Château des messes noires, Le
Titre original: Der Fluch der schwarzen Schwestern
Genre: Erotique , Horreur , Vampirisme , Gothique , Sorcellerie
Année: 1973
Pays d'origine: Suède / Suisse / Allemagne
Réalisateur: Joseph Sarno
Casting:
Marie Forsa, Nadia Henkova, Anke Syring, Nico Wolferstetter, Claudia Fielers, Ulrike Butz...
Aka: La secte de l'horreur / Les vierges des messes noires / Veil of Blood / The Devil's Plaything / Vampire Ecstasy / Sexorgien der schwarzen Schwestern
 

Dans une contrée reculée de Bavière, on raconte que de jeunes et jolies femmes s'adonnent à des danses lascives dans les souterrains du château Varga, au rythme d'étranges percussions. Mais que se passe-t-il donc à l'intérieur de l'édifice ? Une école de zumba fitness aurait-elle ouvert ses portes ? Que nenni, le château abrite en réalité une confrérie d'adoratrices de Lucifer, menée par Wanda Krog, qui entraîne avec frénésie ses disciples dans des ondulations du bassin à la limite du blasphématoire. Ces danses obscènes ont pour but de réincarner la Comtesse Varga, conduite au bûcher et brûlée vive par les femmes du village avoisinant trois siècles plus tôt, pour actes de vampirisme et de sorcellerie. Wanda, en tant que descendante de la gouvernante et confidente de feu (c'est le cas de le dire) la Baronne, est devenue naturellement la prêtresse de ce culte lesbo-vampirique. Et un, j'ondule à gauche, et deux, j'ondule à droite, je me frotte contre ma partenaire, je lui masse les tétons, et ensuite... Le percussionniste s'emballe, les jeunes femmes à moitié nues, en transe, s'agitent devant l'autel. Wanda mène la cadence à un train d'enfer. A la voir se déhancher avec autant d'aisance, nul doute que la prêtresse est folle de la messe.

 

 

Bon, ce n'est pas tout çà, mais il faut trouver un réceptacle à l'esprit de la Baronne, confiné à l'intérieur de ce château depuis si longtemps. Et seul un descendant de sa lignée peut lui offrir le corps que le vampire se fera un plaisir de posséder. Dans ce but, la perfide Wanda a attiré les deux uniques descendantes de la Baronne : la blonde Helga et la brune Monika. Ces deux ravissantes demoiselles, qui ne se connaissent pas, arrivent donc séparément au château Varga, Monika étant accompagnée de son amie Iris (encore une bien jolie plante). Un peu plus tard, à la tombée de la nuit, un couple débarque ensuite de manière imprévue, à la suite d'un accident de voiture. Il s'agit de Peter Manacca et de sa soeur Julia. Par une incroyable coïncidence (ou grâce à une facétie du scénariste), il s'avère que Julia, médecin spécialisé dans les coutumes et superstitions locales (on n'en voit plus beaucoup aujourd'hui), est la descendante d'Ulla Borisov, soeur de la Baronne Varga et instigatrice de la révolte qui conduisit la sorcière et vampire au bûcher.
A la lecture du testament, Helga et Monika apprennent que les biens de la Baronne leur sont légués en deux parts égales, à condition qu'elles demeurent au château durant une année (quel plan supérieur) !

 

 

Joseph W. Sarno, new-yorkais né en 1921 et décédé en 2010, est considéré à juste titre comme l'un des pionniers de la sexploitation. Durant sa longue et fructueuse carrière, le cinéaste a tourné près de cent-vingt longs métrages (dont pas mal de pornos DTV en fin de parcours). Il s'est fait connaître à travers ses histoires de femme au foyer, souvent d'âge mur, vivant généralement dans une banlieue ou une petite ville des Etats-Unis, rongée par l'ennui mais surtout sexuellement frustrée. De tels scénarios, on va en trouver dans des films comme "Sin in the Suburbs" (1964), "Abigail Leslie is Back in Town" (1975), probablement son chef d'oeuvre, et jusque dans son ultime long métrage en 2004, "Suburban Secrets", pour un come-back remarqué après une quinzaine d'années de silence (même si le film, lui, n'est pas vraiment remarquable).
Tout ce que l'on peut dire, lorsque l'on évoque Le château des messes noires, c'est que ce film détonne singulièrement dans l'oeuvre de Sarno, sauf qu'il est évidemment fortement chargé en érotisme, cela va de soi.

 

 

Car, si Le château des messes noires possède certains ingrédients du film d'horreur gothique (la gouvernante austère et inquiétante, le château abritant quelque cérémonie secrète, le portrait de l'ancêtre trônant dans le vestibule...), c'est aussi (et avant tout) une oeuvre érotique, un pur produit du cinéma d'exploitation des années 1970.
Les scènes "coquines" reviennent de façon récurrente par le biais des fameuses danses rituelles, véritable fil rouge de l'histoire. On en dénombre pas moins de six durant tout le film, avec chaque fois une petite variante histoire d'éviter la monotonie (et là, on voit le savoir faire de Joe Sarno). La première intervient dès le teaser, et permet de poser le "décor" principal du film, qui n'est pas le château en lui-même ou ses extérieurs, mais ses souterrains. Là, à la lumière des torches (au passage, la photographie est superbe), une demi-douzaine de donzelles vêtues d'un simple pagne, le corps décoré de peintures "cabalistiques", dansent mollement au rythme d'un tam-tam. On se caresse un peu, on se frotte. Puis, la prêtresse Wanda sort un olisbos d'une taille impressionnante. L'objectif de cette "fusée" est évidemment la lune d'une de nos sectatrices. Un challenge plutôt relevé (intromission impossible, pourrait-on croire).

 

 

Pour les danses à suivre, à intervalles réguliers, le spectateur remarquera en deux occasions l'ajout d'un élément mâle au sein du groupe, généralement blond et pourvu de grosses... rouflaquettes, et avec l'air inspiré du biker dégustant sa bière en écoutant de la musique country. Au quatrième passage, on note l'apport d'un gadget plutôt sympathique : la bougie godemichet. Il est évidemment conseillé de ne pas l'allumer pour un usage anal ou vaginal.
Une touche sado-maso pimente la scène suivante, avec l'un de nos bikers (pardon, adorateurs de Satan) enchaîné et sollicité par deux tentatrices auxquelles on ne pourrait décemment résister. Enfin, la dernière cérémonie fait office de "best of", puisque tout le casting ou presque y est convié. La Baronne Varga devant être réincarnée pour l'occasion, il était donc normal d'inviter un maximum de gens.
Mais rassurons-nous, d'autres scènes érotiques agrémentent de façon fort agréable ce long métrage. Elles concernent ici les personnages principaux pour des intrigues amoureuses apportant leur lot de variété, là aussi : de la classique hétérosexualité en passant par le saphisme, l'onanisme, jusqu'à l'inceste. Il faut avouer que les cérémonies sataniques organisées par Wanda ont tendance à hausser considérablement la libido de chacun des invités du château, à croire que les percussions ont un potentiel aphrodisiaque plus élevé que l'orgue électronique de Charly Oleg.

 

 

Et l'horreur dans tout cela, me direz-vous. Elle est bien là, par petites touches, un peu dans un style évoquant des oeuvres de Jean Rollin ou Jess Franco, certains films avec Paul Naschy ou encore une poignée de productions Eurociné. Ainsi, dans Le château des messes noires, peut-on voir le personnage de Julia agressé par des chauves-souris invisibles ! La voir se débattre contre un ennemi "inexistant" est plutôt savoureux, et rappelle la scène anthologique du viol d'une paysanne par un monstre tout aussi "transparent" dans "Orloff et l'homme invisible". Vers la fin du film, également, on peut voir Julia harcelée par un duo de femmes-vampires dont les cris évoquent plus le feulement d'un chat. Un détail qui, rajouté aux robes légères des protagonistes et leurs gesticulations hasardeuses, renvoient à certaines oeuvres de Jean Rollin durant sa période vampirique.
L'absence de crucifix traditionnel, remplacé ici par une croix-talisman sertie d'ail, et le fait que les vampires n'aient pas de canines proéminentes est par contre une innovation plutôt bienvenue. Notamment l'absence de crocs, qui peut laisser le doute quant à l'existence réelle d'un cas de vampirisme, et suggérer que les protagonistes de l'histoire sont sous l'effet de drogues ou d'un cas d'hypnose collective.

 

 

Malgré son côté un peu répétitif dans le déroulement de l'action, Le château des messes noires est une oeuvre réussie, visuellement splendide. Au niveau du casting, Joseph Sarno est allé dénicher Marie Forsa, qui deviendra une vedette du cinéma érotique suédois au même titre que Christina Lindberg. Sarno fera ensuite tourner Marie Forsa dans "Girl Meets Girl" et "Butterflies". Puis, ce sera au tour de Mac Ahlberg d'employer l'actrice dans des films considérés encore aujourd'hui comme des classiques du cinéma érotique (Bel Ami, Flossie, "Justine & Juliette").
Ici, elle joue l'une des deux héritières (Helga), l'autre étant interprétée par Ulrike Butz (Monika). Cette magnifique brune, également mannequin, écuma les productions érotiques durant les seventies, notamment dans la série des "Schulmädchen Report", où on put admirer sa plastique dans les volets quatre à sept. Citons également Heidrun Hankammer ("The Man with the Glass Eye", "2069, A Sex Odyssey") et Claudia Fielers, vue un bon nombre de fois chez Erwin C. Dietrich, notamment dans "Self Service Girls". A noter que Claudia Fielers, Anke Syring (qui incarne Julia) et Nadia Henkova (la redoutable Wanda) ont toutes joué dans le "Girl Meets Girl" de Sarno. Enfin, Nico Wolferstetter, dans le rôle de Peter, fit une carrière conséquente dans le circuit érotique, également, et se frottera même au porno en quelques occasions, comme dans "Sensations" de Lasse Braun ou encore "Les pucelles en chaleur" de Hans Billian.

 

 

Coproduction entre la Suède, l'Allemagne et la Suisse, Le château des messes noires fut exploité dans divers pays et sous bien des titres. En France, il fut même rebaptisé La secte de l'horreur pour son exploitation vidéo. Aujourd'hui, on pourra encore apprécier son érotisme très stylé, et son aspect kitsch en matière d'horreur. Il possède également des qualités esthétiques évidentes, mettant en avant le savoir faire de Joseph Sarno, notamment dans le domaine du cadrage et du placement des acteurs, hérité d'une influence envers Ingmar Bergman (voir l'entretien avec Emmanuel Levaufre dans les bonus).
Pour toutes ces raisons, la vision de cette oeuvre atypique du réalisateur américain est tout à fait conseillée aux amateurs du genre.

 

Flint

 

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