flint Super héros Toxic


Inscrit le: 13 Mar 2007 Messages: 7606 Localisation: cusset-plage
|
Posté le: Mar Juin 04, 2013 8:36 pm Sujet du message: [M] [Critique] Le sang du vampire |
|
|
Le sang du vampire
Titre original : Blood of the Vampire
Genre : Horreur, Vampirisme, Epouvante, Gothique
Année : 1958
Pays d'origine : Grande-Bretagne
Réalisateur : Henry Cass
Casting : Donald Wolfit, Vincent Ball, Barbara Shelley, Victor Maddern, William Devlin, John Le Mesurier...
Aka : Der Dämon mit den blutigen Händen/Il sangue del vampiro
Sur une colline désolée de Transylvanie, en 1874, un petit groupe d'hommes s'apprête à mettre en terre le cadavre d'un inconnu, au crépuscule. Un bourreau armé d'un gigantesque maillet enfonce un pieu dans le cœur du défunt. Puis, tous se retirent à l'exception du fossoyeur terminant le travail. Mais celui-ci est poignardé par un homme contrefait, le serviteur et l'âme damnée de celui qui vient de subir le sort réservé aux vampires. Ce dernier, médecin et scientifique de génie, avait trouvé le moyen de maintenir un corps privé de son cœur artificiellement en vie, durant une période définie.
A présent, cette découverte va le servir. Ayant anticipé le sort qui l'attendait, le savant avait donné des consignes à son serviteur, Carl. Celui-ci, après avoir ramené le corps de son maître dans un endroit secret, fait venir un médecin corrompu pour qu'il effectue une greffe du cœur sur le prétendu mort. L'opération est un succès, mais le chirurgien, trop âpre au gain au point de menacer d'exercer un chantage, est à son tour assassiné par Carl.
Six ans plus tard, dans la ville de Carlstadt, un tribunal juge le médecin John Pierre accusé d'avoir provoqué la mort d'un de ses patients. Parmi la foule, Madeleine, la fiancée de l'accusé, veut croire à son acquittement, d'autant qu'un témoignage important pourrait faire tourner le procès à l'avantage de John Pierre. Mais c'est tout le contraire qui se produit, et la lettre du témoin va dans le même sens que les accusateurs de John Pierre. Le médecin est condamné au bagne à perpétuité.
Cependant, à la suite d'un accord secret, le prisonnier est transféré dans un sinistre asile d'aliénés perdu dans les montagnes. L'édifice est dirigé par un certain Docteur Callistratus, qui se trouve être l'homme tué six ans plus tôt pour actes de vampirisme. Si le cœur qu'on lui a greffé fonctionne, le scientifique souffre néanmoins d'une grave infection entraînant une dégénérescence des cellules. Il a ainsi besoin de transfusions sanguines régulièrement.
Afin de guérir, il lui faut identifier les groupes sanguins existant, et isoler ceux qui se montrent nocifs à son organisme. Pour cela, il a besoin d'un assistant, et il pense l'avoir trouvé en la personne de John Pierre.
1958 est une année faste pour la firme britannique Hammer, qui sort coup sur coup « Le cauchemar de Dracula » et « La revanche de Frankenstein ». Difficile de rivaliser avec Terence Fisher, le réalisateur des deux œuvres susnommées, dans le cinéma d'horreur gothique anglo-saxon. Et pourtant, cette même année, un certain Henry Cass y parvient avec « Blood of the Vampire ».
Qui est Henry Cass ? Pas un spécialiste du fantastique, si l'on se penche sur la filmographie de ce Londonien qui débuta en tant que réalisateur en 1937 avec une comédie. Il enchaîna ainsi drames et comédies romantiques jusqu'en 1955 et « Breakaway », un polar dans lequel on retrouvait Honor Blackman. « Le sang du vampire » restera sa seule incursion dans le cinéma d'horreur, et on peut le regretter tant ce coup d'essai s'avéra être un coup de maître.
La réussite du film tient à plusieurs facteurs et la réunion de personnes on ne peut plus compétentes dans ce domaine, une sorte de « Dream Team » présente à tous les postes clé lorsqu'il s'agit de mettre un film en chantier. Ainsi trouve-t-on les noms de Robert S. Baker et Monty Berman (« Jack l'éventreur », « L'impasse aux violences ») à la production, et celle de Jimmy Sangster en tant que scénariste. Celui-ci compte parmi les tous meilleurs scénaristes ayant travaillé pour la Hammer, et dans cette fonction on lui doit notamment « Frankenstein s'est échappé », « Le cauchemar de Dracula », « La revanche de Frankenstein » et « La malédiction des pharaons », soit la plupart des classiques de la firme anglaise en matière de fantastique. Mais Sangster écrira aussi les meilleurs scénarios de thrillers pour la Hammer, à savoir ceux de « Hurler de peur », « Paranoiac », « Maniac », « Meurtre par procuration » et « Le mannequin défiguré », derrière lesquels plane évidemment l'ombre d'Alfred Hitchcock.
Un réalisateur solide, des producteurs ayant du nez, un scénariste surdoué... restait à trouver des bons acteurs. Et dans cette optique, le choix de Sir Donald Wolfit, grand acteur de théâtre qui avait été anobli l'année précédente, s'avéra fort judicieux. Grimé juste ce qu'il faut, il ressemble à un rapace prêt à dévorer sa proie. Il campe un magistral Callistratus, charismatique à souhait et terriblement inquiétant. On pourra voir Donal Wolfit deux ans plus tard dans un autre classique du cinéma fantastique : « Les mains d'Orlac », d'Edmond T. Gréville.
A ses côtés, la merveilleuse Barbara Shelley se voit offrir un portrait de femme forte, courageuse, prête à affronter tous les dangers afin de sauver son fiancé d'une mort certaine. Après un début de carrière en Italie où elle accumule de petits rôles, l'actrice accède véritablement à la notoriété avec « Le sang du vampire », avant d'atteindre la consécration grâce à des œuvres telles « Le village des damnés », « The Gorgon » et « Dracula, prince des ténèbres ». Avec ce duo éclatant, Vincent Ball, dans la peau du héros et jeune premier, paraît quelque peu en retrait sans toutefois démériter. On verra beaucoup cet acteur australien dans des séries télévisées, et au cinéma dans des films comme « Quand les aigles attaquent ».
« Le sang du vampire » fut tourné en Eastmancolor, un procédé que l'on doit à Kodak, ayant pour effet de proposer une image dont les trois couleurs de base (rouge, vert et bleu) étaient impressionnées sur la même pellicule. Le résultat concourt à créer une ambiance particulière qui n'est pas sans rappeler certains films de Mario Bava. L'autre originalité du film est d'avoir créé un méchant qui est en quelque sorte la synthèse de Dracula et du Docteur Frankenstein. L'approche du vampirisme est ici foncièrement originale, devenant scientifique et non pas surnaturelle.
Henry Cass se permet un clin d'œil au Dracula de Bram Stoker lorsque Carl découvre le portrait de Madeleine dans le médaillon. De plus, la passion amoureuse de ce même Carl pour la fiancée de John Pierre évoque sans détour le couple Quasimodo/Esmeralda du Notre-Dame de Paris de Victor Hugo. Quant au décor principal du film, l'asile d'aliénés, il donne l'impression d'être une porte ouverte vers l'enfer, entre ses gardiens tortionnaires, ses molosses aux colliers sertis de pointes, ses prisonniers suppliciés (voir le gigantesque hall d'entrée avec le chevalet de torture), et bien sûr ce laboratoire lugubre où le savant se livre à d'incroyables expériences sur des êtres vivants.
Qui plus est doté d'une magnifique partition musicale due à Stanley Black (« The Trollenberg Terror », « L'impasse aux violences », « The City Under the Sea »), « Blood of the Vampire » est à ranger parmi les tous meilleurs films gothiques anglo-saxons, sans aucun doute.
Fiche dvd -
Le sang du vampire – Artus Films
Région : Zone 2 PAL
Editeur : Artus Films
Pays : France
Sortie film : 27 avril 1960 (France)
Sortie dvd : 5 juin 2013
Durée : 84'
Image : 1.66 d'origine – 16/9e compatible 4/3
Audio : Dolby 1.0
Langues : français, anglais
Sous-titres : français (imposés)
Bonus :
- « Le vampire Callistratus » par Alain Petit (39'20)
- Diaporama (6')
- Bandes-annonces de la collection British Horror
Commentaire : A l'instar de « Cimetière pour morts vivants » ou « L'orgie des vampires », la sortie du film « Le sang du vampire » en dvd constitue un véritable événement. La raison tient avant tout au fait que, contrairement aux éditions précédentes, celle d'Artus Films propose enfin la version intégrale. Jusqu'ici, les éditions en provenance d'Allemagne, d'Italie ou des Etats-Unis n'excédaient pas les 82'26 (comme celle des Allemands de E.M.S.). La version proposée par l'éditeur français atteint les 84', soit la plus longue possible.
La minute trente (approximativement) qui était jusqu'à présent « invisible » en format dvd est constituée en gros de trois scènes sans dialogues destinées à l'époque à certains pays comme la France et l'Italie (voire le Benelux). Elles se situent comme suit dans le temps :
- 31ème minute : Dans le laboratoire secret de Callistratus, la caméra s'attarde longuement sur divers objets disposés sur une table, des ustensiles et des artefacts inquiétants, résultats d'expériences issues d'un cerveau tourmenté. Ce passage dure environ 25 secondes.
- 37ème minute : La fameuse scène (et la plus longue) ayant toujours pour cadre le laboratoire de Callistratus, dans laquelle Carl tourmente quatre prisonnières enchaînées (les actrices en question n'apparaissent à aucun autre moment du film). Le serviteur en chloroforme une et la transporte sur une table d'opération. Cette scène dure 1 minute et 7 secondes. Trente secondes plus tard, on peut encore voir quelques images inédites où Callistratus enfonce un cathéter dans la gorge d'une victime.
- 83ème minute : Presque à la fin du film, lorsque Carl s'écroule sur le mécanisme libérant les chiens. On compte une dizaine de secondes supplémentaires par rapport aux autres versions, où l'on peut voir le serviteur mortellement blessé, avec un gros plan sur son visage, du sang s'écoulant de sa bouche.
Il va de soi que, du fait que le négatif original ait été perdu depuis longtemps, ces passages ont souffert des affres du temps, si bien que l'on notera quelques scories et poussières, ainsi que des couleurs plus ternes par rapport au reste du film. Soulignons toutefois que, d'une manière générale, le master commercialisé par Artus est satisfaisant, si l'on excepte çà et là quelques variations dans l'intensité de la lumière. Les deux pistes son donnent également satisfaction. On relèvera toutefois, aux alentours de la 34ème minute, un curieux effet de résonance dans la VF donnant l'impression que les personnages parlent à l'intérieur d'un bocal (un défaut s'étalant sur une minute environ). Néanmoins, je conseillerai le choix de la version française, ne serait-ce que pour la voix de la personne doublant Donald Wolfit, finalement bien plus impressionnante que celle de l'acteur pour le film qui nous concerne.
Pour en finir avec les scènes inédites, signalons qu'elles figuraient en partie dans la copie française de la VHS commercialisée au début des années '80 par GCR dans sa collection « Fantastic Vidéo ». En partie seulement, car le passage le plus long impliquant Carl et les captives enchaînées était incomplet. De plus, le format des différentes VHS éditées (GCR et plus tard Fil à Film) et celui de la diffusion du film à la télévision n'étaient pas respectés, puisqu'il était au 1.33 et non au 1.66. Il faut savoir que la plupart des éditions dvd, dont celle d'Artus, ont édité « Le sang du vampire » dans son format original 1.66, mais que, pour des raisons inconnues, le teaser où Callistratus est enterré de même que le générique sont toujours restés au format 1.33.
Concernant les bonus, le diaporama exposant sur six minutes affiches, photos d'exploitation et de tournage est de toute beauté. Sans surprise, nous retrouvons également Alain Petit qui revient donc sur ce joyau du cinéma gothique. Dans l'ordre, l'historien du cinéma évoque l'année 1958, très riche en matière de cinéma fantastique, les producteurs Robert S. Baker et Marty Berman, le scénariste Jimmy Sangster et le réalisateur Henry Cass. Alain Petit passe ensuite au crible une partie du casting, ainsi que le compositeur Stanley Black. La seconde partie est la plus intéressante puisqu'il est question des fameux inserts qui ont une part non négligeable dans la notoriété du film.
Une fois encore, l'entretien s'avère fort instructif. Merci à Alain Petit de se montrer si disponible et de nous faire partager sa passion d'un cinéma populaire aujourd'hui disparu.
Note : 9/10
  |
|