[M] [Critique] Francesca

 
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flint
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MessagePosté le: Mer Juil 06, 2016 8:17 pm    Sujet du message: [M] [Critique] Francesca Répondre en citant



Francesca

Genre : Giallo

Année : 2015

Pays d'origine : Italie, Argentine

Réalisateur : Luciano Onetti

Casting : Luis Emilio Rodriguez, Gustavo Dalessanro, Raul Gederlini, Silvina Grippaldi, Juan Bautista Massolo, Florencia Ollé...



Qui est Luciano Onetti ? On peut se poser la question après avoir vu « Francesca », un thriller « moderne » désireux de ressusciter un genre que l'on pouvait croire définitivement mort. Luciano Onetti est donc un jeune réalisateur argentin issu d'une lignée italienne.
Comme il le déclarait dans une interview pour le Hollywood Investigator : L'art est universel, mais le giallo est typiquement italien. Voilà pourquoi « Francesca » fut tourné en italien, avec une intrigue située à Rome dans les années '70. Plutôt un défi quand on réside à Buenos Aires. Mais le résultat est probant, les frères Onetti (Nicolas étant producteur et co-scénariste avec Luciano) ayant réussi à nous faire remonter le temps. Ceci grâce à quelques artifices d'usage (véhicules, garde-robe, gadgets divers comme le magnétophone à bande, le projecteur diapos, la machine à écrire Olivetti…). C'est à Nicolas que revînt la tâche de faire la tournée des antiquaires pour récupérer tout ce qui était nécessaire.



Techniquement, le metteur en scène voulait une image lumineuse, des couleurs brillantes et saturées. Au niveau du fond, le but était de replonger le spectateur durant l'âge d'or du giallo. Et pour y parvenir, Luciano Onetti n'a pas hésité à puiser dans la filmographie des spécialistes du genre (Dario Argento, Mario Bava, Lucio Fulci…). L'influence la plus évidente (et Onetti ne s'en cache pas) provient de « L'oiseau au plumage de cristal » (notamment le début). On y retrouve bon nombre de similitudes dans la personnalité du tueur : étaler sur une table sa panoplie d'armes blanches avant d'en choisir une, prendre des photos de sa prochaine victime ou encore narguer la police au téléphone avec une voix trafiquée. Mais ce n'est pas tout, « Francesca » est en quelque sorte un Reader's Digest du thriller italien des années '60 et '70. Un condensé dans lequel se croisent poupée au faciès inquiétant, berceau annonciateur d'un drame, traumatisme d'enfance, mannequin baigné de filtres roses et bleus, tueur ganté, armes blanches (dont l'inévitable coupe-choux), mises à mort sadiques et théâtrales, bouteille de J&B, sexualité déviante ou contrariée, et imperméable rouge. Niveau sonore, cela va de la musique nerveuse à la Goblin à celle plus expérimentale tendance Morricone dans « Le chat à neuf queues », ainsi que la comptine enfantine où l'on fredonne le thème de Frère Jacques, comme dans « Blue Eyes of the Broken Doll » et « Les cloches de l'enfer » (notons que la partition de « Francesca » est également due à Luciano Onetti). Encore un clin d’œil en forme d'hommage, celui du livre que feuillette l'un des protagonistes du film, un giallo qui tire son nom des fameux romans policiers aux couvertures jaunes publiés en Italie entre 1930 et 1960.



Et l'intrigue dans tout cela ? Il y a quinze ans, une fillette fut kidnappée et jamais on ne la retrouva. Dix ans après les faits, la police clôtura le dossier. La gamine (de nature perverse, comme on peut s'en rendre compte dans des séances de flash-back) était la fille d'un poète et dramaturge renommé, Vittorio Visconti. Quant à la mère, Nina, elle enseignait le piano. Selon le témoignage de Visconti, un intrus cagoulé s'est introduit dans le domicile familial au moment des faits. Surpris, il s'est sauvé en enlevant Francesca. Dans la lutte, Vittorio fut gravement blessé. Une blessure qui le paralysa aux jambes. Depuis ce jour, il est confiné dans un fauteuil roulant et sa femme, dépressive et inconsolable, reste terrée dans la maison. Un lourd secret pèse également sur cette famille, le fait que Francesca aurait tué son petit frère, encore au berceau, après lui avoir enfoncé une pointe métallique dans l’œil.



C'était il y a une quinzaine d'années, donc, et depuis, à l'exception du couple Visconti, tout le monde à Rome a oublié l'affaire Francesca. Sauf qu'une vague de crimes commence à semer la panique au sein de la capitale italienne. Un tueur mystérieux exécute à l'arme blanche des personnes au passé trouble. Il laisse après ses crimes une lettre anonyme dont les phrases sont extraites de La Divine Comédie, de Dante Alighieri (et plus précisément, du Cinquième Chant de l'Enfer). De plus, les victimes sont retrouvées avec des pièces sur les yeux, une allusion à Charon le nocher des Enfers. Or, il se trouve que le Cinquième Chant de l'Enfer avait été joué autrefois par Visconti. Il y est d'ailleurs question de deux amants maudits : Paolo Malatesta et Francesca da Rimini. Francesca… Est-ce vraiment une coïncidence, d'autant que le célèbre pianiste Giovanni Bianco doit donner un récital exceptionnel à Rome, et interpréter… Francesca da Rimini, composé par Tchaïkovski en 1876. Mais voilà, la veille de la représentation, Bianco est à son tour assassiné, la gorge tranchée par une lame de rasoir.



Avec « Francesca », Luciano Onetti a su éviter les erreurs grossières de son premier opus, « Sonno Profondo ». Là où il avait tout misé sur la forme au détriment du fond, pour aboutir à une œuvre malheureusement indigeste malgré sa courte durée (moins de soixante-dix minutes), Onetti corrige ici le tir en modérant ses expériences arty et expérimentales. L'abus de références à son genre de prédilection avait plombé le premier long métrage du réalisateur. « Francesca » est encore chargé en symboles, mais bénéficie d'un scénario construit et d'un dénouement final inattendu en mesure de surprendre le spectateur.



Et bien que l'équipe de tournage ait dû composer avec des restrictions légitimes, comme éviter les lieux fréquentés vu que le film est censé se dérouler quarante-cinq ans en arrière, « Francesca » tient la route. Bien sûr, à cause de l'étroitesse du budget, la production n'a engagé que des acteurs amateurs, sans la moindre expérience, et dans un nombre limité. Cela explique pourquoi on ne verra jamais plus de trois personnes dans un plan serré, ni dans un plan large. Malgré cela, le manque de moyens de la production et d'expérience de la part du casting n'entravent pas la dynamique de ce « Francesca ». Les soixante-quinze minutes passent même comme une lettre à la poste. A noter qu'après le générique de fin se trouve une scène à l'ambiance torture-porn (figurant aussi dans les bonus en tant que scène cachée) posant une autre question : Vittorio Visconti était-il un pervers pédophile ? Une piste pas forcément évidente sauf au détour d'un passage où Visconti, en plein cauchemar, voit un homme âgé (son père ?) lui dire qu'il lui a récupéré des sous-vêtements. Toujours est-il que « Francesca » baigne dans un climat malsain de tous les instants, et s'il n'atteint pas le niveau d'un « Occhi di cristallo » réalisé par Eros Puglielli en 2004, il figure toutefois parmi les réussites plus qu'honorables du néo-giallo.



Dernière édition par flint le Jeu Juil 07, 2016 5:58 am; édité 1 fois
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flint
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MessagePosté le: Mer Juil 06, 2016 8:33 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Fiche dvd



Francesca – The Ecstasy of Films

Région : Zone 2 - PAL
Editeur : The Ecstasy of Films
Pays : France

Sortie film : 9 octobre 2015 (Espagne, Festival de Sitges)
Sortie dvd : 24 juin 2016

Durée : 75'10
Image : 2.35:1 - 16/9e compatible 4/3
Audio : Dolby Digital 5.1



Langue : italien
Sous-titres : français, anglais, espagnol

Bonus :

- Les coulisses du tournage (13'46)

- Entretien avec Luciano et Nicolas Onetti (19'00)

- Générique de début alternatif (3'16)

- Scène cachée (1'57)

- Bande-annonce originale (1'38)

- Catalogue éditeur (7'51)

- Galerie de photos (4'09)



Commentaire : Bonne idée de la part de l'éditeur indépendant The Ecstasy of Films que d'avoir sorti ce « Francesca », et l'on espère que ce risque (le film étant inconnu ou presque, et le néo-giallo n'ayant pas toujours bonne presse) sera couronné de succès. Ce troisième titre dans la collection Profondo Giallo bénéficie encore d'une présentation soignée : jaquette réversible, étui cartonné et cerise sur le gâteau pour les 300 premiers acheteurs : une affiche du film. Film récent oblige, la qualité de l'image est forcément au rendez-vous, celle du son également. L'éditeur propose trois pistes de sous-titres (français, anglais et espagnol) ainsi qu'une piste isolée pour la musique, une idée originale permettant de voir le film sous un autre angle.



Les suppléments sont encore une fois nombreux. On retiendra surtout deux bonus qui forment un complément utile au film. Les coulisses du tournage nous font rencontrer Florencia Ollé, maquilleuse et responsable des effets spéciaux. On apprend ainsi qu'elle dut également remplacer au pied levé l'actrice qui devait incarner la première victime. Ce bonus nous entraîne vers les différents lieux de tournage, comme la bibliothèque, l'imprimerie, la salle de billard et le Teatro Español (dans lequel le pianiste se fait trancher la gorge).

Et puis, surtout, l'entretien avec Luciano et Nicolas Onetti nous permet de faire connaissance avec les frères cumulant à eux deux tous les postes-clés puisqu'ils se partagent la réalisation, le scénario, la production et la musique. On apprend notamment que les premiers émois cinématographiques de Luciano furent des classiques de l'horreur. Ce n'est que bien plus tard (vers 2010) que le futur réalisateur découvrira le giallo qui sera pour lui une révélation (il a d'ailleurs prévu une trilogie, ce qui signifie qu'un autre giallo devrait être tourné prochainement). Le cinéaste évoque ses principales sources d'inspiration, qui sont en tout premier lieu Dario Argento et Sergio Martino. Il précise enfin que le scénario de « Francesca » avait été rédigé avant « Sonno Profondo » (sorti en 2013) et reconnaît que ce dernier était plus expérimental, et qu'il a souhaité revenir avec « Francesca » à un thriller traditionnel.



Jusqu'à présent, « Francesca » n'avait connu qu'une sortie dvd/blu-ray dans très peu de pays : en Allemagne (blu-ray et dvd, janvier 2016 chez Mad Dimension), puis en Espagne (blu-ray, juin 2016 chez Regia Films). Cette sortie en France est donc la troisième dans le monde, devançant même les Américains de Unearthed Films qui devraient être les prochains.
Chapeau, et merci The Ecstasy of Films pour avoir l'occasion de découvrir ce giallo venu d'Argentine.

Note : 9/10





Dernière édition par flint le Jeu Juil 07, 2016 5:59 am; édité 1 fois
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flint
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MessagePosté le: Mer Juil 06, 2016 8:53 pm    Sujet du message: Répondre en citant























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sigtuna
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MessagePosté le: Jeu Juil 07, 2016 6:11 am    Sujet du message: Répondre en citant

enaccord8 icon_cool
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Valor
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MessagePosté le: Jeu Juil 07, 2016 3:56 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Tes captures me font très envie !

Un autre Argentin à découvrir ?
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flint
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MessagePosté le: Jeu Juil 07, 2016 4:25 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Valor a écrit:


Un autre Argentin à découvrir ?


Ah oui, c'est vrai. Les Argentins ont le vent en poupe en ce moment !
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