[M] [Critique] Paranoïaque

 
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The Hard
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MessagePosté le: Lun Avr 05, 2010 2:12 pm    Sujet du message: [M] [Critique] Paranoïaque Répondre en citant



Paranoïaque ! (1963)

Origine : Angleterre
Genre : Thriller/Drame

Réalisé par Freddie Francis
Avec Janette Scott, Oliver Reed, Sheila Burrell, Maurice Denham, Alexander Davion, Liliane Brousse, Harold Lang, Arnold Diamond, John Bonney...

La famille Ashby est affectée par deux drames : la mort du père et de la mère, il y a onze ans, dans un accident d'avion, et celle de leur fils, il y a huit ans, suicidé à cause d'un mal de vivre qu'il trainait depuis leur disparition. Les autres enfants, Simon et Eleanore, furent placés sous la coupe de leur tante et, tous les ans, en commémoration de ce tragique événement, a lieu une messe. C'est au cours de celle-ci qu'Eleanore aperçoit un homme ressemblant à son frère décédé, Anthony. Taxée de folle, et Simon (alcoolique notoire) ne lui accordant aucune attention, négociant déjà l'héritage qu'il touchera dans trois semaines, la progéniture Ashby va mal. Plus tard, dans la journée, Eleanore ré-apercevra Anthony. Comble de tout, c'est lui.



Freddie Francis, qui avait reçu l'oscar de la photographie pour "Amants et Fils" de Jack Cardiff en 1961, est venu à la réalisation avec le film de genre. "Paranoïaque" compte parmi ses premières œuvres, et c'est en 1975, après avoir réalisé des films tel que "L'empreinte de Frankenstein" (1964) ou "Dracula et les femmes" (1968), qu'il délaisse la caméra pour la photographie. Notamment afin de travailler sur "Elephant Man" et "Dune" de David Lynch. Au cours de sa carrière, Freddie Francis aura dirigé les plus grands : de Christopher Lee à Peter Cushing, et même Jack Palance. Ce fut un bel artisan de la Hammer et de l’Amicus, et il laissa son empreinte, en 1996, dans la série des "Contes de la Crypte", en réalisant le deuxième épisode de la saison 7.

Ce “Paranoïaque” est un thriller horrifique plutôt captivant, dans lequel la mise en scène se révèle limpide et sans accrocs. Le noir et blanc net et affirmé de la photographie participe à la création d'une atmosphère gothique tendue et psychotique. L'efficacité, la rigueur et le style quasi perfectionniste de l'ensemble semblent donc être le reflet psychologique du personnage campé par Oliver Reed : Simon Ashby. Pas impressionniste, cette petite production de la firme britannique Hammer remplit, quoiqu'il en soit, son contrat. Toutefois, le principal reproche revient à son scénario : subtil et concis dans la première demi-heure, celui-ci s'emmêle les pinceaux sur la fin du métrage avec une surcharge scénaristique pas inintéressante, mais "de trop".



En effet, à l'opposé d'une œuvre à dominante psycho-freudienne, "Paranoïaque" évoque le thème de la "folie meurtrière", en sacrifiant une symbolique sous-jacente au profit d'un film sec et direct. Pourtant, tout s'annonçait efficace et dense. On pense à la présentation des protagonistes : par le biais d'un long travelling, la caméra scrute l'église et fait entrer dans le cadre le visage des personnages dont le curé cite le nom au fur et à mesure de son discours. Oliver Reed, face à un orgue, expire la fumée de son clop' sur la partition qu'il s'apprête à jouer. Tout est bon à prendre et rien ne passe à la trappe. Cette adroite narration filmique, à la fin de l'heure et quart, pâtira alors de l'absence de profondeur dramatique, ou du "survol" d'idées qui sonnent comme "rajoutées". On pense ici au personnage de la tante, enrôlée dans la machination de Simon Ashby, et sur lequel on passe trop vite.

Néanmoins, "Paranoïaque" ne perd pas de son efficacité première. Plusieurs séquences issues de la folie d'Oliver Reed illustrent au mieux ce côté "sec" : hors de lui, Simon Ashby ouvre la porte de sa chambre puis s'en va, laissant sa tante face au fait : l'infirmière n'est pas là pour rien. Dans le même élan sadique, il y a cette scène où une voiture, avec Eleanore Asbhy à son bord, menace de tomber d'une falaise, et le passage avec l'apparition d'un personnage masqué muni d'un crochet de pirate en guise d'arme. Ainsi, là où Freddie Francis aurait pu éclaircir et forcer une symbolique avenante (sans pour autant alourdir le film), il a opté pour un côté plus "tape à l'oeil".



En dépit de cela, le jeu des acteurs demeure excellent. Oliver Reed ("La nuit du loup-garou" -1961 - de Terence Fisher, "Le fascinant capitaine Clegg" -1962 - de Peter Graham Scott ou encore "Les diables" -1970 - de Ken Russell), exquis dans ce qui s'impose comme l'un de ses premiers rôles majeurs, semble en un seul geste pouvoir détruire les faibles liens familiaux subsistants, ou en faire éclater toute l'hypocrisie. Il sera à l'origine des scènes les plus horrifiques, toutes très réussies, en particulier celle où il joue de l'orgue, accompagné au chant par un personnage vêtu d'une robe d'enfant de chœur et masqué. Là, Eleanore et le faux Anthony Ashby l'espionnent, par une fenêtre poussiéreuse. Angoissante à souhait, cette séquence distille un climat oppressant, voyeuriste et réellement paranoïaque, dont le spectateur se souviendra longtemps.

On notera aussi une excellente idée scénaristique (à sa source, Jimmy Sangster, scénariste aussi sur le chef d'œuvre "Le cauchemar de Dracula"), tel que ce rapport incestueux naissant entre Eleanor Ashby et celui qu'elle croit être son frère. En 1963, le baiser dans son "cadre" était vraiment osé. Il n'en donne pas moins lieu à une surprenante scène de colère où Janette Scott montre l'étendue de son talent, hurlant qu'elle est folle, et enclenchant la rupture du jeu de l'imposteur avec celui pour lequel il se fait passer.



"Paranoïaque" est un sacré bon morceau de cinéma, de ceux que l'on a tendance à éclipser à côté des films plus populaires de la Hammer. Portée par Oliver Reed, c'est une pellicule qui annonce “Nightmare”, l'une des futures pièces maîtresses de la filmographie de Freddie Francis, qui reprendra alors le thème du microcosme familial pour cause d'un trauma, ainsi que ceux de la paranoïa et du cauchemar. On notera aussi l'ambition avouée de Freddie Francis de concurrencer le récent "Psychose" d'Alfred Hitchcock, convoitise intéressante mais dont il s'est éloigné, comme dit plus haut, en compliquant les lignes scénaristiques inutilement. À voir quoiqu'il en soit !


Dernière édition par The Hard le Lun Avr 05, 2010 6:54 pm; édité 3 fois
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flint
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MessagePosté le: Lun Avr 05, 2010 3:40 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Critique fort sympa pour un film que j'aurais dû voir depuis un moment (ayant le coffret "The Hammer Horror Series"), sauf que, suite à un défaut du disque, je n'ai jamais été en mesure de le visionner ! frank_PDT_01

Par contre, il me semble que ce "Paranoiac" est un thriller, et non un film d'horreur, non ?

Sinon, la Hammer a réalisé d'excellents thrillers à la Hitchcock. Je pense notamment à "Nightmare/Meurtre par procuration" et "Hurler de peur".

J'attends donc avec impatience que Mallox m'offre le coffret "Icons of Suspense" ! frank_PDT_10
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Camif
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MessagePosté le: Lun Avr 05, 2010 5:52 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Oui c'est un thriller qui lorgne du côté des diaboliques de Clouzot et de Hitchcock.
Outre le Nightmare cité par flint, il y a aussi dans le même genre Hystéria également de Freddie Francis et Fanatic de Narizzano ( connu aussi sous le nom de Die! Die! My Darling! ).
De fort belle réussite du genre.

Les films sont dispos sur 36.15 Camif évidemment
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MessagePosté le: Mar Avr 06, 2010 10:49 am    Sujet du message: Re: Oliver ride Répondre en citant

The Hard a écrit:
Il sera à l'origine des scènes les plus horrifiques, toutes très réussies, en particulier celle ou il joue de l'orgue, accompagné au chant par un personnage vétu d'une robe d'enfant de coeur et masqué. Là, Eleanore et le faux Anthony Ashby l'espionnent, par une fenêtre poussièreuse. Angoissante à souhait, cette séquence distille un climat opressant, voyeuriste et réellement paranoïaque dont le spectateur se souviendra longtemps.


J'ai donc vu, pour le coup, le film hier soir, et je suis entièrement d'accord avec ce passage, qui selon moi est la meilleure scène du film. peut-être justement parce qu'elle demeure mystérieuse et que personne ne parle à ce moment là, la musique jouée contrastant ou soulignant (selon), l'atmosphère trouble qui règne alors.
Pour le reste, je dirai que c'est bien emballé, plutôt pas mal écrit, mais que d'une part, on reste en terrain balisé, et surtout que le film semble hésiter entre expressionnisme visuel accompagnant quelques psychés tourmentées, et le spectacle plus solide au niveau scénario, mais aussi plus théâtral. Du coup, c'est plaisant, même si on a le sentiment d'osciller entre deux spectacles aux tendances parfois sensiblement différentes.
Je suis resté légèrement perplexe devant la prestation de Reed, qui semble un peu empesée, pas encore dégagée de certains tics et fait un peu penser à quelques jeux fiévreux d'autres acteurs de la même époque (ou presque), à base de cours chez Actors Studio et Cie.
M'enfin, c'est pas mal hein !
Flint devrait se le racheter.
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The Hard
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MessagePosté le: Mar Avr 06, 2010 11:49 am    Sujet du message: Re: Oliver ride Répondre en citant

mallox a écrit:

[...]Pour le reste, je dirai que c'est bien emballé, plutôt pas mal écrit, mais que d'une part, on reste en terrain balisé, et surtout que le film semble hésiter entre expressionnisme visuel accompagnant quelques psychés tourmentées, et le spectacle plus solide au niveau scénario, mais aussi plus théâtral. Du coup, c'est plaisant, même si on a le sentiment d'osciller entre deux spectacles aux tendances parfois sensiblement différentes.
Je suis resté légèrement perplexe devant la prestation de Reed, qui semble un peu empesée, pas encore dégagée de certains tics et fait un peu penser à quelques jeux fiévreux d'autres acteurs de la même époque (ou presque), à base de cours chez Actors Studio et Cie.
M'enfin, c'est pas mal hein ! [...]


Oui, le film n'est pas dépourvu de quelques stéréotypes (pas désagréables ma foi) et demeure le cul entre deux chaises. Pour ma part, je met ça sur le dos de Sangster qui a sur-sur-surligné tout un tas de points scénaristiques sans qu'ils soient exploités par la suite. Du coup, on reste un tout petit peu sur notre faim puisqu'il propose de nouvelles idées, passe (au) dessus, et hop, c'est déjà la fin.
Sinon j'ai beaucoup aimé Oliver Reed, ainsi que sa maitresse, une vraie salope pourtant, de Lilianne Brousse (j'ai vu qu'elle avait réalisé une courte carrière, dommage, je l'aurai bien vu dans un film de nazisploitation). Le seul défaut que je lui reprocherais serait d'être tendu et trop "prêt à", on sent qu'il sait qu'il va devoir s'énerver à la fin de la scène et du coup, il n'y a pas assez de cassures subites. M'enfin pour le coup, à la limite, ça correspond bien à son personnage fou fou fou sans trop de finesse.
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flint
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MessagePosté le: Mer Déc 25, 2013 9:04 am    Sujet du message: Re: Oliver ride Répondre en citant

mallox a écrit:

Flint devrait se le racheter.


C'est fait ! (suffit d'être patient)


C'est donc une fois encore un très bon thriller signé par la Hammer, dans lequel on retrouve le thème du héros se faisant passer pour quelqu'un d'autre (comme dans "Hurler de peur"), mais dans une optique différente.

Le thème délicat de l'inceste évoqué par The Hard dans sa chronique peut être même vu sur deux plans puisque, outre l'amour naissant entre Eleonore et Tony, on peut également envisager une passion amoureuse de la Tante pour son neveu Simon (notamment au détour d'une scène).

A titre indicatif, le dvd de chez Universal présente un très beau master, au format respecté, avec VF et VOSTF.
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