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mallox Super héros Toxic


Inscrit le: 10 Sep 2006 Messages: 13982 Localisation: Vendée franco-française
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Posté le: Jeu Sep 25, 2008 1:24 pm Sujet du message: [M] [Critique] Demoniac (Le Manoir de la terreur) - 1963 |
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Le Manoir de la terreur (Demoniac) – 1963
(Alias Horror/The Blancheville monster)
Origine: Espagne/Italie
Genre: Horreur gothique
Réalisé par Alberto de Martino (Sous le pseudo de Martin Herbert)
Avec Gerard Tichy, Ombretta Colli, Helga Line, Leo Anchoriz, Richard Davis …
Scénario : Natividad Zaro , Giovanni Grimaldi (sous le pseudo de Jean Grimaud), Bruno Corbucci & Sergio Corbucci (sous le pseudo de Gordon Wilson Jr)
Musique : Carlo Franci
Fin du 19eme siècle, Emily de Blancheville se rend dans le nord de la France en calèche avec son ami, afin de rejoindre le domaine de Blancheville ayant appartenu à feu son père, et passé maintenant aux mains de son frère. Emily est hantée par l’accident qui a laissé brûlé vif son père, laissé alors pour mort. Ce dernier, pourtant, ne l’est pas tout à fait. Tenant sa fille pour responsable, il s’est même juré de la tuer avant son vingt et unième anniversaire, prévu cinq jours plus tard. Fraîchement débarquée, et autour du dîner du soir, un hurlement tétanisant éclate à proximité. « Ce n’est rien qu’un chien ! » s’exclame son frère pour la rassurer. Pourtant, tout demeure de plus en plus inquiétant au sein du manoir. Ce n’est pas Helga, l’assistante de son frère, avec ses airs mystérieusement complotant et menaçant, qui la rassurera. Bien au contraire, une nuit, alors qu’elle s’aventure dans les méandres du château, voici qu’Emily ouvre une porte et tombe sur Helga en train faire une piqûre à un homme au visage entièrement brûlé. Son frère aura beau la rassurer, assez vite elle s’apercevra que son père n’est pas mort, et du sort que celui-ci lui réserve. La voici bientôt elle-même laissée pour morte et enfermée vivante dans un cercueil…
On a trop souvent tendance à réduire le cinéma gothique transalpin des années 60 aux seuls Mario Bava et Antonio Margheriti (« Danse macabre », « La vierge de Nuremberg »). Il est vrai que Bava a ravivé le genre au début des années 60 avec son « Masque du démon », tout en lançant une égérie qui comptera énormément aux yeux des cinéphiles, quitte à se voir même fixée à ce genre, à savoir la très charismatique Barbara Steele. Pourtant ils sont nombreux les artisans à avoir tâté de ce genre et l’on peut citer en vrac, Georgio Ferroni (« Le moulin des supplices »), Riccardo Freda (« L’horrible secret du Dr Hichcock »), Camillo Mastrocinque (« La crypte du vampire »), Massimo Pupillo (« Des vierges pour le bourreau », « Cimetière pour morts vivants ») ou encore, mais j’en oublie, Mario Caiano et ses « amants d’outre-tombe ». Dans le lot les livraisons sont inégales, mais certains ont acquis dès leur sortie ou bien au fil des ans, une petite renommée. Ce n’est pas le cas de « Demoniac » qui reste à ce jour et à mon humble avis, une belle réussite bien trop méconnue.
C’est entre deux péplums (« Persée l'invincible » et « Le Triomphe d'Hercule »), genre également très en vogue à l’époque, qu’Alberto de Martino s’attèle à ce projet, dont on retrouve au scénario des frères Corbucci inspirés et qui surfent intelligemment sur plusieurs autres courants ayant également le vent en poupe ailleurs, et à de Martino de transformer ce mixe de manière ici brillante, convoquant dans un même temps les mythes de la littérature fantastique tels Edgar Poe et sa « chute de la maison Usher », mais aussi Bram Stocker et son « Dracula » avec une héroïne (Emily De Blancheville, très bien campée par Ombretta Colli cantonnée elle aussi à ce moment de sa carrière dans le péplum) qui n’est pas sans rappeler Lucy Harker et ses déambulations de nuit. Pas étonnant non plus qu’on y retrouve à la fois l’atmosphère de certains films de la Hammer, avec en point de mire « Les Maîtresses de Dracula » pour le plus évident, ainsi qu’une esthétique étonnante, pas très éloignée finalement de certains films fantastiques mexicains en vogue vers la fin des années 50. On pense par moments aux œuvres de Fernando Mendez ou Julian Soler. (A noter que si le film a bien été tourné en noir et blanc, la copie VHS proposée en France chez Delta Video est en Sépia, ce qui ne gâche pas le plaisir).
On rappellera également qu’il s’agit d’une co-production italo-espagnole et à ce titre, outre le scénariste Natividad Zaro, il convient de mettre en avant la fantastique photographie de Alejandro Ulloa qui contribue de manière monumentale, au cachet et à l’ambiance de terreur ici savamment distillée pour ne pas dire constante. Si les scènes à l’intérieur du château sont d’une beauté à couper le souffle, les extérieurs emplis d’arbres effeuillés, notamment dans les sous-bois d’automne, sont splendides. On se croirait revenu au temps de Maupassant. Un homme d’un talent considérable et à la riche carrière, que l’on retrouvera à la fois chez Jess Franco (« Le diabolique docteur Z »), chez Sergio Corbucci (« Companeros », « Le mercenaire ») ou encore Lucio Fulci (« Perversion Story ») pour ne citer qu’eux. Il ne faudrait toutefois pas réduire le film à un exercice esthétique et visuel très réussi, qui ne saurait nullement être garant de la réussite globale d’une telle entreprise. Ils ne sont pas rares les beaux films dont on gratte le vernis pour s’apercevoir qu’on s’ennuie au spectacle dans un même temps, expulsant quelques bâillements polis, histoire de rendre hommage malgré tout à ses qualités annexes. « Demoniac » évite bel et bien ce piège grâce à une conjugaison de talents. Si Alberto de Martino est à l’époque un réalisateur solide, il fait preuve ici d’un sens du rythme qui ne se dément pas. Les alertes, les scènes d’effroi se conjuguent quasi scientifiquement aux scènes plus explicatives et donc plus statiques par définition. Sauf qu’en multipliant les angles, de Martino impose une dynamique en même temps que d’accroître la sensation d’un danger alentour. De fait, on reste à peu de choses près sur le qui-vive.
Les dialogues, de leur côté, complètent bien cette dynamique, car ils sont presque toujours - il y a bien quelques passages obligés d’amourette vaguement cucul la praline mais rapides – et dans le sujet du film, et dans le ton. A cet égard ,on se devra de dire tout le bien qui émane d’un excellent casting, toujours plausible et complémentaire. Gérard Tichy est un grand acteur et il le prouve une fois encore ici avec une sobriété qui étonne notamment par rapport au rôle qu’il endosse. Pas étonnant que ce type ait fait une carrière d’une richesse exemplaire tant dans l’exploitation (« La Corrupción de Chris Miller » le giallo de Juan Antonio Bardem) que dans de grosses productions telles que « Le Cid » ou « Doctor Zhivago ». Leo Anchóriz (« O’Cangaçeiro ») lui donne une réplique de qualité en médecin de plus en plus sceptique, tandis que les femmes s’en sortent merveilleusement bien, autant de manière inquiétante (Helga Liné est formidable en assistante menaçante mais fragile), que remplie d’effroi (Irán Eory).
Ajouté à cela une exceptionnelle musique de Carlo Franci (souvent cantonné aux seuls péplums lui aussi) et l’on obtient une œuvre tout à fait délectable en son genre, et même à mon sens l’un des hauts du panier de l’horreur gothique. On pourra même parler de giallo gothique. Quoiqu’il en soit, il s’agit d’un très bon film que je ne peux que conseiller de découvrir si ce n’est déjà fait. Et mes salutations au monstre au visage brûlé vif, tapi dans ce vieux manoir, qui ne démérite pas lui non plus…
Accroche : Un très bon giallo gothique _________________

Dernière édition par mallox le Ven Mai 25, 2018 7:16 am; édité 5 fois |
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flint Super héros Toxic


Inscrit le: 13 Mar 2007 Messages: 7606 Localisation: cusset-plage
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Posté le: Jeu Sep 25, 2008 1:43 pm Sujet du message: |
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C'est assurément l'une des grandes réussites d'Alberto De Martino, réalisateur trop souvent décrié, à qui l'on a reproché de copier les genres à la mode (gothique, espionnage, horreur, etc..). De Martino est plus qu'un habile faiseur, c'est un bon cinéaste (bon, on évitera de parler de "L'Homme Puma").
"Demoniac" est quasiment un chef d'oeuvre, magnifié comme tu l'as dit par sa photographie et ces teintes sepia inhabituelles, donnant au film un cachet irréel. L'habileté du cinéaste consiste ici à jongler entre le gothique fantastique et le giallo machination, et il y parvient avec maestria.
Comme tu l'as souligné, les acteurs sont au diapason, et Helga Line m'a littéralement fait craquer dans ce "Demoniac" de haute volée. |
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mallox Super héros Toxic


Inscrit le: 10 Sep 2006 Messages: 13982 Localisation: Vendée franco-française
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Posté le: Dim Fév 01, 2015 11:27 am Sujet du message: |
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Le Manoir de la terreur - Artus Films
Région : Zone 2 PAL
Editeur : Artus Films
Pays : France
Sortie film (France) : 20 mai 1966
Sortie dvd : 3 mars 2015
Durée : 84 minutes
Image : N&B - 1.66 d'origine - 16/9e compatible 4/3
Audio : Dolby 2.0
Langues : français, italien
Sous-titres : français
Bonus :
- "Le Monstre de Blancheville" par Alain Petit
- Diaporama d'affiches et de photos
- Bandes-annonces de la collection gothique
Commentaire : Sorti en France en Vhs chez Delta Vidéo, on connaissait le film dans une couleur sépia qui lui seyait plutôt bien (*), en dehors du fait que la copie était un peu surexposée. Le voici dans une copie restaurée, en noir et blanc pur, ma foi d'une bien belle qualité. Aucune différence notable n'est à signaler entre la piste française et l'italienne. L'image est nette, le format respecté, tout juste notons-nous que la version italienne est légèrement plus feutrée que la version française, pourtant de bonne qualité.
Bref, d'un point de vue technique et vu la rareté du film, on ne peut que louer l'initiative et le travail fourni par l'éditeur.
Niveau bonus, nous avons droit à un entretien avec Alain Petit qui répond aux questions de Thierry Lopez (accent montpelliérain inside) qui, d'entrée, lui demande quelle place occupe "Le Manoir de la terreur" au sein du cinéma gothique italien. Alain Petit rappelle que le film d'Alberto De Martino fut conçu en plein âge d'or du genre (1962) mais fut a contrario exploité tardivement en Europe, notamment en France, où celui-ci n'est parvenu que fin 1965 pour sortir dans les salles en mai 1966, soit quatre années après.
Alain Petit rappelle que "Le Manoir de la terreur" a été conçu dans une période charnière, durant laquelle se faisaient en même temps de petits et de grands budgets. Il revient également sur l'accueil que reçut le film en France, complètement déprécié par les critiques selon lui, car arrivant après une première vague gothique déjà assez riche (Mario Bava, Riccardo Freda avec "L'Effroyable secret du Docteur Hichcock"," puis "Le Spectre du professeur Hichcock", Georgio Ferroni et son "Moulin des supplices" n'est pas cité mais peu importe...). Du coup, de par ce décalage entre sa conception et son exploitation, on reprocha à tort au film de De Martino d'utiliser des ressorts et des scènes déjà vues. La seule concession faite par Alain Petit, et l'auteur de ces quelques lignes le rejoint, c'est la ressemblance entre la scène du cercueil dans "Le Manoir de la terreur" et "L'Effroyable secret du Docteur Hichcock", bien peu de chose en vérité.
Bref, notre interlocuteur rappelle fort justement que, s'il n'est pas forcément le meilleur du genre gothique, "Demoniac" est loin d'en être l'un des parents pauvres.
Pour le reste de ses propos, il convient de laisser le plaisir de la découverte aux châtelains cinéphiles amateurs de gothique.
Enfin, comme souvent chez Artus, nous avons droit à un petit panorama d'affiches et surtout de photos d'exploitation, ainsi qu'aux bandes-annonces des films sortis dans la collection gothique et dont on rappellera en passant, les titres : "La Crypte du vampire", "Cimetière pour Morts-Vivants", "La Vengeance de Lady Morgan", "Les Amants d'outre-tombe" et "L'Effroyable secret du Docteur Hichcock".
Histoire de conclure et à titre personnel, plus qu'Alain Petit encore, lequel argue que ce "Blancheville Monster" est loin d'être le pire du genre, j'aurais pour ma part tendance à affirmer qu'il s'agit même de l'un des meilleurs et donc, par extension, de vous conseiller l'achat.
En rapport avec le dvd :
# La critique du film "Le Manoir de la terreur"
(*) Le dvd Artus Films et la Vhs Delta Vidéo, histoire de donner un petit aperçu de ce qu'on a gagné en France :
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Dernière édition par mallox le Ven Mai 25, 2018 7:12 am; édité 1 fois |
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Valor Psycho-cop


Inscrit le: 22 Fév 2007 Messages: 4497 Localisation: Vanves
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Posté le: Dim Fév 01, 2015 2:52 pm Sujet du message: |
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Superbe présentation d'un bien beau DVD !
Bravo Mallox... et merci Artus !
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flint Super héros Toxic


Inscrit le: 13 Mar 2007 Messages: 7606 Localisation: cusset-plage
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Posté le: Dim Fév 01, 2015 3:17 pm Sujet du message: |
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Le sépia, c'est plus une encre qu'une couleur, effectivement.
Oui, comme Valor, jolie fiche dvd, merci Mallox. En ce qui me concerne, je considère également ce film comme l'un des fleurons du cinéma gothique, tous pays confondus. |
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