans le juste plutôt que dans l'aveuglement cautionnant toute action soviétique même crasse.
Non seulement il avait la droite, les conservateurs et les démocrates chrétiens déjà au cul, mais en plus il prenait le risque de se mettre la gauche contre-lui. Ce risque de s'isoler envers et contre tous me paraît être le vrai courage.
Se tapir derrière une idéologie de groupe m'apparaît beaucoup plus sécurisant. Surtout qu'à l'époque, toute l'intelligentsia italienne se revendiquait communiste. _________________

Dernière édition par mallox le Ven Juin 11, 2010 5:53 am; édité 1 fois |
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Walter Paisley 99 % irradié


Inscrit le: 27 Nov 2004 Messages: 1332 Localisation: Place du Colonel Fabien
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Posté le: Jeu Juin 10, 2010 11:24 am Sujet du message: Re: [Critique] Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soup |
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mallox a écrit: | Walter Paisley a écrit: | Mais rompre avec le Parti, c'est déjà être récupéré par le capitalisme. |
Il ne s'agit pas de "rompre" avec le parti. D'ailleurs Petri en faisait toujours parti, sauf qu'il n'était plus activiste, même s'il venait toujours discuter aux réunions. C'était prendre certaines distances avec lui. C'est d'abord penser, ensuite éventuellement adhérer. Petri était tout simplement un non orthodoxe. Un peu comme à l'église il y a ceux qui remettent en cause leur foi et certains agissements sanglants faits en son nom, et d'autres, quoiqu'il se passe, défendent ces actions au nom d'une religion.
Défendre un bureau politique moscovite prêt à envahir la Hongrie pour installer de force un communiste au pouvoir, c'était aux yeux de Petri condamnable, propre au méthodes fascistes ou même impérialistes américaines ( ) . Qu'il ait été critiqué parce qu'il n'était pas d'accord avec ça est une erreur du parti communiste italien non celle de Petri. De fait, ce n'est pas Petri qui donne du grain à moudre au capitalisme alors, mais ce même PC dans sa mauvaise foi et son aveuglement. |
Sauf que derrière les remous hongrois, il y avait aussi des fascistes et des impérialistes, comme à Berlin en 1953, et comme dans tous les mouvements de résistance anti-cocos (Solidarnosc, tiens, pour faire plaisir à Sigtuna, l'agent de psycho-livres et donc du gregorisme dissimulé). Et pas que des mouvements, d'ailleurs : les leaders cocos anti-soviétiques ont toujours été soutenus par l'occident, que ça soit Tito, Ceaucescu (qui a eu recours au FMI !), Pol Pot (les khmers rouges ont été financés par l'occident après avoir été viré du pouvoir par les vietnamiens pro-soviétiques) et même Mao sur la fin. Il n'y a pas de troisième voie : si la Hongrie s'était engagé dans la voie anti-soviétique, elle serait revenue au capitalisme le plus crasse, quelles qu'aient été les exigences populaires. Il n'y à qu'à voir l'exemple de la chute du mur : le peuple est-allemand ne manifestait pas pour intégrer le système capitaliste. Ce n'a pas été une réunification mais une annexion.
Il n'y à guère d'illusions à se faire sur ce que serait devenus la Hongrie si l'insurrection avait réussie, et Petri a fait preuve de naïveté là-dessus. Après, si il considérait que les hongrois avaient plus à gagner à intégrer le bloc de l'ouest, ok, mais pour un communiste, pour justifier ça, bon courage.
Mallox a écrit: | Walter Paisley a écrit: | Se poser en libre penseur, jouer la division, je ne trouve pas que ce soit à son honneur. |
Toujours pareil. Je vois une passerelle qui me semble un peu grossière entre être libre penseur (garder sa liberté de pensée donc) et jouer la division. Une liberté de pensée devrait logiquement enrichir les idées et idéologies de tout parti. Lorsque ce dernier invoque l'unité à hue (pas Robert !) et à dia, c'est selon moi l'appauvrissement de la pensée et donc de la construction de tout projet politique. C'est réfuter l'évidence pour se réfugier derrière une doctrine figée dans une société en perpétuelle mutation. Et comme toute doctrine, ses interprétations sont multiples, à l'instar des livres religieux. Donc chaque pensée sensiblement divergente de Petri envers le parti communiste de l'époque aurait pu être une pierre à l'édifice de ce même parti si celui-ci ne s'était pas bêtement aveuglé. |
Petri avait le droit de débattre de sa ligne à l'intérieur du Parti, où les orientations sont votées. Et lorsqu'elles sont votées, la stratégie est de s'y tenir, y compris pour ceux dont les propositions ne sont pas passées. C'est le centralisme démocratique (qui n'est pas un concept inventé par Staline mais par Lénine), et Petri savait que ça marchait ainsi depuis la fondation du PCI.
Par ailleurs il n'y a certainement pas eu de doctrine figée : c'est les gauchistes qui sont comme ça, et c'est anti-marxiste. La base du marxisme c'est de savoir s'adapter aux mouvements sociaux pour mieux représenter les intérêts de la classe ouvrière à un moment donné. Les PC de France et d'Italie ont toujours évolué, parfois même du jour au lendemain (dans les années 30, entre la tactique du classe contre classe et celle du front populaire anti-fasciste), et à partir des années 50 et 60 ils ont évolué dans un mauvais sens qui a culminé avec cette absurdité d'"eurocommunisme" inventé par les italiens de Berlinguer, et qui a lancé Marchais dans le programme commun qui n'a en fait servi qu'à affaiblir les coco au profit des socialistes. C'est pour ça que dans le fond, ce que je reproche à Petri ici c'est essentiellement sur des questions stratégiques, et pas vraiment sur le fond (j'aime beaucoup La Classe ouvrière va au paradis). Je ne connais pas ses propositions politiques concrètes, mais ce que tu me dis sur ses prises de position au sujet de Budapest ne me rassure guère... Ca se trouve, c'était un Bébért Hue avant la lettre.
Citation: | Walter Pailey a écrit: | le PCI restait l'ennemi principal de la bourgeoisie (d'ailleurs des archives anglaises récemment déclassifiées ont établit qu'en 1976 l'OTAN avait prévu d'intervenir militairement en Italie si les communistes remportaient les élections). Donc oui, la "libre-pensence" de Petri est pour moi bien moins courageuse que la fidélité au Parti de Volontè, du moins si on veut que leur cinéma soit politiquement utile. |
Sauf que Petri n'a pas attendu 76 pour affirmer ses propres opinions. Dès 56, il a renvoyé chacun à ses responsabilités, ce qui constituait un véritable acte de courage.
Ensuite, il y a eu le printemps de Prague peu avant le tournage du film, et Petri n'était pas d'accord avec l'envoi de tanks russes pour soi-disant imposer une "normalisation". Cette action étant alors défendue par le PCI. Petri a marqué son désaccord, préférant rester dans le juste plutôt que dans l'aveuglement cautionnant toute action soviétique même crasse.
Non seulement il avait la droite, les conservateurs et les démocrates chrétiens déjà au cul, mais en plus il prenait le risque de se mettre la gauche contre-lui. Ce risque de s'isoler envers et contre tous me paraît être le vrai courage.
Se tapir derrière une idéologie de groupe m'apparaît beaucoup plus sécurisant. Surtout qu'à l'époque, toute l'intelligentsia italienne se revendiquait communiste. | [/quote]
Je ne nie pas son courage, mais le courage, l'héroïsme, toutes ces choses là sont très piègeuses. Jouer les cavaliers solitaires, ça sonne très bien, mais ça reste du domaine de l'idée, ce n'est absolument pas matérialiste. Le PCI agissait dans le concret, et c'est ce qui le rendait bien plus efficace qu'un coco renégat qui raisonne dans son coin en disant "faire des films déplaisants pour une société réclamant du plaisant même dans un film engagé".
Donc pour moi, oui, j'admire plus l'abnégation d'un Volontè qui en restant fidèle au Parti reste plus proche de la classe ouvrière, qui se trouve également dans ce Parti.
C'est tout le problème des libertaires : j'ai l'impression qu'ils préfèrent les postures à l'efficacité. Tiens, Petri me fait un peu penser aux étudiants gauchistes à la sortie de l'usine dans La Classe ouvrière va au paradis. |
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