flint Super héros Toxic


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Posté le: Dim Jan 15, 2012 9:05 pm Sujet du message: [M] [Critique] Marée nocturne |
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Marée nocturne
Titre original : Night Tide
Genre : Drame, Fantastique
Année : 1961
Pays d’origine : Etats-Unis
Réalisateur : Curtis Harrington
Casting : Denis Hopper, Linda Lawson, Gavin Muir, Luana Anders, Marjorie Eaton, Tom Dillon…
Johnny Drake, marin d’une vingtaine d’années, profite d’une permission pour aller flâner le long des plages de Venice. Doté d’un splendide front de mer, ce quartier de Los Angeles, situé à proximité de Santa Monica, est un coin prisé des touristes. Errant seul le long des arcades, Johnny échoue dans un pub où un orchestre de jazz s’évertue à chauffer la salle. Les yeux du marin croisent ceux d’une jolie brune qui paraît seule, également. Il l’aborde timidement, les premiers échanges sont plutôt secs, mais peu à peu la fille, Mora, se radoucit. Jusqu’au moment où une femme d’un certain âge fasse irruption et se mette à parler à Mora dans une langue inconnue. Apeurée, Mora s’enfuit. Le marin part à sa recherche, la retrouvant finalement près de son domicile, un appartement situé au-dessus d’un manège de chevaux de bois. Elle lui donne rendez-vous le lendemain matin pour le petit-déjeuner.
Ainsi commence pour Johnny une aventure qui va bouleverser sa vie. Mora travaille comme attraction dans une fête foraine. Avec la complicité de son employeur, le capitaine Samuel Murdock, elle se fait passer pour une sirène, évoluant dans un aquarium truqué laissant croire qu’elle est réellement dans l’eau. Seulement voilà, à écouter Murdock, et selon le propre aveu de Mora, celle-ci serait vraiment une sirène, une créature surnaturelle responsable de la mort par noyade de deux hommes ces derniers mois, tous deux d'anciennes liaisons de la jeune femme. Mais Johnny, malgré toute son innocence, refuse de croire à ces légendes, et il est hors-de-question de quitter Mora, dont il est tombé éperdument amoureux.
Et puis après, quoi de plus naturel pour un marin de répondre à l’appel d’une sirène… au mépris du danger.
Inutile de revenir sur le parcours de Curtis Harrington, qui fut déjà évoqué à l’occasion de l’un de ses films, « Killing Kind ». Précisons simplement que le réalisateur fit ses premiers pas dans le 7ème Art par le biais d’un court métrage qui s’appelait « The Fall of the House of Usher », en 1942. L’attirance du cinéaste pour Edgar Allan Poe va ressurgir pour son premier long métrage, « Night Tide », dont il écrit également le scénario, inspiré par les écrits du poète.
Ainsi, tandis que la marée s’avance dans la nuit, je reste étendu près de ma chérie, mon amour et ma vie, dans son sépulcre au bord de l’océan, dans sa tombe près des flots rugissants.
Ces mots d’Edgar Allan Poe accompagnent le générique de fin de « Marée nocturne », confortant la sourde mélancolie d’une œuvre dont la poésie quasi-hypnotique compense l’absence totale de rythme. Curtis Harrington, pour son premier film, privilégie l’atmosphère au spectaculaire. Il s’en dégage une profonde tristesse, la marée rejetant des vagues à l’âme tout au long d’un récit axé sur le parcours initiatique d’un jeune marin, Candide des temps modernes, orphelin dans tous les sens du terme. Privé de ses parents, de sa terre natale, d’éducation, Johnny incarne l’innocence, la naïveté, la bonté. Il pense découvrir le véritable amour en la personne de Mora, et celle-ci sera finalement attirée à son tour par la candeur du jeune homme, sa pureté symbolisée par la blancheur de son uniforme.
Autant le dire de suite, ceux qui connaissent le Dennis Hopper post « Easy Rider » auront du mal à croire qu’il s’agit bien du même acteur. Il est ici incroyablement sobre, peu disert, son jeu s’exprimant avant tout dans les gestes et le regard. Il se montre tour à tour attachant, fragile et vulnérable, à mille lieues des rôles qui le rendront célèbres par la suite. Bien qu’ayant débuté dans les années 50 à la télévision, dans quelques séries, Hopper aura la chance de figurer rapidement (entre 1955 et 1957) dans trois films légendaires : « La fureur de vivre », « Géant » et « Règlement de comptes à OK Corral ».
Curtis Harrington lui offre donc un premier rôle avec « Marée nocturne ». Il y côtoie la belle Linda Lawson, incarnant Mora, qu’on verra surtout dans des séries télé ; et aussi Luana Anders (« La chambre des tortures », « Dementia 13 »), qu’il retrouvera par la suite dans « The Trip » et « Easy Rider ».
« Night Tide » est un film dont l’action se calque sur les motivations et les rencontres de son personnage principal, présent dans chacune des scènes du long métrage. Subissant les événements, personnage introverti, le héros est réduit à un rôle de fil conducteur, simple témoin de la trame d'une histoire se tissant peu à peu, à ses dépends. Faux film fantastique (l’œuvre ne bascule vraiment dans le genre que durant certains passages oniriques, concrétisés par les cauchemars de Johnny), « Marée nocturne » s’apparente plus à un drame, ce que le dénouement final a tendance à confirmer, même si l’identité exacte de l’un des protagonistes reste non résolue. Cette petite aura de mystère est finalement la bienvenue, car le réalisateur laisse ainsi une porte ouverte à l’inconnu. Toutefois, le ton du film baigne indéniablement dans le surnaturel, et le style de Harrington, dans ce premier long métrage, pourra rappeler par certains moments des œuvres comme « La Féline » de Jacques Tourneur. Cela dit, le côté « figé » de « Night Tide » risque d’en rebuter plus d’un, pour peu que l’on ne soit pas réceptif à l’atmosphère poétique du film.
Ce serait pourtant passer à côté d’une histoire envoutante, servie par des personnages attachants, une œuvre séduisante… à l’image des sirènes.
Fiche dvd -
Marée nocturne – Wild Side Vidéo
Collection Vintage Classics
Région : Zone 2 PAL
Editeur : Wild Side Vidéo
Pays : France
Sortie film : 6 juin 1963 aux Etats-Unis (inédit en France)
Sortie dvd : 25 janvier 2012
Durée : 85 mn
Image : 1.66 – 4/3
Audio : Mono
Langue : anglais
Sous-titres : français
Bonus : non
Commentaire : Sans être remarquable, le master proposé par Wild Side s’avère dans l’ensemble satisfaisant, avec un noir et blanc relativement performant dans les contrastes. La piste anglaise mono est parfaitement audible, n’oublions pas que le film accuse les cinquante ans. « Marée nocturne » est visible en France grâce au dvd pour la seconde fois, après sa sortie en mars 2011 chez un autre éditeur (Les films du paradoxe) . Le premier long métrage de Curtis Harrington était jusqu’à l'année dernière inédit sur quelque support que ce soit, et n’avait jamais connu de diffusion en salles (en France, toujours).
L’occasion de découvrir cette belle rareté pour un prix honnête (dix euros, soit deux fois moins que la précédente édition) compense, en la circonstance, le traitement dépouillé à l’extrême que l’éditeur a réservé à cette collection Vintage Classics : pas le moindre bonus, un menu on ne peut plus sobre et une jaquette ordinaire qui ne soutient pas la comparaison par rapport aux affiches d’exploitation originales.
Note : 6,5/10
Dernière édition par flint le Mer Jan 18, 2012 5:11 pm; édité 2 fois |
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