Pirates du métro, Les
Titre original: The Taking of Pelham One Two Three
Genre: Polar , Thriller
Année: 1974
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: Joseph Sargent
Casting:
Walter Matthau, Robert Shaw, Martin Balsam, Hector Elizondo, Earl Hindman, James Broderick, Dick O'Neill, Lee Wallace, Julius Harris...
 

Quatre hommes habillés de façon identique (lunettes, gabardine grise, fausses moustaches, chapeau ou casquette anglaise) attendent le métro à l'une des stations de Pelham Bay dans le Bronx. Bien que dispersés, ils montent tour à tour dans la rame. A peine le métro démarré, le conducteur est mis en joue. Un homme qui répond au nom emprunté de Mister Blue (Robert Shaw), accompagné de Mister Green (Martin Balsam), lui demande d'arrêter son train plus loin sous terre. Les deux autres acolytes sont dans le wagon précédent. Il s'agit de Mister Grey (Hector Elizondo) et de Mister Brown (Earl Hindman). Ces deux là s'assurent que personne ne fera de grabuge à l'arrière durant le détachement du wagon, lequel va rapidement être pris en otage.

Très vite, les aiguilleurs sont alertés par le panneau de contrôle des drôles d'allers et retours du métro. Très vite aussi, la revendication de nos preneurs d'otages tombe : un million de dollars dans l'heure, sinon quoi ils abattront de sang froid les otages, ce, les uns après les autres.
Durant ce temps, les passagers des autres rames sont évacués, tandis que le chef de station (Tom Pedi), un fort en gueule, décide d'aller directement parler aux malfrats. Il sera abattu froidement par Mister Grey, à la fois déterminé et semble-t-il rebelle à toute autorité.
C'est le lieutenant Zachary Garber (Walter Matthau), chef de la sécurité du transit New-Yorkais, qui ne faisait juste passer par là afin de montrer à un groupe de japonais le fonctionnement de sa sécurité, qui va se retrouver, bien malgré lui, négociateur de l'affaire en même temps que de tenter de coincer les pirates...

 

 

Ne prenons pas de voies détournées... "Les pirates du métro" est un petit sommet de polar des années 70 ! On le doit à Joseph Sargent, réalisateur solide, issu de la télévision et qui avait déjà étonné quatre années auparavant avec son "Cerveau d'acier", fable corrosive sur une prise de pouvoir mondiale par un superordinateur. Si celui-ci fait mouche une fois encore, il ne faut pas oublier qu'avant d'être un film, "The Taking of Pelham One Two Three" est une nouvelle de John Godey. Une nouvelle semble-t-il assez brillante ou tout du moins porteuse, puisque trois fois adaptée ; une fois pour la télévision en 1998 par Félix Enríquez Alcalá avec Edward James Olmos et Vincent D'Onofrio, une autre fois, plus récemment et de manière ridicule et vaine, par un Tony Scott on ne peut moins inspiré, qui a sans doute voulu d'avantage rendre hommage au film de Sargent que réadapter la nouvelle originale. Raté ! Mais passons... Après la nouvelle, il y a ici un scénariste de talent, Peter Stone, déjà auteur de quelques écrits et scripts brillants comme, pour les très connus, "Charade" et "Arabesque", deux variations hitchcockiennes légères de Stanley Donen, mais aussi "Mirages" d'Edward Dmytryk ou encore "Jigsaw" de James Goldstone. A cet égard, le scénario de Stone (rien à voir avec le tâcheron Oliver) est un petit modèle de concision. Il n'y a rien, strictement rien à y enlever, ce qui me fait dire dans un même temps que si la mise en scène de Sargent y est nerveuse à souhait, celle-ci sert un support au préalable où les chutes de rythme n'ont pas lieu d'être. D'ailleurs ces "Pirates du métro" n'en recèlent aucune, ils avancent à toute allure, foncent droit devant, un peu comme une rame sans conducteur si j'ose dire. Pas étonnant, donc, que Peter Stone fut nominé en 1975 aux Writers Guild of America en tant que meilleur scénario adapté d'un autre support.



Après quelques démêlés avec les transports new-yorkais, qui craignaient qu'un tel film puisse inspirer des criminels en puissance, il fut finalement tourné dans la station Court Street, au Sud de Brooklyn. On envisageât un temps, derrière la caméra, Steven Spielberg, lui-même aux commandes d'un très bon "The Sugarland Express", pour se rabattre sur Joseph Sargent, sans doute jugé légèrement plus expérimenté.
Bingo ! Sargent relève haut la main le défi ardu de balancer une pellicule dans laquelle s'entremêlent polar urbain et suburbain, thriller, le tout mâtiné de film catastrophe (voir le dernier segment que je ne dévoilerai pas pour ceux qui ne l'auraient encore vu), dans une totale possession de ses moyens. La direction d'acteurs y est irréprochable et le tout est teinté d'ironie, de situations et dialogues humoristiques assez salés. Il faut voir la description du maire de NY très calculateur, campé par Lee Wallace, où bien encore la façon dont certains agents au sein du poste de contrôle font passer l'esprit de vengeance avant tout, oubliant parfois même la vie des passagers. De même pour notre "héros" Walter Matthau, si loin d'être sympathique, que nous serions quasi prêts à prendre fait et cause pour nos vigoureux et dangereux preneurs d'otages. La mise en place de la prise d'otages au sein de la station est un modèle de réglage cinématographique. Un exploit d'autant plus mémorable qu'une fois de plus, l'accoutrement de nos gaillards qu'on croirait clonés from London achève d'offrir son léger décalage humoristique au sein d'une scène de pure tension.



Que dire également d'une telle distribution au sein de laquelle brillent quelques stars, mais aussi quelques seconds plans dont aucun n'est délaissé ? Joseph Sargent offre là un rôle en or à Walter Matthau dans un contre-emploi, un Matthau trop souvent confiné dans la comédie et qui aura laissé son empreinte dans trois polars haut de gamme de l'époque, "Charley Varrick" de Don Siegel bien entendu, mais également "Le flic ricanant", l'une des réussites notables de l'inodore Stuart Rosenberg ("Amityville"). A la fois politiquement borderline et malicieux, il y est stupéfiant. Non moins stupéfiant et charismatique, Robert Shaw compose un personnage d'ex mercenaire désabusé qu'il est difficile d'oublier. De même pour Martin Balsam, qui démontre une fois de plus qu'il peut tout jouer avec une palette de registres assez considérable (voir le final). Pour rester dans le clan de notre quatuor de pirates (ceux-ci sont nommés par des couleurs, idée reprise plus tard par Tarantino pour son "Reservoir Dogs"), si Earl Hindman semble le personnage le moins marquant, il n'en demeure pas moins le plus attachant. Quant à Hector Elizondo en Mister Grey, il campe à la perfection l'antithèse de Mister Blue (Robert Shaw) avec certains moments de tensions entre les deux hommes assez mémorables eux aussi ("Dans d'autres circonstances, je vous aurais fait tuer", lui lance Mister Blue, ce à quoi il répond : "c'est bien la différence entre vous et moi, je tue moi-même !").
Dans des seconds rôles, on soulignera la bonne prestation de Jerry Stiller (père de Ben), pour le moins décontractée voire insouciante, de Dick O'Neill dans un rôle de con fini, ou même encore de Julius Harris ("Réducteur de têtes").



"The Taking of Pelham One Two Three" est un film maîtrisé de bout en bout, autant du point de vue de la forme que du fond. Un immanquable des seventies, servi qui plus est par une imparable partition de David Shire. Soit, ce n'est pas une grande rareté puisqu'on peut se le procurer à ce jour à peu de frais en dvd, mais égard à la relecture sans âme aucune d'un Tony Scott sortie il y a peu dans nos salles, il reste indispensable !

 

Mallox

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