[M] [Critique] A Rather Complicated Girl – 1968

 
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mallox
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MessagePosté le: Mer Nov 17, 2010 10:46 am    Sujet du message: [M] [Critique] A Rather Complicated Girl – 1968 Répondre en citant



A Rather Complicated Girl – 1968
(Una ragazza piuttosto complicata)

Origine : Italie
Genre : Drame / étude de mœurs / érotique

Réalisé par Damiano Damiani
Avec Jean Sorel, Catherine Spaak, Florinda Bolkan, Luigi Proietti, Gabriella Grimaldi, Gaetano Imbrò, Gino Lavagetto, Franco Giornelli, Luigi Casellato, Luciano Catenacci, Franco Leo, Sergio Graziani…


Souvent classé dans le genre giallo auquel il n’appartient, pourtant, absolument pas, « Una ragazza piuttosto complicata » est également un film souvent occulté dans la prolifique carrière de Damiano Damiani. Sans doute est-ce le fait qu’il semble de prime abord s’agir d’une drôle de parenthèse dans sa filmographie, puisque tourné entre deux dissections directement politiques ou politisées : « El Chuncho » et « La mafia fait sa loi ».



On y retrouve pourtant nombre de préoccupations du réalisateur, en plus d’acteurs autant plaisants que de talent comme Jean Sorel, Catherine Spaak et Florinda Bolkan, le tout dans un genre certes inattendu puisqu'il s'agit là d'une espèce de variation sur le thème du « drame de la jalousie » que l'on pourrait résumer ainsi :

Alberto (Jean Sorel) mène une vie terne faite de frustrations et dont le métier (concepteur d’appareils médicaux) côtoie la mort. Il vient tout juste de créer un appareil respiratoire destiné à soigner un mourant en fin de vie. Une bouteille d'oxygène qu’il compare à une bombe qui serait remplie de méthane afin abréger les souffrances du malade. Voici qu’il intercepte par hasard une conversation téléphonique entre deux femmes dont l’une, Claudia (Catherine Spaak) invite l’autre, Greta (Florinda Bolkan), dans son atelier d’artiste peintre. La nature de l’appel est ambiguë et laisse penser que les deux femmes se voient régulièrement pour des pratiques saphiques.
Alberto est un vicieux. En plus d’être cynique et un brin sadique, il est avant tout un impénitent curieux, et s’avère vite n’être qu’un voyeur gorgé de fantasmes sexuels sensés assouvir par procuration ses déviances. C’est dans cet état d’esprit, en tout cas, qu’il se rend à l’atelier de la jeune femme, épie un temps ses allées et venues avant de l’aborder. De là, naît aussitôt entre eux une relation amoureuse forte mais on ne peut plus trouble. Alors qu’Alberto est chez elle, Claudia reçoit également son amant, Pietro (Gigi Proietti), avec lequel elle couche encore. Basé sur une relation libre, leur couple va bientôt vaciller dès lors qu’Alberto deviendra possessif, jaloux. Claudia et Pietro viennent même la nuit s’assurer qu’Alberto est endormi avant de faire l’amour. De son côté, Alberto fait semblant de dormir pour mieux les épier ensuite dans leurs ébats...



Pour relancer son couple, Alberto a l’idée de mettre en pratique son voyeurisme et entraîne alors Claudia dans une spirale de jeux troubles et pervers. Ils obligeront même une jeune femme rencontrée sur un petit chemin isolé à se déshabiller, l’humiliant ainsi en même temps qu’Alberto se rassasie aussi de sa nudité.
Mais ce n’est toutefois pas leur perversité qui les mènera au drame, car Alberto trouve bientôt un pistolet dans le sac à main de Claudia. Selon Claudia, l’arme serait destinée à se libérer de la servitude au sein de laquelle l’aurait amené Greta, sa belle-mère. Alberto sombre peu à peu dans des rapports si passionnels qu’il en viendra au meurtre…



Avant d’être transposé à l’écran par Damiano Damiani, « Una ragazza piuttosto complicata » est avant toute chose un roman d’Alberto Moravia. C’est l’une des treize transpositions pour l’écran de l’un de ses romans et récits. Autant dire que nous sommes très loin du thriller, même psychologique, le film ne recelant que peu de tension à ce niveau ; nous sommes plutôt plongés dans l’étude de mœurs et l’introspection d’un couple ainsi que son évolution qui n’est pas sans évoquer « Le mépris », que tourna Godard en 1963. Ce à quoi l’on assiste une bonne partie du film durant, c’est à un jeu de réparties dont la mise en scène repose volontairement (et c’est aussi une de ses limites) sur un statisme loquace. Une succession de longues scènes dans lesquelles nos deux personnages expliquent leurs motivations et dans lesquelles l’un(e) se devra de deviner à quel jeu supplémentaire joue l’autre. Au libertinage de façade d’Alberto, Claudia répondra liberté personnelle ; une liberté qui mettra vite à mal le machisme enfoui d’Alberto, lequel ne supportera pas de voir ce bel objet du désir ne pas pleinement lui appartenir. De l’autre côté, Claudia se prêtera de façon complaisante aux jeux pervers d’un Alberto blasé, en quête de sensations déviantes, l’aidant même, avec pragmatisme, à assujettir d’autres femmes.



L’une des qualités de « A Rather Complicated Girl » serait également de trahir le roman initial (il se décrit, dans son générique même, comme une libre adaptation) pour lui insuffler en plus une dimension politique : ainsi la première partie du film semble rejoindre les propos d’un Wakamatsu (« la femme est à l'homme ce que le prolétaire est au bourgeois capitaliste » - notre personnage se croit libéral lorsqu’il s’avère être lui-même assujetti à son propre désir matérialiste). La seconde partie, en revanche, consiste via un pseudo parti pris féministe à prévenir sur les dangers d’un tel désir, dans lequel le passionnel se confondra inéluctablement au totalitarisme tant et si bien qu’à la fin, la femme, à l’instar de la masse prolétarienne, pourrait finalement bien se rebeller jusqu’à dominer et, pour ce faire, manipuler jusqu’à pousser le mâle/patron à la faute.

Autant dire que c’est plutôt à un film ardu, voire mal aimable, auquel on assisterait, si ce n’était le fait qu’« Una ragazza piuttosto complicata » bénéficie d’une mise en scène chiadée, un brin poseuse même, le rapprochant tout à la fois, par ses décors pop et de sa dissection du mâle et des rapports emberlificotés entre l’homme et la femme, d’« Une nuit mouvementée » de Mario Bava et, de par ses cadrages et son montage encore sous l’influence de la nouvelle vague, d’ « Un coin tranquille à la campagne» que tournera Elio Petri à quelques mois d’intervalle.
Pour se montrer sévère, on arguera que contrairement à Bava, Damiano Damiani s’avère incapable d’instiller le moindre signe d’humour ou de distanciation dans une histoire qui pourra paraître parfois bien lourde pour ce qu’elle dit au premier degré, puis dans ce qu’elle suppose de symbolismes et de lectures sous-jacentes. On sait cependant que Damiani n’a jamais été très doué pour l’humour (« Un génie, deux associés, une cloche »). On pourra aussi lui reprocher une mise en scène tapie davantage derrière des artifices d’époque qu’étant en véritable adéquation avec son sujet, comme ce sera du reste le cas avec le film de Pétri, encore sous le joug lui aussi de la nouvelle vague, même si à ce niveau le Pétri s’en sortait de manière plus cohérente.
A contrario et, paradoxalement, en faveur de « A Rather Complicated Girl » : le fait de nous raconter, au-delà de détails parfois anecdotiques, la destinée et le chemin spirituel d’un homme qui trouvera par le meurtre (ainsi qu’un bon coup de poing dans la gueule) une harmonie entre sa pensée et ses actes. Le même chemin, finalement, qu’un Gian Maria Volonte dans « El Chuncho », si bien qu’à ce titre on ne manquera pas de mentionner que les finals des deux films se ressemblent singulièrement, avec deux personnages assez similaires qui s’en iront libérés et satisfaits de l’être enfin.



Bref, bien qu’inégal et un brin ampoulé, et bien que, comme souvent, Damiani cède trop le pas à un bavardage un peu statique et empesé, « Una ragazza piuttosto complicata » demeure un film intéressant. D’autant plus que les acteurs y sont excellents - le relevant même d’un cran - que l’érotisme omniprésent reste quant à lui très attrayant, que la photographie signée Roberto Girardi est somptueuse et que, pour finir, la musique signée Fabio Fabor (un parfait inconnu me concernant, dont la carrière semble s’arrêter à ce seul film) est bien emballante.
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Dernière édition par mallox le Dim Fév 11, 2018 7:33 am; édité 14 fois
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sigtuna
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MessagePosté le: Jeu Nov 18, 2010 7:11 am    Sujet du message: Répondre en citant

fainaim01 ça a l'air bien.
quoique Moravia icon_confused
C'est festival Florinda Bolkan ces derniers temps
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mallox
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MessagePosté le: Jeu Nov 18, 2010 7:18 am    Sujet du message: Répondre en citant

sigtuna a écrit:
C'est festival Florinda Bolkan ces derniers temps


Oui, j'ai pas poussé le vice jusqu'à te dédicacer la critique mais tu penses bien, qu'en chieur chronique, je fus tenté. frank_PDT_10
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flint
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MessagePosté le: Jeu Nov 18, 2010 7:45 am    Sujet du message: Re: [Critique] A Rather Complicated Girl – 1968 Répondre en citant

C'est mérité, c'est une actrice talentueuse. La chronique de Mallox me permet d'apprendre que le duo Bolkan/Sorel se connaissait donc déjà avant le fameux "Venin de la peur".
Bon, personnellement, ce Damiani ne me tente pas vraiment, je crains de m'y ennuyer.

A propos de cela :

mallox a écrit:

... l’une, Claudia (Catherine Spaak) invite l’autre, Greta (Florinda Bolkan) dans son atelier d’artiste peintre. La nature de l’appel est ambigu et laisse penser que les deux femmes se voient régulièrement pour des pratiques saphiques.


En 1970, Max Pecas a réalisé un "Claude et Greta", avec également une histoire d'homosexualité féminine. Peut-être Pecas s'étai-il lui aussi inspiré du roman d'Alberto Moravia.
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sigtuna
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MessagePosté le: Jeu Nov 18, 2010 9:11 am    Sujet du message: Re: [Critique] A Rather Complicated Girl – 1968 Répondre en citant

flint a écrit:
C'est mérité, c'est une actrice talentueuse.
Ah mais je n'ai jamais dit le contraire icon_wink
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Bastien
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MessagePosté le: Jeu Nov 18, 2010 3:41 pm    Sujet du message: Ôooooo Répondre en citant

Tiens ! Un film que je ne connaissais pas (du tout) !

Personnellement, Perversion story fut pour moi un grand choc(comme l'oeil du labyrinthe) et je pensais avoir pu mettre l'oeil sur tout les gialli de Jean Sorel depuis Le tueur à la rose rouge (1962) jusqu'à Dans l'oeil de l'ouragan ou encore La mort entoure Monica et finalement La controfigura...

Grande découverte que ce film !

Ce qui est paradoxale, avec Jean Sorel, c'est qu'il s'agit d'un grand acteur, qui aime essentiellement le théâtre, mais qui s'est naturellement tourné vers le cinéma, en France puis en Italie pour aboutir, vers 1968, dans les films que nous aimons.

Juste avant, il trouva le rôle pour lequel les critiques "officiels" et la cinématographie mondiale se souvient de lui : Le mari délaissé dans Belle de jour de Bunuel.

Il y a eu il y a 2-3 ans une rétrospective de Belle de jour à Cannes, ce qu'il y eut de plus officiel, mais si la "grande" Catherine Deneuve fut conviée, je n'ai pas trouvé de trace de Jean Sorel.
Un scandale pour moi !

J'ai tatanné Norbert Moutier pour qu'il entreprenne un Monster bis sur Jean Sorel, une fois, tant cet acteur est modeste, intéressant (l'essentiel de son intérêt demeure le théâtre) et abordable.
Je suis peut-être son plus grand fan, mais qu'est-ce que j'aimerais le croiser un jour...
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John Pipo
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MessagePosté le: Ven Nov 19, 2010 5:24 pm    Sujet du message: Re: [Critique] A Rather Complicated Girl – 1968 Répondre en citant

Mallox a écrit:
Genre : Drame / étude de mœurs / érotique


Mallox a écrit:
De son côté Alberto fait semblant de dormir pour mieux les épier ensuite dans leurs ébats...




Mallox a écrit:
Alberto se rassasie aussi de sa nudité.


flint a écrit:
Bon, personnellement, ce Damiani ne me tente pas vraiment, je crains de m'y ennuyer.



étonnant ! frank_PDT_16
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flint
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MessagePosté le: Ven Nov 19, 2010 9:44 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Ben, oui, faut me comprendre, je suis plongé actuellement dans les X de Wild Side. Le décalage est trop grand. ico_mrgreen
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