Tales from the Quadead Zone
Genre: Blaxploitation , Horreur
Année: 1987
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: Chester Novell Turner
Casting:
Shirley Latanya Jones, Keefe L. Turner, William Jones, John W. Jones, et encore d'autres Jones...
 

Si le nom de Chester N. Turner vous dit quelque chose, ce qui est peu probable, il y a fort à parier que ce soit "Black Devil Doll from Hell" qui vous vienne en tête. Je tiens ici à corriger cette injustice consistant à réduire son oeuvre à une seule blaxploitation tardive et ultra-fauchée, considérée, avec raison, comme l'une des tentatives les moins abouties du 7e art. Non, Turner n'est pas l'homme d'un seul film, mais de deux.

Pour son deuxième et donc ultime opus, il choisit d'aborder le film à sketches, comme le laisse entendre le titre, probablement inspiré du "Tales from the Crypt" de Freddy Francis et du "Twilight Zone" collectif de Dante, Landis, Miller et Spielberg sorti 4 ans auparavant. Reste ce "Quadead", un mot qu'aucun dictionnaire ne reconnait et que Chester lui-même se refusera à définir, laissant le spectateur envoûté par le délicieux fumet du mystère tout du long. Que les fans de la première heure soient rassurés, le maître n'a pas oublié les éléments qui ont forgé sa légende et il nous revient avec son synthé, sa boîte à rythme et son égérie, la presque ravissante Shirley Latanya Jones. Cette dernière participe d'ailleurs cette fois aux effets spéciaux et assure le "gribouillage" du générique (accompagné d'un sublime proto-hip-hop à la Grandmaster Flash, écrit et interprété par les frères Turner, yo !), ce qui tend à démontrer que la comédie n'est finalement pas le domaine pour lequel elle a le moins de facilité.

 

 

Trêve de fadaises, attaquons-nous au premier segment qui englobe les deux autres. Une mère (la Shirley) lit à son fils des histoires tirées d'un épais recueil justement intitulé "Tales from the Quadead Zone". Il faut préciser que le fils en question est un fantôme, symbolisé par un coussin qui s'affaisse et une tasse suspendue en l'air, et que lorsqu'il s'adresse à sa mère ça lui fait l'effet d'un coup de sèche-cheveux en pleine poire, couvert par un "chachachachachacha..." susurré au micro et la laisse dans un état de sensualité douteux. Mais voilà que son mec/mac rentre à la maison et il n'est pas du tout content de savoir qu'elle a passé l'après-midi à lire tranquillement dans le salon. Après une amorce vaguement fantastique, c'est dans le drame social agrémenté de ketchup et de Casio VL-1 que nous nous enlisons. Peu de choses à en retenir, sinon la scène où Shirley Jones se fait tabasser avec le gros bouquin ; toujours bon à prendre.

Les segments intermédiaires sont donc les récits dont le petit Casper semble être friand. Notons déjà que la bouillie musicale censée nous mettre dans l'ambiance couvre tellement l'introduction de chaque nouvelle que le spectateur part toujours avec un train de retard sur l'action. La première nous dépeint une famille de prolos blancs (oui, des blancs chez Turner !) dont le quotidien est régi par une règle absurde : n'ayant de nourriture que pour 5 alors qu'ils sont 8, à chaque repas, après le bénédicité, le patriarche fait retentir son élégante cloche à nounours et tout le monde se rue sur la bouffe. Les cinq premiers servis boulotteront leur pain de mie, les autres attendront poliment de retenter leur chance le lendemain. Un beau jour le gros barbu de la famille trouve la solution miracle à cet épineux problème. Le partage ? Non, la chevrotine. Ne cherchez pas, c'est de l'ironie macabre.

 

 

Quant au second conte, il narre les mésaventures de Ted (Keefe Turner, frère du réalisateur et rappeur de son temps libre) qui se rend à la morgue avec ses amis pour récupérer le corps de son frère Fred. Autant dire que ça démarre sur les chapeaux de roues, avec un hommage appuyé à la célèbre toile d'Alphonse Allais "Combat de nègres dans une cave, pendant la nuit" lors de scènes parfaitement obscures. Puis au cours d'un déchirant monologue où il ne lâche pas sa choppe en forme de nichon - "mon verre préféré !", insiste-t-il - Ted nous explique dans le menu détail toute l'ingéniosité de son plan : n'ayant pu se venger des multiples humiliations que lui a infligé son frère de son vivant, il va pouvoir prendre sa revanche sur le cadavre en l'enterrant dans sa cave... déguisé en clown ! "Ha ! ha ! ha ! ha !" s'esclaffe-t-il sans interruption pendant 3 minutes, quel joli tour pendable. Mais rira bien qui rira le dernier...

Si ce Quadead Zone n'atteint pas les profondeurs abyssales de "Black Devil Doll", car légèrement mieux torché, il multiplie les mauvaises idées, substitue le gore bricolo à la nudité gratuite (et peu payante quand il s'agit de la Shirley) et emploie même quelques effets au-delà de toute description avec ses revenants. Ceci en fait au final un spectacle plus divertissant. Chester Novell Turner a peut-être deux mains gauches, mais il a réussi à se démarquer de la vague des SOV (shot on video = tourné au camescope) américains du début des 80's en ignorant toute notion d'esthétique, de rythme ou d'écriture. C'est parce qu'absolument rien ne marche comme ça le devrait (pas même la suite annoncée au générique) que ses films sont aussi hypnotisants. Rendons gloire à sa totale indépendance et gardons lui toujours une place dans nos collections.

 

 

Princesse Rosebonbon
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