[M] [Critique] Mind Game

[Bigbonn]

Mind Game
Japon - 2004
Genre : animation ; comics/manga ; expérimental
Réalisation : Yuasa Masaaki



Nishi est un jeune dessinateur de manga mal à l’aise avec les femmes et en particulier avec Myon, dont il est épris depuis fort longtemps. Lorsqu’elle lui annonce qu’elle va en épouser un autre, son monde pourrait s’écrouler mais en fait non, il ne s’écroulera qu’un peu plus tard, lorsqu’un yakuza venu racketter le père de la belle lui tire une balle dans le cul.
C’est donc un Nishi mort de façon ridicule mais incrédule qui rencontre Dieu et ses multiples visages (de la figure verdâtre coiffée d'une... crotte !?! au poisson fumant, en passant par la vamp vaporeuse ou l’élan bagarreur), avant de se rebeller et de fuir une disparition totale pour renouer avec sa vie juste avant que le gangster n’appuie sur la gâchette.
Une deuxième chance donc et une plongée échevelée dans une vie pleine de bruit et de fureur, à fuir des yakuzas prêts à en découdre dans une course-poursuite automobile insensée se finissant dans le ventre d’une baleine en compagnie d’un papy oublié et devenu fin cuisinier...



Avec ce bref résumé de l’intrigue, on voit déjà que le scénario offre de multiples rebondissements n’ayant peur ni de l’excès ni du farfelu. Et pourtant, on est encore loin du compte puisque l’animation elle-même en rajoute dans l’inventivité et l’atmosphère débridée, rendant véritablement passionnante cette histoire brinquebalante et parfois décousue.
Tiré d’un manga de Robin Nishi, Mind Game est un festival narratif et pictural dont les premières minutes, quelque peu déstabilisantes, donnent déjà le ton, l’accroche du spectateur se faisant très vite, grâce à un humour toujours bienvenu et jouant sur plusieurs registres : visuel, de situation ou de dialogues, quand ce n’est pas des trois à la fois. S’il est difficile de comprendre à la première vision où les auteurs veulent en venir, on n’en reste pas moins scotché sur son siège tant les péripéties, les rencontres et les idées géniales viennent pimenter les différentes séquences souvent très bien rythmées.



Le réalisateur, dont c’était le premier long-métrage, aime le mouvement et son animation est souvent d’une très grande fluidité, tournant autour de ses personnages, les accompagnant dans leurs courses insensées, plongeant au cœur de la tourmente ou s’arrêtant soudain lorsque le récit l’exige, le tout parfaitement accompagné par une musique en totale adéquation avec l’image (mention spéciale aux percussions accompagnant une course folle vers le monde extérieur).
Yuasa Masaaki a choisi de mêler diverses techniques, de l’animation traditionnelle à la 3D, en passant par l’utilisation de prises de vues réelles (les visages d’acteurs incarnant parfois, sans autre explication, les personnages animés), pour un résultat hétéroclite mais collant tout à fait à l’esprit du film, maelstrom de destins confrontés à l’avenir et futurs possibles des différents protagonistes.



Adapté d’une œuvre en trois volumes non édités chez nous du mangaka Robin Nishi, Mind Game conte donc l’histoire du mangaka... Nishi et de ses acolytes, deux sœurs très différentes mais jolies toutes les deux, un vieux naufragé vivant depuis trente ans dans le ventre d’un cétacé, tel un Jonas non biblique amateur de sushis, et de quelques yakuzas tristes et violents. L’un d’eux, disant au détour d’une scène : « Si je pouvais remonter le temps... » d’un ton désabusé, donne un peu la clé de cette frénésie visuelle : Mind Game tourne autour du tourbillon de la vie, de ce que l’on en fait, des erreurs que l’on peut commettre et des renoncements qui nous torturent parfois. Mais, si le sujet offre une portée quasi-philosophique, existentielle même, pourrait-on dire, la façon dont il est traité ne le rend en rien difficile d’accès et encore moins plombant. L’ambiance est plutôt à la fantaisie et à l’imagination survoltée, à l’image de ce Dieu protéiforme qui offre l’une des séquences les plus réussies et retient le jeune Nishi tout comme il l’encourage en même temps à reprendre sa vie. Etonnant, déjanté, excessif et délirant, Mind Game est une très belle réussite injustement trop méconnue.

[Bigbonn]

Fiche dvd -



Mind Game – Potemkine, Agnès B.

Région : Zone 2 PAL

Editeur : Potemkine films, Agnès B. DVD
Pays : France

Sortie dvd : 18 novembre 2009

Durée du film: 103 minutes
Image : format 2.35
Audio : version originale ou version française
Sous-titres : français

Bonus (dvd 2) :
- Le film en animatics (103 minutes)
- Module sur le travail d’animation (15 minutes)
- Scènes commentées par le réalisateur (31 minutes)
- Avant-premières filmées (26 minutes)
- Galerie d’entretiens (23 minutes)
- Clip live de la BO ( 3 minutes)



Commentaire : Potemkine films et agnès b. DVD réalisent un travail d’édition de grande qualité (qui vient d’ailleurs d’être récompensé, le syndicat français de la critique de cinéma ayant décerné le titre de « Meilleur coffret DVD 2011 » au coffret Alan Clarke réunissant Made in Britain, Scum, Elephant et « The Firm ») et leur double DVD consacré à Mind Game ne déroge pas à la règle.



Film d’animation défiant les règles de base du dessin animé comme du scénario, ce récit des aventures rocambolesques d’un jeune mangaka expérimentant l’au-delà et s’offrant une seconde vie débutant dans le ventre d’une baleine surprend, bouscule, ravit et divertit au plus haut point. Il y a là plus d’idées que dans moult films ayant pourtant, eux, connu les honneurs d’une sortie en salles. Pour les amateurs de grand huit, Mind Game est en quelque sorte une quintessence : il chamboule, désempare, fait rire et laisse sonné. Bref, vous avez compris : j’aime beaucoup.



Les bonus, de leur côté, sont riches et très nombreux : le premier consiste dans le film lui-même en animatics, c’est-à-dire parfois à l’état d’ébauche, parfois d’animation crayonnée, parfois terminé. La totalité du film est ainsi reprise pour un intérêt, ma foi, assez peu évident à mes yeux, mais peut-être beaucoup plus à celui qui se destine à l’animation. Même chose pour le second bonus, un module sur le travail d’animation et notamment sur l’insertion de prises de vues réelles dans le film.



Les scènes commentées par le réalisateur offrent, en revanche, beaucoup plus d’intérêt en éclairant les intentions des auteurs (du film comme du manga) sur les tenants et les aboutissants de cette histoire se démultipliant dans certaines séquences jusqu’au vertige. L’occasion aussi pour eux d’avoir un œil critique sur leur travail mais aussi de mettre en évidence celui-ci dans le traitement différent accordé aux scènes des passages sur lesquels ils reviennent. Le bonus à regarder en priorité sur cette galette.



Les avant-premières sont assez convenues, reprenant les présentations du film dans divers festivals. Plus intéressants, les entretiens avec l’auteur du manga, Robin Nishi (reconnaissable à son petit chapeau) et le réalisateur du film, Masaaki Yuasa, permettent aux deux de mettre en perspective leur travail et, là aussi, de souligner leurs intentions.



Enfin, on ne serait pas complet sans mentionner le petit livret accompagnant ce double dvd et offrant, outre des illustrations, une présentation intéressante du film par Emmanuel Bahu-Leyser et une autre du Studio 4°C qui a permis la réalisation de cet étonnant Mind Game (car c’est pas tous les jours qu’on voit au détour d’une séquence un chien qui n’est autre que Dieu mordre le cul du héros, nom di diou !)

[sigtuna]

La 2eme critique sur les 400 de l'été on tient (presque) le bon rythme.
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[princesse.rosebonbon]

tel les fourbes Etats-Unis profitant de l'absence momentanée de l'URSS à l'ONU pour faire condamner la libération de la félonne Corée du Sud par la glorieuse Corée du Nord, l'infame Bigbonn tente de profiter de l'engourdissement estival pour faire passer en douce une critique de film d'animation.
Mais c'était sans compter sur l'implacable vigilance de casse-bonbon

ceci dit j'avais déjà lu du bien de ce film il y a longtemps et tu sembles le confirmer.

[Bigbonn]

[Stegg]

Il est en effet très chouette ce film. Un gros délire visuel qui s'assume jusqu'aux bout et plein de passages très colorés. Vu qu'une fois et pas sur que l'auteur veuillent allez quelque part, si ce n'est faire un morceau de cinéma avec de superbe images qui bougent et qu'on peut contempler tel une toile de maître. Et ma musique accompagne très bien le tout en effet.

En fait, le scénario est presque secondaire et l'on pourrait presque rester à regarder certains passages en les appréciant tout autant, juste en se laissant porter par les images et la musique.

Donc Bigbonn a bien fait de faire une chronique de ce film d'animation assez méconnu !

[princesse.rosebonbon]

oui mais la ligne éditoriale de psychovision est très stricte à ce sujet :

[sigtuna]

Encore heureux qu'il y ait des regles, même si je trouve celles là un peu laxiste.
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[Stegg]

Aucun règlement ne résiste à Totoro et au chat bus.