[M] [Critique] Les Amants d'Outre-Tombe

[Walter Paisley]

Gli Amenti d'Oltretomba. 1965.
Origine : Italie
Genre : Horreur
Réalisation : Mario Caiano
Avec : Barbara Steele, Rik Battaglia, Paul Muller, Helga Liné...

Si les films gothiques ont toujours eu une nette tendance aux histoires de famille, ces Amants d'Outre-Tombe ont quelque peu tendance à trop charger la mule. Alors accrochez vous, voici le résumé : Muriel (Barbara Steele), jeune femme riche et délurée, est l'épouse du Docteur Stephen Arrowsmith. Tous deux vivent dans un château avec leurs domestiques, dont la vieille et mystérieuse Solange. Mais madame n'est pas satisfaite : son mari est sans cesse en voyage, et c'est pourquoi elle s'est éprise d'un amant. Le docteur Stephen, se doutant de la chose, leur tend un piège avec l'aide de Solange, et les surprend en plein ébats dans la serre. Il les torture jusqu'à ce que mort s'ensuive, n'important que peu d'égards aux supplications de sa femme, qui jure qu'elle se vengera par delà la mort, et qui lui révèle en outre qu'elle l'a déshérité au profit de Jenny, sa soeur à elle (Barbara Steele encore, mais teinte en blonde), à la fragilité mentale avérée. Stephen contourne l'obstacle et épouse Jenny, tout en essayant de la pousser bel et bien vers la folie, histoire qu'il devienne enfin l'héritier. C'est pour plus de légitimité qu'il invite le médecin de Jenny à séjourner dans le château : le croyant facilement trompable, il pense qu'il sera ainsi davantage aisé de faire reconnaître la folie de sa nouvelle femme. Là-dessus, il y a aussi Solange, qui complote depuis le début avec Stephen, et pour cause : les travaux scientifiques du docteur lui permettent de retrouver la jeunesse, via de régulières injection de sang frais dans ses veines. Mais le fantôme de Muriel et de son amant commencent dès lors à se manifester, rendant périlleuse l'entreprise de Stephen tout en conduisant peu à peu Jenny à la folie, à grand renfort de possession bien sentie ou de manifestations surnaturelles tapageuse.

Voilà pour l'histoire. Dire qu'elle est relativement complexe relève de l'euphémisme, même si finalement Mario Caiano ne s'en sort pas trop mal, tout influencé qu'il est par Le Masque du Démon de Mario Bava et par La Maison du Diable de Robert Wise. Aux deux, il reprend l'emploi du noir et blanc. Au film de Robert Wise, il empreinte le côté psychologique, avec une héroïne sensible dont le gros point faible, c'est-à-dire sa personnalité complexée, sera le principal moteur des manifestations paranormales. Battements assourdissants au milieu de la nuit et irresistible envie d'aller dans les lieux les plus macabres du château, telles sont quelques un des éléments repris de La Maison du Diable. Au Masque du Démon, Caiano reprend bien entendu le côté sexy d'une Barbara Steele qui se promène souvent en déshabillé, et qui lorsqu'elle incarne Muriel tend à devenir une sorcière bien comme il faut, avec une large dose de perversité sexuelle, ici le sado-masochisme. Certaines scènes franchement sanglantes pour leur époque (les restes encore fumants d'un homme brûlé vif, un visage mutilé...) ne seront pas non plus sans évoquer le film de Mario Bava, et continueront ainsi à paver le chemin au cinéma d'horreur transalpin vers des années 70 qui seront riches en gore.

Bien entendu, si Caiano emprunte pas mal à ses modèles, il ne possède toutefois pas la maestria avec laquelle Robert Wise gérait ses espaces, ni le sens de l'esthétique que Mario Bava imposa à son film. Ou tout du moins il ne parvient pas à être aussi rigoureux sur toute la durée du film. De ce fait, Les Amants d'Outre-Tombe perd pas mal d'impact, d'autant plus qu'il a parfois une nette tendance à vouloir se démarquer par des scènes aux ficelles trop grossières. Ainsi, on aurait largement pu se passer des éclats de rire de sorcière qui retentissent (surtout quand ils viennent clôre une séquence à la Robert Wise), ou encore des coups tordus conçus par Stephen pour se débarasser de quelques personnages génants, que certains giallos bas de gamme auraient refusés (l'eau de la baignoire éléctrisée via un fil à travers le mur). De la même façon, tout ce qui concerne Solange est plutôt superflu, et on aurait volontiers aimé que le réalisateur fasse l'impasse sur cette sous-intrigue pour mieux se concentrer sur son personnage de Jenny et sur l'influence du fantôme de Muriel. Car en l'état, tout se retrouve concentré confusément, et avec ce trop-plein d'idées en tout genre on finit par saturer un peu vers la fin. Tout comme on finit par saturer des mélodies au piano conçue par Ennio Morricone.

Les Amants d'Outre-Tombe est un film qui pêche par excès de zèle : le mélange entre l'épouvante psychologique, l'horreur démonstrative, l'érotisme latent et la science maléfique se révèle assez hasardeux. Dommage, surtout que le film possède tout de même pas mal de qualités, avec en premier lieu une Barbara Steele que l'on préférera toutefois dans le rôle de Muriel, ou encore la cruauté et la perversion morale aussi bien que physique qu'il ne se gêne pas d'afficher dans des scènes plutôt réussies. C'est donc avant tout l'ambiance générale que l'on retiendra de ce film, bien plus que son histoire ou son propos qui paradoxallement affichaient plus d'ambitions que la moyenne des films gothiques.

5/10

Accroche : Gogoth à gogo

[flint]

Bon, je ne surprendrai personne en disant que j'aime ce film, étant fan du cinéma gothique en général, et de Barbara Steele en particulier. De ce fait, je serai plus indulgent que Walter, dont la critique est cela dit fort juste. On retrouve aussi dans ce film une actrice que j'ai toujours apprécié : Helga Line, qui jouait d'ailleurs un rôle assez similaire de servante pas très nette dans le "Demoniac" ("Blancheville Monster") de Alberto De Martino.
Pour l'anecdote, Mario Caiano signa le film du pseudonyme Allan Grünewald, le prénom en hommage à Poe, et le nom correspondant à un peintre allemand de la Renaissance que le cinéaste appréciait particulièrement.

[mallox]

J'osais pas le dire, mais j'ai un meilleur souvenir de ces "amants d'outre-tombe" que la critique très modérée de Walter. Comme je suis un vieux con, je n'ai que le souvenir de l'avoir aimé, avec quelques flashs de fulgurances graphiques assez belles. Un film que j'ai du reste gardé dans un coin, ce qui est bon signe.
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[Valor]

Pas trop d'accord avec toi Walter : c'est un de mes préférés de la série gothique de Barbara Steele !
Je le trouve très glauque, l'histoire est sordide et les scènes de sadisme sont étonnantes pour l'époque !

(Il n'est pas sorti en VHS en France, je crois...)

Barbarahhhhh !

http://img341.imageshack.us/img341/1720/bast004qf3.jpg

[Walter Paisley]

Et bien, je devais pas être dans un bon jour ! Et pourtant, je suis aussi amateur de ciné gothique. Mais ce sont les multiples tenants de l'histoire familiale qui m'ont découragé, sur ce coup.

[flint]

Etonnant quand même que le film ne soit jamais sorti en K7, en France. Ni en DVD (toujours chez nous). J'en profite pour dire que l'édition d'Artus pour "La Sorcière Sanglante" est très bien, de même que celle de Synapse pour "Danse Macabre".

[Valor]

[flint]

L'éditeur américain finalise pour 2009 un DVD flambant neuf du classique gothique de Mario Caiano (Gli amanti d'oltretomba).

Réalisé en 1965, le film n'avait jamais connu jusque là d'édition DVD digne de ce nom. En vidéo, il était même inédit en France. Severin annonce sur son site un nouveau transfert d'après le négatif original, mais aussi des interviews de Mario Caiano et Barbara Steele. Un véritable événement dans la mesure où l'actrice ne s'était pas épanchée sur sa carrière depuis de très longues années.

Maintenant, on croise les doigts pour que le film bénéficie de la version originale (sous-titrée anglais).

[mallox]

Ce film était bien passé sur Canal+ il y a une dizaine d'années, non ?
Je crois l'avoir encore dans mes VHS, et j'en ai un très bon souvenir. Meilleur que les Margheriti selon moi.

La News est en ligne.
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[flint]

[mallox]

Ok, j'en ai profité pour faire des captures pour la critique qui n'en avait pas.



Les amants d'outre-tombe - Artus Films


Région : Zone 2 PAL

Editeur : Artus Films
Pays : France

Sortie film : 18 mai 1966 (France)
Sortie dvd : 1er juin 2014

Durée : 100'
Image : 1.66 d'origine - 16/9 Anamorphique compatible 4/3
Audio : Dolby digital 2.0

Langues : français, italien
Sous-titres : français (optionnels)


Bonus :
- Livre 64 pages "20 ans de Cinéma Gothique Italien"
- "Le Noir, le Blanc, le Rouge". Entretien avec Mario Caiano (19')
- "Le Château du Cauchemar", par Alain Petit (38')
- Diaporama d'affiches et de photos
- Bandes-annonces de la collection Gothique




Commentaire : Cette édition des "Amants d'outre-tombe" bénéficie d'une superbe copie (meilleure que celle de l'éditeur Severin), fidèle qui plus est au format d'origine. Rien que pour cela, le dvd d'Artus se doit d'être acheté par tout amateur de gothique. C'est au niveau du son que l'on chipotera un poil en préférant la piste italienne, plus conforme au son d'époque, la piste française, à l'instar de celle de "La planète des vampires", sorti récemment, fut faite pour sa diffusion à la télévision en novembre 1993, ce pourquoi elle sonne quelque peu de façon anachronique (sans pour autant gâcher le film, précisons-le tout de même).




Dans "Le Noir, le Blanc, le Rouge", Mario Caiano rappelle qu'il était passionné à l'époque par les films d'horreur , notamment ceux de la Hammer ainsi que par Edgar Allan Poe. Très nostalgique, il revient aussi sur sa passion pour les romans fantastiques ou horrifiques tels que "Le monde, la chair et le diable" ou d'autres, plus naturalistes, comme "A rebours" de Huysmans". Il nous fait partager aussi sa passion pour la peinture puis refait, en une quinzaine de minutes, sa carrière, avec tout ce que cela comporte de rencontres. Paul Muller intervient en fin de document, par intermittences, pour dire notamment que le film fut mieux apprécié à l'étranger qu'en Italie. Selon lui encore, il était de bonne facture mais trop beau pour être apprécié à sa juste valeur. Un document qui offre un complément de choix.




"Le Château du Cauchemar" propose donc un entretien avec Alain Petit qui fait un panorama du cinéma gothique, mettant en avant ses outrances, son surréalisme et l'utilisation du noir et blanc rendant ces "Amants d'outre-tombe" spectral, tout le contraire d'un handicap, même si d'autres réalisateurs comme Mario Bava ou Riccardo Freda ont su selon lui transcender cela. Il revient entre autres choses sur la mauvaise qualité de la copie qui sortit dans les salles à l'époque : en effet, celle-ci manquait tant de contrastes que le travail d'Enzo Barboni fut très critiqué. C'est seulement aujourd'hui que l'on peut apprécier son travail à sa juste mesure, grâce au dvd, rendant à la bobine ses nuances d'origine, avant étalonnage d'époque, semble-t-il raté. On passe un bon moment même si Alain Petit, apparemment un peu blasé, n'est pas toujours l'intervenant le plus communicatif niveau enthousiasme.




Glissé dans un magnifique fourreau, en plus du très beau digipack contenant le disque, on trouve donc un chouette livre de 64 pages signé à nouveau Alain Petit et rempli d'iconographies. Soit, cela reste assez générique bien que chapitré avec pertinence, en plus de répéter parfois ce qu'il a dit ailleurs dans d'autres bonus de pellicules gothiques. Mais cela reste un beau rab, achevant de faire de cette édition un très bel objet.


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[flint]

Juste par curiosité, je voulais comparer le master d'Artus et celui de Severin :


Artus


Severin


Artus


Severin

A première vue, le master d'Artus me semble un peu meilleur.

Sinon, le dvd Severin proposait déjà un entretien avec Mario Caiano, par le biais de Federico Caddeo de Frak-O-Rama, et qui s'appelait "Black, White and Red" (réalisé en 2009), comme celui d'Artus. Mais ce n'est pas le même, celui de Severin affiche une durée de 14 minutes, et Caiano n'est pas habillé pareil, son chat est d'ailleurs la vedette de l'entretien, ou presque.

[Throma]

C'est un vampire le chat de Caiano ?
Ou alors il s'adonne à un acte que la morale réprouve ?

En tout cas, assez d'accord avec le papier de Walter et même plus : sans 3, 4 tasses de café, je ne serais pas parvenu à aller jusqu'au bout de ce film incroyablement ennuyeux.
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http://www.vhs-survivors.com/myvhs.php?alias=Throma

[igorfx]

[mallox]