Donneuse, La
Genre: Drame
Année: 1975
Pays d'origine: France
Réalisateur: Jean-Marie Pallardy
Casting:
Willeke van Ammelrooy, Jean-Marie Pallardy, Beba Loncar, Jacques Insermini, Bernard Musson...
Aka: Contre nature / Entrez aussi par derrière (Remontage porno) / Tremblements de chair (remontage porno) / Naked and lustful / Moeder te huur
 

Jean-Paul et Françoise forment un couple que beaucoup envieraient. Elle est la fille d'une riche famille ayant fait fortune dans la sidérurgie, il est celui qui a fait fructifier l'entreprise grâce à de brillantes études et son savoir faire. Françoise ne travaille pas, elle n'en a pas besoin et mène une vie de bourgeoise dans un château. Jean-Paul se donne beaucoup dans son travail. Signes extérieurs de richesse, il porte un manteau de fourrure et roule en Citroën SM. Malheureusement, cette vie de rêve est perturbée par un élément qui a son importance : Françoise est stérile. Le médecin de la famille propose au couple de trouver une mère porteuse qui leur donnera un enfant. Comme de telles pratiques sont interdites en France (et en Belgique, où se passe une partie du récit), il faut se tourner vers les Pays-Bas pour envisager cette solution extrême. Une fois le processus enclenché, Jean-Paul devient obsédé à l'idée de connaître cette femme qui va porter son enfant.

 

 

A l'époque où Jean-Marie Pallardy tourne "La Donneuse", les thèmes de la mère porteuse et de l'avortement sont encore des sujets tabous, ou tout du moins controversés. Son film va se retrouver pourtant en pleine actualité puisqu'en janvier 1975, la loi Simone Veil sur l'Interruption Volontaire de Grossesse est votée, dépénalisant ainsi l'avortement. Ce qui n'empêchera pas évidemment ce sujet de prêter encore à polémique. Par contre, la gestation pour autrui reste encore aujourd'hui interdite en France, elle est même officiellement condamnable depuis une loi sur la bioéthique votée en 1994. Vous l'aurez compris, avec "La Donneuse" Jean-Marie Pallardy abandonne provisoirement la comédie paillarde qu'il affectionne pour aborder un thème on ne peut plus sérieux qui lui tient à cœur, à un point tel qu'il en fera un remake en 2000, "Femmes ou maîtresses", avec David Carradine et Florence Guérin.

 

 

Si le réalisateur s'en tire honorablement autant derrière que devant la caméra, puisqu'il interprète le premier rôle masculin, la véritable star du film est Willeke van Ammelrooy dans le rôle titre. Le cinéaste français la découvrit en 1973 tandis qu'il préparait le tournage du "Journal érotique d'un Bucheron". Cette superbe hollandaise commençait à se faire une réputation dans le milieu suite au succès de "Frank en Eva", dans lequel elle jouait avec Sylvia Kristel. Cette collaboration avec Pallardy (avec qui elle aura une liaison) durera environ trois ans, pour une demi-douzaine de films. La Hollande est d'ailleurs particulièrement à l'honneur dans "La Donneuse", puisque l'on retrouve brièvement, au détour d'une scène, Rutger Hauer, formidable acteur qui se fera connaître à travers les œuvres sulfureuses de Paul Verhoeven, ainsi que Pim de la Parra (dans le rôle d'un "faiseur d'anges"), excellent réalisateur, celui du "Frank en Eva" précédemment cité, mais aussi du remarquable "My nights with Susan, Olga, Albert, Julie, Piet & Sandra", rebaptisé plus sobrement "Les Furies" lors de son exploitation française. Dans ce film, mais aussi dans "La Donneuse", Willeke ne montre pas uniquement ses charmes mais aussi son talent, qui est immense. Elle ne se contente pas de jouer ses personnages, elle les vit, elle "est", tout simplement. Sans aucun doute, Willeke van Ammelrooy fut la meilleure actrice que Jean-Marie Pallardy eut l'occasion de faire tourner dans sa carrière de cinéaste. Elle en vient finalement à éclipser Beba Loncar, pourtant impeccable dans son incarnation de femme froide, autoritaire et sophistiquée. Mise en situation d'échec à cause de sa stérilité, elle n'en devient que plus tyrannique, une attitude qui poussera son mari à vouloir connaître la mère porteuse. Beba Loncar n'a pas eu une carrière prestigieuse, mais on a pu la voir dans quelques films sympathiques tels "Opération Ré mida" de Jess Franco.
Concernant le reste du casting, en dehors des incontournables Jacques Insermini et Jean Luisi, citons la présence de l'un des éternels "seconds couteaux" du cinéma français, au même titre que Robert Dalban, à savoir Bernard Musson, qui a traîné sa silhouette longiligne et son nez de rapace dans près de trois cents films. Il fut régulièrement employé par Luis Bunuel, mais aussi par Serge Korber et Jean-Claude Roy dans quelques œuvres polissonnes. On se rappelle également de Bernard Musson pour son interprétation dans "La Vampire Nue" de Jean Rollin.

 

 

Comme d'autres films de Pallardy, "La Donneuse" a connu quelques problèmes avec la censure, si bien qu'il ne sortira finalement qu'en 1977. Il a subi également divers montages. La version vidéo connue sous le titre "Contre nature" comporte deux scènes additionnelles absentes du montage d'origine, et qui furent tournées deux mois après le tournage. L'une se situe dans le cabinet du médecin, où la secrétaire fait une fellation à Richard Allan afin de recueillir son sperme, sous les yeux d'un Jean-Marie Pallardy pour le moins surpris. La seconde se déroule au milieu du film, lors d'une soirée arrosée chez des amis de Sylvia (le personnage de Willeke), où Jean-Paul surprend un couple faisant l'amour dans une arrière-salle. "La Donneuse" fut également remontée en 1979, avec à la fois des séquences pornographiques réalisées par un spécialiste dans le genre, Michel Beaudricourt, mais aussi des rushs récupérés sur d'autres films. Des 1H35 de l'oeuvre initiale, ne subsistaient qu'une quarantaine de minutes, pour un circuit évidemment destiné aux salles spécialisées. Le film connut ainsi deux sorties en cette année 1979, l'une courant août sous le titre évocateur "Entrez aussi par derrière" ; l'autre au mois d'octobre sous l'appellation "Tremblements de chair". On retrouvait dans ces scènes additionnelles les vedettes du cinéma X, comme Brigitte Lahaie, Diane Dubois, Karine Gambier et Richard Allan. En vidéo, le film ainsi caviardé fut commercialisé par Carrère/Amandine sous le titre "Entre aussi par là".

 

 

Fort heureusement, Le Chat qui Fume a retenu le montage d'origine, l'histoire touchante d'un couple au bord de la rupture, et d'un homme qui redécouvre des plaisirs simples avec une femme naturelle et spontanée. Une histoire qui, à cause des non dits, s'achève en drame aux allures de tragédie grecque. Du coup, on pardonnera à Pallardy d'avoir usé, sinon abusé, des clichés de l'époque, comme ces promenades touristiques en Martinique, l'amour sur le sable, des étreintes en semi ralenti, sans oublier du dilettantisme en tout genre : équitation, ski nautique et ballade en buggy. On lui pardonnera aussi quelques fautes de goût, notamment son horrible manteau de fourrure ! Pour retenir une œuvre qui se démarque dans la filmographie du cinéaste, plutôt attachante et aboutie malgré ses petits défauts.

 

Note : 7,5/10


Flint
 
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