The Omega Man 99 % irradié
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Posté le: Dim Sep 15, 2019 12:03 pm Sujet du message: [M] [Critique] Mission Ninja - 1984 |
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The Ninja Mission
(Mission Ninja)
Aka "Ninja - In geheimer Mission"
Origine : Suède / Grande Bretagne / Pologne
Genre : Espionnage / Ninjas / Arts martiaux / Action
Année : 1984
Réalisateur : Mats-Helge Olsson
Avec : Krzysztof Kolberger, Hanna Bieniuszewicz (Hanna Pola), Bo F. Munthe, Curt Broberg, Hans Rosteen, John Quantz, Sirka Sander...
Scénario : Matthews Jacobs
Image : Peter A. Stevenson
Musique : Danny Young (Dag Unenge)
Accroche : Quand les Ninjas attaquent !
Distribution :
Krzysztof Kolberger (Mason) ; Hanna Bieniuszewicz aka Hanna Pola (Nadia) ; Bo F. Munthe (Hansen) ; Curt Broberg (Markov) ; Hans Rosteen (Ableman) ; John Quantz (Johnny) ; Sirka Sander (Natassia)
Résumé :
Karl Markov, un scientifique suédois, essaie de sortir de Russie avec l'aide des services secrets américains. L'opération échoue mais le KGB lui fait croire qu'il a réellement été exfiltré et qu'il se trouve en Suède. Des ninjas surentraînés, dirigés par Mason, agent américain de la CIA, reçoivent l'ordre de le faire sortir du pays...
Si le réalisateur Ingmar Bergman, l'auteur Stieg Larsson (la saga Millénium) et le groupe Abba sont les personnalités suédoises les plus populaires, il est en revanche fort probable que le réalisateur Mats-Helge Olsson ne vous dise absolument rien, et ce bien que ses films furent exploités chez nous pendant la glorieuse époque des vidéoclubs. Une époque qui voit "Mission Ninja" connaître un petit succès avant que "Blood Tracks", petit film d'horreur sans prétention, ne lui succède. Il serait toutefois réducteur de résumer la carrière du réalisateur à ces deux productions. De 1975 à 1994, Olsson a réussi "l'exploit" de réaliser une vingtaine de films dont deux Westerns (tournés en Suède !) à ses débuts, puis "Eagle Island", "Spökligan", "The Hired Gun", "The Forgotten Wells", "Russian Terminator" (aka The Ninja Mission 2) ainsi que trois collaborations avec David Carradine, à la base partant pour n'en tourner qu'un seul : "Fatal Secret", "Animal Protector" et "The Mad Bunch".
En y regardant de plus près, on constate que le gaillard a fait de la prison après avoir arnaqué l'administration fiscale, a escroqué la majorité de ses collaborateurs et est porté disparu depuis des années. Il aurait été aperçu un peu partout dans le monde, du Danemark jusqu'en Australie et, même s'il est bel et bien vivant aujourd'hui, des rumeurs sur sa mort ont fini par circuler...
La genèse de "Mission Ninja" est aussi improbable que la carrière de son réalisateur : Mats-Helge Olsson purge alors une peine de 4 mois de prison en raison des dettes accumulées et des multiples contrats non respectés suite au fiasco total de la méga production "Sverige åt svenskarna" (La Suéde aux Suédois) qu'il vient de produire et de coréaliser avec Per Oscarsson, dans laquelle la plupart des stars suédoises de l'époque (dont Christina Lindberg) apparaissent. Une fois sorti de prison, ce brave Mats-Helge rencontre Charles Aperia (directeur de la société VTC, basée à Stockholm et produisant des films de genre à petit budget), désireux d'exploiter le marché en plein essor de la VHS. Un certain Bo F. Munthe, (professeur d'arts martiaux connu pour avoir introduit le "ninjutsu" en Suède et plus généralement en Europe) débarque un jour dans le bureau d'Aperia avec une ébauche de scénario à base de ninjas. Pour Helge et Aperia, c'est l'occasion idéale de rebondir ! Mais hors de question de dilapider le budget du film, déjà fort restreint : ils vont puiser parmi les élèves de Munthe pour camper les ninjas. Aperia et Helge recrutent dans le même temps un certain nombre de techniciens en Pologne, lesquels travaillent pour la moitié du coût de leurs homologues suédois (n'oublions pas qu'à l'époque la Pologne est encore communiste), et en profitent même pour engager deux acteurs polonais comme têtes d'affiche !
Sur le papier, "Mission Ninja" a tout du projet casse-gueule, presque anti-commercial, a fortiori à cause des deux rôles-titres évoqués ci-dessus et interprétés par des acteurs polonais quasi inconnus du public.
Krzysztof Kolberger est aussi monolithique que ses homologues Michael Dudikoff et Sho Kosugi (la pratique des arts martiaux en moins) et, pour l'anecdote, la carrière de l'acteur est aussi mystérieuse que celle de son réalisateur, remplie d'allers-retours entre l'Est et l'Ouest qui feront dire plus tard à certains que Kolberger était peut-être un espion !
De son côté, Hanna Bieniuszewicz (Hanna Pola) est très jolie et peu avare de ses charmes ! On retient d'ailleurs de "Mission Ninja" sa tenue de scène particulièrement impudique, par ailleurs censée résumer la décadence du monde occidental ! Une illustration de l'Occident qui présentait un risque pour Mats-Helge et Charles Aperia, mais qu'importe lorsque l'on vise une niche aussi spécifique, coincée entre les pantalonnades de Godfrey Ho et les "Ninjaburger" de la Cannon. Bref, ils ne s'embarrassent guère de ces états d'âmes et estiment n'avoir pas trop de mal à trouver leur place.
Non pas qu'il s'agisse d'une œuvre d'une qualité supérieure, encore moins de luxe (les chorégraphies des combats, par exemple, sont à chier !), mais l'ensemble se laisse regarder malgré les carences. Le réalisateur parvient à trouver son inspiration là où on ne l'attendait pas et signe un faux film de ninjas mais un vrai film d'espionnage en plus d'un hommage aux films de commando des années soixante, avec assaut de la forteresse et tutti quanti, chose étonnante au regard de son faible budget. Quant aux ninjas, on constate qu'ils utilisent davantage de gadgets dignes d'un James Bond que les arts martiaux.
Concernant la production, notons aussi que celle-ci a parfois recours à divers artifices destinés à masquer le manque de moyens, notamment pour expliquer pourquoi les soldats russes disposent de l'équipement militaire suédois (ils doivent faire croire à leur prisonnier qu'ils sont bien en Suède).
Le réalisateur peut aussi compter sur quelques décors impressionnants comme celui de la forteresse de Fredriksten, située dans la ville de Halden, en Norvège, ou bien encore l'hôpital de Lidköping, sis quant à lui en Suède.
Parmi les faiblesses manifestes, si les méchants tombent sous les balles des gentils par grappes entières, ils dépassent rarement le nombre de cinq à l'écran mais, pour rendre le final spectaculaire malgré tout, le réalisateur introduit un élément tout aussi insolite qu'efficace : d'étranges fléchettes qui ont la capacité de faire exploser les organes internes ! Hommage involontaire ou emprunt grossier à "Contamination", difficile de l'affirmer, en tout cas Mats-Helge Olsson va jusqu'à dupliquer les équipements (masque à oxygène et combinaisons) du film de Luigi Cozzi... A ce stade on ne critique plus, on déguste ! Ailleurs, un figurant se fait trancher la tête en deux, un autre vomit dans son masque à oxygène sous l'effet du gaz toxique pendant que deux ninjas massacrent allègrement à coup de gadgets improbables le reste d'un casting qui semble défiler en boucle. Des minutes de pur bonheur qui font et continueront de faire beaucoup pour assurer la pérennité de "Mission Ninja" !
Qu'importe d'ailleurs si l'intrigue est un peu maigre et si le jeu des acteurs est approximatif, ce qui compte avant tout, ce sont les scènes d'action. Il paraît évident que Mats Helge les filme de manière prioritaire, avec un script perdu en cours de route, s'il n'a jamais été écrit. Selon certains témoignages, ce dernier tendait de temps à autre des bouts de papier aux acteurs, censées détenir leurs répliques tandis que les scènes dialoguées étaient filmées à part, par un assistant polonais. Bien évidemment, les répliques ne correspondaient pas aux gribouillages soi-disant écrits par Helge.
Ici, tout fleure bon l'improvisation ! Que ce soit l'utilisation du ralenti, le montage ou bien la photographie (en revanche, si vous avez la chance de vous procurer la version DVD pour bien juger de ses qualités et défauts, vous constaterez que "Mission Ninja" contient des scènes nocturnes réussies).
En le saupoudrant d'une musique typique des années 80 (lorgnant cependant sur Tangerine Dream) et en l'affublant d'une splendide affiche et/ou jaquette, on obtient au final le parfait produit de consommation qui fera la joie des vidéophages. "The Ninja Mission" est une leçon de marketing et de placement de produit et peut prétendre faire partie de ces petites productions qui n'avaient rien de particulier à faire valoir hormis une belle présentation et quelques séquences qui marquent la rétine. La brutalité de la séquence finale permettra même au producteur Aperia de vendre le film à la New Line pour qu'elle le distribue aux États-Unis. Le film sera alors un véritable succès au box-office et la MGM va en acquérir les droits pour une distribution internationale dans pas moins d'une cinquantaine de pays. Et à "The Ninja Mission" de se transformer en best-seller indépendant de l'ère de la vidéo. En rapportant environ 30 000 000 $ pour un budget de 2 500 000 $, il reste l'un des films suédois les plus rentables et les plus connus de tous les temps alors qu'il fit un véritable flop au box-office local lors de sa sortie !
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