[M] [Critique] Zeder

[flint]

Zeder (les voix de l'au-delà)

Année : 1983

Genre : Horreur

Origine : Italie

Réalisateur : Pupi Avati

Casting : Gabriele Lavia, Anne Canovas, Paola Tanziani, Cesare Barbetti...



Le film débute à Chartres, en 1956. Suite à des morts étranges aux alentours d'une propriété abandonnée, une unité spéciale de policiers intervient, accompagnée d'un médecin, d'une infirmière et d'une jeune fille, Gabriella, qui possède des pouvoirs extra-sensoriels. La nuit, des phénomènes paranormaux se produisent dans la demeure. Gabriella parvient à localiser la source du mal. Laissée seule quelques instants, elle est mordue par une entité maléfique avant le retour des policiers.
Un trou est creusé à l'endroit mentionné par Gabriella. Un cercueil est découvert, contenant quelques ossements, et un portefeuille dans lequel une carte d'identité permet d'identifier le cadavre comme étant un certain Paolo Zeder.



Bologne, 1983. Un étudiant, écrivain à ses heures, Stefano, se voit offrir une machine à écrire par sa femme, Alessandra, le jour de son anniversaire.
Dans la nuit, tandis qu'il recherche l'inspiration et écrit quelques lignes, le ruban de la machine casse. Tandis qu'il le déroule afin de réparer la machine, Stefano déchiffre quelques bribes de phrases pour le moins curieuses sur le ruban. Il est question notamment de barrières de la mort devant tomber, d'un retour à la vie qui indiquera le retour de tous, et l'existence d'un terrain K, libre et insoupçonnable, un lieu idéal pour des expériences...

Cela ne manque pas d'attiser sa curiosité. Le lendemain, il se rend chez un ancien professeur d'université, expert en ésotérisme et occultisme. Le professeur lui explique que ces terrains K ont été découverts par un certain Paolo Zeder, disparu. Il soutenait que dans tous les endroits de l'Antiquité où des contacts avec l'au-delà, avec les morts, avaient eu lieu (Delphes, par exemple), la composition du sol présentait des caractéristiques constantes définies comme alchimiques. Ces lieux avaient la particularité, selon lui, de défier toutes les lois de la nature, d'être hors du temps, des saisons, hors de la mort : le temps zéro, qui permettrait de revenir de l'au-delà !

Dès lors, Stefano ne va avoir qu'une idée en tête : retrouver la trace de Paolo Zeder, et les fameux terrains K. Ses investigations vont le conduire en différents lieux, où les surprises et les dangers vont aller crescendo. Jusqu'à la révélation finale...



Zeder a été réalisé par Pupi Avati (Giuseppe de son vrai prénom), sept ans après un autre chef d'oeuvre du macabre tout aussi original : La Maison aux Fenêtres qui rient. Pourtant, l'homme n'est pas à proprement parler un metteur en scène spécialiste de l'horreur, même s'il a commencé sa carrière de réalisateur avec un film gothique (Balsamus, l'homme de Satan, en 1968). Ses inspirateurs ont pour nom Fellini ou De Sica, et on le connaît plus aujourd'hui pour ses comédies populaires. Mais il a aussi collaboré à l'écriture de Salo ou les 120 journées de Sodome, de Pasolini ; il est aussi le scénariste et producteur du Macabro de Lamberto Bava.
Aux côtés d'Anne Canovas, actrice française, dans le rôle d'Alessandra (dont le personnage, plutôt léger, sert à contrebalancer la tension qui règne dans le film), on retrouve Gabriele Lavia (Stefano), qui a notamment joué dans trois films de Dario Argento : Les Frissons de l'Angoisse, Inferno et Le Sang des Innocents.



Il règne dans Zeder une ambiance digne d'une nouvelle de Lovecraft, une atmosphère moite, pesante. L'indicible, souvent invisible, est cependant palpable. Le film parle de zombies tout en détournant les codes du genre. Pas de gore, ici, mais un climat oppressant, étouffant. On suit les investigations du héros et l'on partage sa peur, car le réalisme de l'action facilite la croyance en ce que cinéaste nous montre. Il est question de société secrète, de scientifiques, de prêtres catholiques au comportement étrange. La mayonnaise prend, et l'intrigue est parfaitement maîtrisée d'un bout à l'autre du film, avec des temps forts au début (toutes les scènes se déroulant en 1956) et à la fin (la dernière demi-heure). Le film déroutera les amateurs de gore, dans Zeder l'ambiance privilégie les effets spéciaux. Mais le talent d'Avati est indéniable, et bien des réalisateurs d'aujourd'hui devraient prendre des leçons.



Zeder a connu une diffusion vidéo en France grâce à l'éditeur Carrère, au milieu des années 80. En DVD, on pouvait notamment le trouver en import chez 20th Century Fox, dans une copie restaurée, en anglais ou en italien, avec des sous-titres en anglais, ou en italien, également. Mais à présent, l'édition française de The Ecstasy of Films surpasse largement les autres, avec qui plus est un master restauré.
Zeder est donc un film hautement recommandable. Sans verser dans le sensationnel, il n'est pas avare de sensations fortes, et comporte des scènes inoubliables. Il est de plus accompagné d'une partition musicale excellente de Riz Ortolani.

[Throma]

Une belle entrée en la matière pour un film qui le mérite.
Une des dernières grandes réussites du cinéma d'horreur italien, si l'on écarte Bloody Bird et Dellamorte Dellamore et que je préfère même à "La maison aux fenêtres qui rient". Avati ne cède pas à la mode du gore, monnaie courante au debut des années 80, c'est tout à son honneur et préfère se concentrer sur l'histoire. Une histoire originale et captivante...jusqu'à cette fin effrayante dans ce bâtiment moderne sinistre, qui tranche totalement avec la tranquilité de la campagne environnante.
Et preuve indéniable, encore une fois, de l'efficacité du recours à la suggestion.
Rien n'est montré de façon distincte, l'indicible n'est jamais clairement dévoilé, l'imagination fait le reste.
Et la musique glauque d'Ortolani, que tu as cité.
Vraiment dommage qu'Avati n'aie pas davantage donné dans le fantastique, lui qui a su en apporter de nouvelles perspectives à 2 reprises.
_________________
http://www.vhs-survivors.com/myvhs.php?alias=Throma

[mallox]

Oui, et l'homme avati en vaut deux.

Bon, au risque de ne pas être très original: Bravo, on est bien content (je pense que personne ne me contredira) de tomber sur quelqu'un qui est dans le sujet du site sans cesse, semble sympa comme tout, et nous pond une critique sympatoche sur un très bon Avatar d'Avati (là, c'est puéril je sais ) au bout de 20 messages.... On se battra peut-être ensuite, mais pour le moment: :ok: (et ma pudeur m'interdit en général de cirer les pompes).

quel gitan ce Ortolani quand même... n'a pas toujours forcé son talent...

Au fait: Bonjour.
_________________

[flint]

Bonjour, et merci pour les compliments. Mais c'est un plaisir de parler de metteurs en scène méconnus, et qui ont pourtant fait honneur à un genre de cinéma que nous adorons. Je pense qu'une chronique sur "La Maison aux Fenêtres qui rient" s'imposera d'ici peu. Là aussi, comme le soulignait Throma, la paisible campagne italienne (la plaine du Po dans ce film) devient à la nuit tombée le cadre d'événements particulièrement terrifiants.
Curieusement, lorsque je pense à Avati, je pense aussi à Crispino, bien que leur travail n'ait rien en commun. Mais, comme Avati, Armando Crispino s'est consacré au cinéma populaire, tout en réalisant lui aussi deux films sortant des sentiers battus : Overtime, et Frissons d'Horreur (pas terrible, ces titres français, tout de même). Je pense qu'il serait intéressant de dépoussiérer ces deux films, et je veux bien m'en charger, si personne ne l'a déjà fait.

[mallox]

Pour ma part, c'est plus que OK.
La Maison aux Fenêtres qui rient est un film qui m'avait déçu lorsque je l'ai découvert et puis et puis ...
Quand à Macchie solari de Crispino, Super, je ne sait pas ce qu'il vaut (et d'autres ici comme Xawa et throma sont bien plus éclairés que le gros mallox à ce sujet), je l'ai sous le coude, mais tarde à le voir...

En passant, et puisqu'il est quand même pas mal question de Giallo, que valent des films comme: Delirium de Polselli ou Cran d'arrêt de Tessari ?
Je me réserve juste "Torso" (si vous le voulez bien il va de soi) car j'ai un contentieux (dû à mon immense ignorance il est vrai) à réparer avec Martino, euh Thromano pardon
_________________

[flint]

Je n'ai pas vu Cran d'Arrêt, de Tessari. J'ignore donc ce qu'il vaut. Au-delà du Désir (Delirium) est un film étrange, malsain, complètement barré, comme bon nombre de films de Renato Polselli. Difficile pourtant de l'assimiler à un giallo, malgré qu'il possède bon nombre des codes du genre. Mais on sait du début qui est l'assassin, l'intérêt de Polselli étant de s'attarder sur les thèmes de la folie et de la sexualité.
Plus conformes au giallo : Scream and Die de Jose Ramon Larraz, Terreur Aveugle de Juan Antonio Bardem, L'Oeil du Labyrinthe de Mario Caiano ou The Killer must kill again de Luigi Cozzi méritent le détour (et une critique).
Enfin, j'adore Torso, avec cette scène de poursuite dans la forêt au milieu de la brume, cette villa isolée en haut d'une falaise... Une réussite totale de Sergio Martino. On attend donc ta critique.

[mallox]

[Throma]

Cran d'arret est etonnamment mauvais (avis personnel) venant de la part du pourtant doué Duccio Tessari.
Intrigue bateau, meurtres hors-champ (bon, parait que la version française est mutilée aussi) et une réalisation assez à chier, façon téléfilm.
Y'a des moments, on se croirait dans "Cas de divorce", surtout que le film incorpore pas mal de séquences dans un tribunal (Pat Le Guen aurait-il vu ce film ?)
Delirio caldo, flint en parle mieux que moi. Pour ma part, j'ai pas trop accroché mais là c'est le contraire, la cassette francaise parue chez Gilda serait plus complète que la version proposée par le dvd Z1 (celle que j'ai vu).
En tout cas, c'est un film atypique ça c'est certain avec la gueule cassée de Mickey Hargitay (mort récemment, RIP Mickey et Pluto 2 fois qu'une) qui revient du Viet-Nam pour fouetter sa Rita Calderoni de moeuf.
(d'ailleurs, m'sieur flint, si vous voulez vous charger d'une review, en plus des autres )
_________________
http://www.vhs-survivors.com/myvhs.php?alias=Throma

[flint]

Aucun problème, Throma, pour faire une critique d'Au-delà du désir, basée sur la version française parue autrefois chez Gilda. Par contre, je n'aurai pas de visuel à incorporer, n'ayant pas la jaquette. Je compte donc sur vous. Si tu as eu le DVD import entre les mains, il me semble qu'il y avait deux versions sur celui-ci. Mais apparemment, la version française comporte quelques scènes supplémentaires par rapport à la version la plus longue du DVD. En tous cas, point de flashback sur la guerre du Vietnam dans la VF.

[Camif]

Sans avoir recours au gore, Le poupon Puppi livre un très bon film à l'ambiance proche de Lovecraft ( surtout dans ses dernières 20 minutes ).
Etonnat qu'un tel film ne sorte pas en dvd de par chez nous ( ou alors ne l'est-ce point ? En fait il oit être trop bien ) .
Etonnant aussi combien la fin ressemble à celle du "Simetierre" de King ( qui n'est pas seulement un romancier de Prisunic comme je l'ai lu de la part d'un forumeur celèbre et bien connu par ici. ).

Et puis, je viens encore de tomber amoureux. C'est embêtant tous ces films italiens avec de ravissantes donzelles, je tombe amoureux tout le temps moi. :timide:
_________________
"Du 2 au 22 mai, y avait pas loin" Mallox

[flint]

Fiche dvd -



Zeder – The Ecstasy of Films

Région : Zone 2 PAL (dvd) – Zone B (blu-ray)
Éditeur : The Ecstasy of Films

Pays : France
Sortie film : inédit en France (sorti en vidéo)
Sortie dvd/blu-ray : 18 mars 2017



Durée : 96' (dvd) – 100' (blu-ray)
Image : 1.85:1 – 16/9e compatible 4/3 (Combo blu-ray/dvd 1080p master haute définition)
Audio : français et italien DTS-HD (blu-ray) – français et italien mono (dvd)

Langues : français, italien
Sous-titres : français (optionnels)



Bonus :

- Le Facteur K : Entretien avec Pupi et Antonio Avati (31'17, VOSTF)

- Diabolus in Musica : Entretien avec Riz Ortolani (23'29, VOSTF)

- Bande-annonce originale (3'05)

- Galerie de photos (3'05)

- Comparatif du film avant et après restauration (3'20)

- Catalogue de l'éditeur (6'08)

- Livret 20 pages « De A(Vati) à Z(eder) » par Frank Lafond



Commentaire : Voilà enfin l'édition tant attendue de cet autre chef-d’œuvre de Pupi Avati. Il aura fallu patienter un moment, mais cela en valait la peine, et c'est en France que sort ce magnifique combo proposant Zeder dans une version restaurée de toute beauté.

Revenons en arrière. Réalisé en 1983, Zeder ne sera pas exploité au cinéma en France, mais sortira quelques années plus tard en vidéo chez Discovery, filiale de Carrère. A l'arrivée du support dvd, les premiers à dégainer vont être les Américains d'Image Entertainment, qui commercialisent le film dans sa fameuse « Euroshock Collection », mais au format 1.33:1 et uniquement avec le doublage anglais. Il faut attendre 2002 et l'édition italienne chez 20th Century Fox pour bénéficier du bon format et voir le film dans sa version originale. Des sous-titres anglais sont également disponibles dans cette édition, de même qu'un bonus d'une quinzaine de minutes (I percorsi della paura) dans lequel Pupi et Antonio Avati, Gabriele Lavia et Riz Ortolani reviennent sur Zeder (ce bonus est en italien sans sous-titres). Puis, ce sera au tour de l'Allemagne à s'intéresser au film d'Avati, en plusieurs occasions. D'abord en 2012 (CMV Laservision), ensuite en 2014 (Edel GmbH) et enfin en 2016 avec '84 Entertainment pour une édition limitée Hartbox à 99 exemplaires.



Autant dire que l'édition de The Ecstasy of Films bouleverse totalement la donne, pour au moins trois raisons : le passage au HD se concrétisant par une sortie blu-ray, des bonus produits par l'éditeur français en collaboration avec les Italiens de Nocturno/Cinema Bis Communication et, le plus important, un master restauré.
Christophe Cosyns, responsable de T.E.O.F., s'est personnellement occupé de l'étalonnage de restauration à Paris. Un laboratoire italien s'est chargé pour sa part du transfert numérique du négatif original du film.

Le résultat est sans appel, preuve en est le module comparant l'image avant et après la restauration. Vous trouverez aussi à la fin de cette fiche dvd un comparatif entre l'édition italienne de la Century Fox et celle de The Ecstasy of Films (basée sur le dvd) en cinq captures d'écran.
Puisque l'on évoque les bonus, on s'attardera sur ceux concernant les frères Avati et le compositeur Riz Ortolani.



Dans le premier (Le Facteur K), Pupi Avati précise qu'il fut à une époque passionné d'ésotérisme, notamment par les écrits de Fulcanelli, axés sur l'alchimie et le mystère des cathédrales. Avati évoque quelques anecdotes, comme les indices sur la machine à écrire en rapport avec un fait divers, et le fameux bâtiment, cette ancienne colonie de vacances qui servit de cadre dans la seconde partie du film. Antonio Avati explique quant à lui la manière dont le film a pu être financé, s'attardant sur la personnalité extravagante de l'acteur Bob Tonelli, qui joua dans neuf longs métrages d'Avati, et finança même « Balsamus, l'homme de Satan » à condition qu'il ait le premier rôle. Antonio Avati reconnaît que « Zeder » eut moins de succès que « La maison aux fenêtre qui rient ». Il précise que le film fut tourné en anglais puis doublé en italien, et que le duo Gabriele Lavia/Anne Canovas avait donné entière satisfaction.



Dans l'autre bonus principal (Diabolus in musica), nous retrouvons Riz Ortolani (décédé en 2014), compositeur prolifique qui œuvra en plusieurs occasions pour les frères Avati. Il cite quelques unes de ces collaborations, étayées par des souvenirs comme sa rencontre avec Fred Astaire.

Enfin, n'oublions pas le livret qui accompagne le film, un autre supplément de choix qui, sur vingt pages, nous permet d'avoir une analyse pertinente de Frank Lafond, le tout illustré de photos couleurs. Frank Lafond a rédigé une bonne demi-douzaine d'ouvrages sur le cinéma, parmi lesquels le Dictionnaire du fantastique et de science-fiction, Joe Dante : L'art du je(u), Jacques Tourneur – les figures de la peur ainsi que Cauchemars Italiens (deux volumes, l'un dédié à l'horreur, l'autre au fantastique). Dans ce livret, il explique pourquoi Pupi Avati fut le trait d'union entre deux cinémas (d'auteur et de genre), détaille sa carrière de réalisateur et scénariste, et démontre en quoi Zeder se démarque des autres films de morts-vivants. Il s'attarde aussi sur l'importance des cadres choisis et de la ruralité, la place occupée par la religion et pourquoi, au final, Zeder est une œuvre singulière.

Sans aucun doute, Zeder méritait une très belle édition. C'est désormais chose faite grâce au travail de longue haleine effectué par The Ecstasy of Films, et on peut désormais rêver à un traitement similaire pour La maison aux fenêtres qui rient. Dans un proche avenir… si possible !

Note : 9,5/10



Comparatif entre le dvd italien 20th Century Fox et le dvd The Ecstasy of Films :


Century Fox


Ecstasy of Films


Century Fox


Ecstasy of Films


Century Fox


Ecstasy of Films


Century Fox


Ecstasy of Films


Century Fox


Ecstasy of Films

[Valor]

Et les captures de la VHS alors ?

En tout cas, superbe boulot, flint ! Juste une question : pourquoi 9,5 et pas 10 ?

[Throma]

Super papier... et bienvenue, Flint
_________________
http://www.vhs-survivors.com/myvhs.php?alias=Throma

[flint]

[flint]