flint Super héros Toxic


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Posté le: Ven Nov 04, 2011 12:49 pm Sujet du message: [M] [Critique] L'éperon brûlant |
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L’éperon brûlant
Titre original : Hot Spur
Genre : Western, Drame, Erotique
Année : 1968
Pays d’origine : Etats-Unis
Réalisateur : Lee Frost
Casting : James Arena, Virginia Gordon, Joseph Mascolo, Wes Bishop, Tom McFadden, John Alderman, Robyn Hilton…
Aka : Fiery Spur/Les éperons du désir/The Naked Spur

Deux cow-boys débarquent dans une modeste taverne tenue par des Mexicains. Après avoir molesté l’un des employés, Carlo, ils s’en prennent ensuite à la serveuse qui se livrait à une danse, à leur demande. Ils ne sont pas loin de la violer lorsque Carlo intervient. Mais le jeune Mexicain ne fait pas le poids. Il faut l’arrivée de Jason O’Hare, patron du ranch voisin, pour calmer les choses. Carlo reconnaît alors l’un des responsables d’un drame survenu une dizaine d’années auparavant.
Alors qu’il avait onze ans, Carlo assista impuissant au viol de sa sœur par quatre hommes blancs. La victime, alors âgée de dix-sept ans, se suicida le soir même. Ivre de vengeance, le frère devra attendre de passer à l’âge adulte avant d’être en mesure d’appliquer sa propre justice. Aujourd’hui, il ne lui reste plus qu’un homme à retrouver, le leader, qui portait une bague dont le motif est resté à jamais gravé dans sa mémoire. Cette bague, Jason O’Hare la porte au doigt.
Le lendemain, Carlo parvient à se faire engager dans le ranch en tant que garçon d’écurie. Il fait la connaissance de Susan, la femme de O’Hare, une ancienne prostituée particulièrement méprisante envers les Mexicains. Le jeune homme échafaude un plan consistant à kidnapper Susan, afin d’attirer Jason et sa bande dans un piège…

Il est indéniable que Lee Frost, auteur de ce « sex western », tient une place prépondérante dans le cinéma d’exploitation. D’ailleurs, il annonçait la couleur dès son premier film, « House on Bare Mountain » (aka « Le vampire érotique ») en 1962, dans lequel jouait un certain Bob Cresse qui sera par la suite l’un des fidèles complices du réalisateur. Cresse, co-scénariste avec Frost de « L’éperon brûlant », officiera aussi bien, durant toute sa carrière, en tant que scénariste, acteur et producteur.
Né David Kayne, Lee Frost met en scène durant la décennie des sixties des œuvrettes oscillant entre le nudie et le documentaire tendance mondo, et la plupart de ces films alimenteront l’épais catalogue de l’éditeur Something Weird Video. En 1968, Lee Frost tourne donc « L’éperon brûlant », qui propulse le spectateur dans l’univers d’un western atypique, celui où les femmes se déshabillent avec la plus grande facilité. Quelques années plus tôt, des films comme « La revanche des vierges » (« Revenge of the Virgins », de Bethel Buckalew – 1959) et bien sûr « Wild Gals of the Naked West », de Russ Meyer (1962), anticipaient quelque peu le futur courant du western érotique, un concept typiquement américain puisque ce sous-genre sera essentiellement exploité chez nos voisins d’outre Atlantique. Ainsi verra-t-on, dans la foulée de « L’éperon brûlant », « Brand of Shame » (alias « Nude Django », de Byron Mabe -1968), puis « Le totem du sexe » (« The Ramrodder », de Van Guylder – 1969). Jusque là cantonnés dans l’érotisme soft, nos valeureux cow-boys auront l’occasion de tirer plus de six coups durant les seventies, avec l’avènement du porno. Parmi les titres les plus connus, citons « A Dirty Western », de Joseph F. Robertson (1975), et « Sweet Savage » d’Ann Perry (1979), dans lequel figurait Aldo Ray !
L’exception confirmant la règle, en France aussi le western coquin verra le jour, avec le doublé « Règlements de comptes à OQ Corral »/ « L’arrière train sifflera trois fois » de l’inénarrable Jean-Marie Pallardy, en 1974.

Pour en revenir à « Hot Spur », on a le sentiment que Lee Frost a quelque peu puisé dans le style de Russ Meyer, que ce soit au niveau de certains cadrages travaillés ou de l’importance accordée aux gros plans sur les visages des protagonistes (ceci pour l’aspect technique), mais également pour la dénonciation sous-jacente d’une certaine frange de l’Amérique (celle des ploucs, des racistes et machos de tous bords, correspondant parfois au stéréotype du redneck ignare et alcoolique). Un dernier point de comparaison concerne le casting féminin, riche en poitrines opulentes. On notera particulièrement l’apparition de Robyn Hilton (« Le shérif est en prison », « Doc Savage arrive »), qui ne fut pas surnommée sans raison « Busty Lusty ».
Ceci étant, Lee Frost possède un style propre à lui, ce qui ne l’empêchera pas de surprendre son public (agréablement) tout au long de la décennie suivante grâce à des œuvres aussi barrées que différentes, telles « Excitation » (« Zero in and Scream », 1971), « La chose à deux têtes » (1972), « Cette femme est un flic » (1974) ou encore « The Black Gestapo » (1975). Qu’il s’agisse de tourner un thriller glauque, un film fantastique saugrenu, un polar virevoltant ou un blaxploitation, Lee Frost répond présent, de façon satisfaisante, et même ses incursions dans le X s’avèreront originales (« A Climax of Blue Power »).

Comparé à certains des films précités, « Hot Spur » reste objectivement un ton en dessous. Bien que louable, cette histoire de vengeance, de rape and revenge par procuration, a du mal à tenir la distance sur près de quatre vingt dix minutes. On a d’un côté un jeune héros mexicain (Joseph Mascolo, « Les nouveaux exploits de Shaft ») pas très à l’aise et au jeu un peu figé ; et de l’autre des bad guys stéréotypés parmi lesquels John Alderman est le seul à surnager et à sortir du lot. Alderman est également une figure mythique de la sexploitation, on le verra notamment dans quelques productions de David F. Friedman, puis dans les meilleurs pornos de Gary Graver (Alderman lui-même ne tournera pas de scènes hard dans les films en question). Enfin, entre le gentil et les méchants, le spectateur avide de chair fraîche aura bien l’occasion de voir quelques filles peu farouches, dévoilant tantôt une belle poitrine ou des fesses charnues, plus rarement leur toison pubienne (on est en 1968, cela dit). Mais à vrai dire, « L’éperon brûlant » demeure assez tiède au niveau de l’érotisme. Même la scène d’orgie dans le ranch reste mal fichue, avec ces cow-boys assez gauches dans l’art du tripotage de donzelle. Et puis bon, tous ces mecs qui baisent en gardant leur pantalon, leur chemise et leurs bottes ne participent pas vraiment à l’émoi des sens. Le réalisateur se montre plus inspiré (et les acteurs aussi) au niveau de l’action et du sadisme des situations.
Avec le recul, « L’éperon brûlant » apparaît presque comme un brouillon de « Cache ta femme, prends ton fusil, voici les scavengers », que réalisera Lee Frost l’année suivante. Un western pas vraiment érotique, mais bien violent, en tout cas plus abouti.
Fiche dvd –
L’éperon brûlant – Bach Films
Collection Sexploitation
Région : Zone 2 PAL
Editeur : Bach Films
Pays : France
Sortie film : 27 mai 1970 (France)
Sortie dvd : 17 août 2011
Durée : 83 mn
Image : 1.33 – 4/3
Audio : Mono
Langue : français
Sous-titres : non
Bonus :
- « Les chevauchées amoureuses de Zorro » dans la collection Sexploitation, présenté par Francis Mischkind (2min.16)
- Présentation de « L’éperon brûlant » par Francis Mischkind (2min.50)

Commentaire : Une galette de Lee Frost dans nos contrées constitue un petit événement, dans la mesure où ce réalisateur, pourtant prolifique, est particulièrement boudé en France. Pour preuve, le seul film disponible en dvd jusque là en France était son dernier long métrage, le médiocre « Private Obsession » tout juste digne de figurer dans le club très select des « Hollywood Nights ». Du temps de la VHS, la donne était différente, et plusieurs œuvres de Frost étaient proposées sur ce support. « L’éperon brûlant » était sorti chez Iris Télévision, puis Platinium Vidéo. Au cinéma, il fut distribué en 1970, dans une version annoncée de 87 minutes (qui correspondrait aux 91 minutes de la version originale en NTSC). Le dvd de Bach films dure 83 minutes, mais n’ayant pas en ma possession l’unique dvd paru il y a un bon moment chez Something Weird Video (très médiocre, à en juger les extraits visibles sur le net), il m’est impossible d’établir une comparaison. Néanmoins, la version de Bach Films, agréablement lumineuse et dans l’ensemble correcte, malgré la présence de poussières et de brûlures par moments, ne semble pas avoir été coupée, à première vue.
Le film est donc proposé dans sa version française, comme les quatre autres titres sortis chez l’éditeur en même temps (à savoir les trois Christina Lindberg et « Les chevauchées amoureuses de Zorro »). Et on constate encore la même erreur au dos de la jaquette, qui mentionne une version originale sous-titrée en français. De plus, « L’éperon brûlant » est sorti en 1976 selon cette même jaquette, alors qu’il fut tourné en 1968 (pour une sortie française en 1970).
Histoire de ne pas être désagréable, j’éviterai de parler des bonus (minimalistes) accompagnant le film. Signalons juste que Francis Mischkind, toujours en forme olympique, rebaptise Lee Frost en l’appelant Richard Lee Frost (en réalité, l’un des pseudos du cinéaste était Robert L. Frost).
Toutefois, le plus important est le film lui-même ; aussi saluons l’initiative de l’éditeur de sortir l’une des œuvres de Lee Frost de l’anonymat, même si ce n’est pas la meilleure.
Note : 6/10







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