Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant |
Auteur |
Message |
Pierre 10% irradié


Inscrit le: 20 Jan 2012 Messages: 85 Localisation: France
|
Posté le: Jeu Mar 12, 2015 7:55 pm Sujet du message: [M] [Critique] Quando l'amore è sensualità |
|
|
Il y des critiques que j'aimerais faire, mais me comparant à vous autres érudits, je suis complexé par mon manque de référence pour me lancer. Là, je crois, vue l'obscurité de la chose, que je ne risque pas grand chose !
Titre original : Quando l'amore è sensualità
Genre : Drame psycho-érotique
Année : 1973
Pays d'origine : Italie
Réalisateur : Vittorio de Sisti
Casting : Agostina Belli, Gianna Macchia, Françoise Prévost, Ewa Aulin, Femi Benussi ...
Durée: 89 minutes
L’histoire est simple. Erminia jeune et jolie héritière d’un domaine aristocratique ruiné d’Italie du nord (Agostina Belli), épouse Antonio un jeune, beau et riche boucher en gros aux manières un peu rudes (Gianni Macchia). Un mariage de raison, ourdi par la mère d’Erminia, une veuve aux mœurs rigides et sexuellement frustrée (Françoise Prévost). Pendant la nuit de noces, Erminia se refuse. Face à la résistance obstinée de son épouse, Antonio par dépit, renonce à consommer le mariage. Mais dès le lendemain, furieux, il exige son dû. Erminia toujours vierge, marquée par son éducation religieuse et sous l’emprise de sa mère, est une jeune femme introvertie et inhibée, en proie à la phobie du corps masculin et du sexe. Elle s’en remet à la piété. Peu après, en butte aux assauts répétés de son mari, Erminia quitte le château familial et se réfugie chez sa sœur (Ewa Aulin). Celle-ci mariée, en rupture avec la famille, vit à la ville une vie plutôt libre où tout ne semble être que drogue, sexe et rock & roll...
Ce film oublié est un reflet de l’air du temps, ce début des années soixante-dix où la libéralisation de la censure rendit possible le traitement explicite de sujets qui, jusqu’ici, nécessitaient d’user d’une suggestivité et d’une subtilité certes contraignante, mais propre à produire quelques œuvres riches et subtiles (on pense par exemple à Répulsion de Polanski, ou Belle de jour de Bunuel).
Notre film, de par sa crudité, se faisait fort de drainer un public curieux et avide d’images jusque-là interdites (il a d’ailleurs fait l’objet d’une exploitation à l’international – ce qui ne préjuge en rien de son succès). Ainsi qu’on pouvait s’y attendre, on comprend rapidement que du drame psychologique annoncé, il ne va plus demeurer qu’un sujet graveleux. La scène de la nuit de noce (sorte de viol avorté), est filmée avec une complaisance si insistante qu’elle ne laisse aucun doute quant aux intentions du réalisateur…
Le réalisateur, c’est Vittorio De Sisti, un presque inconnu. Artisan de l’ombre, il a œuvré dans la plupart des genres du cinéma populaire italien des années 70 (sexy comédies, films en costume, giallo…). Comme beaucoup, il s’est replié à partir des années 90 sur le film de télévision.
Le défaut majeur de Quando l'amore è sensualità, réside dans le manque de finesse et de profondeur de la description psychologique de son héroïne. Il devait s’agir d’un portrait de femme, mais il n’est qu’esquissé. Quant à la charge contre la religion, elle semble de convention (voir le personnage classique du prêtre ambigu, entre douceur et concupiscence), la critique sociale elle, se résume à la description des parties qu’organisent de jeunes urbains oisifs.
Il manque ici une ambition artistique pour donner corps à un scénario pourtant intéressant, clair et bien construit, et qui réserve un dénouement pour le moins cruel (et curieusement dépourvu de ce moralisme hypocrite qui vient justifier certains films racoleurs). Mais la résolution du drame arrive de façon un peu trop mécanique, et ne semble pas résulter d’un long cheminement intérieur de l’héroïne. La complexité du rapport mère-fille, s’il est clairement établi, n’est pas davantage explorée.
La réalisation réserve cependant quelques bonnes surprises : effets modernistes (quoique un peu voyants) dans le montage, construction de scènes lancinantes conduites jusqu’au paroxysme, explorations visuelles des possibilités offertes par le décor (ainsi la découverte des fresques de la villa par Antonio), ou encore création d’images signifiantes qui évitent l’écueil du grotesque, telle celle d’Erminia se rendant à son mari (provisoirement), et qui étend les bras en croix, tel un Christ crucifié.
C’est que le manque de consistance du film est renforcé par la fadeur de l’interprétation d’Agostina Belli, très jolie certes (avec cet air chaste et pur qui convient parfaitement), mais qui demeure extérieure à son personnage, et son absence totale d’incarnation fait qu’on a du mal à comprendre et à partager sa névrose. Gianni Macchia quant à lui, n’a pas trop à forcer son talent pour faire vivre ce rustre bellâtre : il s’en sort bien. Françoise Prévost enfin, apporte une dimension dramatique touchante au personnage de la mère résignée qui, pour son malheur va dévoiler à son gendre ses failles les plus secrètes.
On ne manquera pas de signaler aux inconditionnels des belles actrices, une scène mémorable avec la voluptueuse Femi Benussi. Dans un rôle à sa mesure de marie-couche-toi-là évaporée, on la voit nue sous le voile de mariée d’Erminia, se livrer avec l’infortuné mari à une parodie obscène et blasphématoire des noces ratées où elle proclame de façon outrancière : « Non voglio, sono virgine ! ». Un grand moment.
Un point fort aussi, reconnaissons-le, est certainement la musique de Ennio Morricone, qui signe-là une partition particulièrement inspirée. Dans une veine minimaliste, il donne à entendre des voix enfantines qui scandent un air martial aux rythmes obsédants, conférant aux scènes clés du film une amplification bien venue.
Pour finir il est amusant de noter que Françoise Prévost, Femi Benussi, et Gianni Macchia seront quatre ans après, les protagonistes d’un imbuvable "Mala, Amore, e Morte".
Donc, une œuvre pas mal faite et qui se voit sans déplaisir, mais datée et par trop superficielle qui réduit à un simple film de genre un sujet plutôt voué à un film d’auteur. C’est qu’il manquait ici visiblement… un auteur.
DVD: CG Home video (www.cghv.it). La copie est moyenne, image pâlotte, usée mais c'est potable.
Le film est apparemment disponible sur youtube: www.youtube.com/watch?v=rxia2p7je9s
La musique originale semble avoir fait l'objet d'une édition spéciale.
Désolé, j'ai pas de copie d'écran sous la main. A venir ... |
|
Revenir en haut de page |
|
 |
Valor Psycho-cop


Inscrit le: 22 Fév 2007 Messages: 4497 Localisation: Vanves
|
Posté le: Jeu Mar 12, 2015 8:38 pm Sujet du message: |
|
|
Le DVD CG n'est pas terrible en effet.
[/size]Il existe une édition CineKult qui a l'air bien meilleure :
Sinon, sérieusement, Pierre, tu n'as pas à rougir de tes critiques : elles sont très bien écrites et très intéressantes... on aimerait juste en lire plus souvent !
A la limite, certains passages mériteraient d'être un peu plus développés... mais en même temps, certains lecteurs n'aiment pas les critiques trop longues !
 |
|
Revenir en haut de page |
|
 |
sigtuna Super héros Toxic


Inscrit le: 08 Jan 2010 Messages: 3818
|
Posté le: Jeu Mar 12, 2015 10:31 pm Sujet du message: |
|
|
Valor a écrit: |
Sinon, sérieusement, Pierre, tu n'as pas à rougir de tes critiques : elles sont très bien écrites et très intéressantes... on aimerait juste en lire plus souvent !
A la limite, certains passages mériteraient d'être un peu plus développés... mais en même temps, certains lecteurs n'aiment pas les critiques trop longues !
 |
Comme le dit Valor tes critiques sont bien écrites et c'est là l'essentiel, et un peu de sang neuf ne peux pas nous faire du mal.  _________________
 |
|
Revenir en haut de page |
|
 |
mallox Super héros Toxic


Inscrit le: 10 Sep 2006 Messages: 13982 Localisation: Vendée franco-française
|
Posté le: Ven Mar 13, 2015 12:01 pm Sujet du message: |
|
|
Oui oui, c'est bienvenu !
L'affiche sans les stries-logo.
Pour les images, crois-tu Valor que tu pourrais en capturer une dizaine de même qualité ? Sinon je me débrouille avec le lien de youtube refilé par Pierre.
Canada (French title) - Quand l'amour devient sensualité
Spain (video title) - El final de la inocencia
Greece - Apigorevmenes aisthiseis
Norway - Kjærlighet med forviklinger
USA - When Love Is Lust _________________

Dernière édition par mallox le Jeu Mar 15, 2018 5:58 am; édité 2 fois |
|
Revenir en haut de page |
|
 |
Valor Psycho-cop


Inscrit le: 22 Fév 2007 Messages: 4497 Localisation: Vanves
|
Posté le: Ven Mar 13, 2015 12:24 pm Sujet du message: |
|
|
Si tu veux, je peux réduire la qualité des 3 dernières !
Sinon, je devrais avoir le DVD CineKult dans une heure environ...  |
|
Revenir en haut de page |
|
 |
mallox Super héros Toxic


Inscrit le: 10 Sep 2006 Messages: 13982 Localisation: Vendée franco-française
|
Posté le: Ven Mar 13, 2015 12:28 pm Sujet du message: |
|
|
Valor a écrit: | Si tu veux, je peux réduire la qualité des 3 dernières ! |
C'est ce que j'allais faire avant de venir déposer ma requête ici.  _________________
 |
|
Revenir en haut de page |
|
 |
Valor Psycho-cop


Inscrit le: 22 Fév 2007 Messages: 4497 Localisation: Vanves
|
Posté le: Ven Mar 13, 2015 1:58 pm Sujet du message: |
|
|
10 captures prises au hasard : je n'ai pas regardé le film !
 |
|
Revenir en haut de page |
|
 |
flint Super héros Toxic


Inscrit le: 13 Mar 2007 Messages: 7606 Localisation: cusset-plage
|
Posté le: Sam Mar 14, 2015 4:41 pm Sujet du message: Re: [Critique] Quando l'amore è sensualità |
|
|
Pierre a écrit: | Il y des critiques que j'aimerais faire, mais me comparant à vous autres érudits, je suis complexé par mon manque de référence pour me lancer. |
Des références tu en as, du style également ; quant à nous sur Psychovision, on n'est pas des érudits, mais plutôt des passionnés.
Donc, merci pour cette chronique et l'analyse d'un film que personnellement je ne connaissais pas. De Vittorio De Sisti, je pense n'avoir vu que "Fiorina la vacca", une comédie située au Moyen-Age, qui était plutôt pas mal dans mes lointains souvenirs.
En tout cas, pour le film qui nous préoccupe ici, beau casting féminin en effet. |
|
Revenir en haut de page |
|
 |
Pierre 10% irradié


Inscrit le: 20 Jan 2012 Messages: 85 Localisation: France
|
Posté le: Lun Mar 23, 2015 7:21 am Sujet du message: |
|
|
Merci les gars pour vos encouragements ! Je note bien la différence entre érudition et passion, même si vous concernant, la passion recouvre l'érudition (alors que l'inverse n'est pas toujours vrai). Bon, ma principale réserve vient de ce que je me vois mal faire la critique du film d'un réalisateur dont je n'ai pas une connaissance précise (voire pas de connaissance du tout) de l’œuvre. Pour faire une analyse pertinente, il faut remettre en contexte le film dans un ensemble, pas seulement le genre et l'époque, mais aussi les œuvres du même auteur qui l'ont précédées et celle qui lui ont succedées. Un certain Proust a dit ça mieux que moi:
Citation: | Ne lire qu’un livre d’un auteur, c’est voir cet auteur une fois. Or, en causant une fois avec une personne, on peut discerner en elle des traits singuliers. Mais c’est seulement par leur répétition, dans des circonstances variées, qu’on peut les reconnaître pour caractéristiques et essentiels. Pour un écrivain, pour un musicien ou pour un peintre, cette variation des circonstances qui permet de discerner, par une sorte d’expérimentation, les traits permanents du caractère, c’est la variété des œuvres. Nous retrouvons, dans un second livre, dans un autre tableau, les particularités dont la première fois nous aurions pu croire qu’elles appartenaient au sujet traité autant qu’à l’écrivain ou au peintre. Et du rapprochement des œuvres différentes nous dégageons des traits communs dont l’assemblage compose la physionomie morale de l’artiste. Quand plusieurs portraits peints par Rembrandt, d’après des modèles différents, sont réunis dans une salle, nous sommes aussitôt frappés par ce qui leur est commun à tous et qui est les traits mêmes de la figure de Rembrandt. |
Par exemple, j'aimerais beaucoup faire la critique de Malizia de Samperi mais c'est le seul film de lui que j'ai vu ... Cela dit, dans certains cas, vous pourriez m'aider en complétant a posteriori mon jugement par vos connaissances personnelles. Mais peut-être que je me prend la tête inutilement ... Allez, à bientôt ! |
|
Revenir en haut de page |
|
 |
igorfx 40 % irradié


Inscrit le: 19 Sep 2006 Messages: 484 Localisation: Au-delà d'URL
|
Posté le: Lun Mar 23, 2015 8:31 pm Sujet du message: |
|
|
J'ai vu le film aujourd'hui mais en partie à cause de la version anglaise pas très audible je me suis un petit peu ennuyé. Heureusement c'est toujours une plaisir de voir Agostina Belli, en plus elle n'est pas avare de ses charmes dans ce film.
François Pévost est très bien dans son rôle de quinqua névrosée dans lequel est a été cantonnée à cette époque.
Ce qui sauve le film c'est sa musique, un très beau score. |
|
Revenir en haut de page |
|
 |
|