Morsures
Titre original: Nightwing
Genre: Epouvante , Agressions animales , Esprits , Sorcellerie
Année: 1979
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: Arthur Hiller
Casting:
Nick Mancuso, David Warner, Kathryn Harrold, Stephen Macht, Strother Martin, Charles Hallahan, George Clutesi...
 

Youngman Duran, l'adjoint du shérif d'une réserve indienne Hopi située au Nouveau Mexique, constate impuissant une série de mutilations meurtrières mystérieuses sur le bétail local. Chevaux, vaches, moutons, aucun animal n'est épargné. Abner Tasupi, un sorcier prônant les anciennes valeurs, convoque Youngman dans sa demeure afin de lui faire savoir qu'il a "rompu le cercle", jetant ainsi un sort supposé amener la fin du monde la nuit à venir. Youngman met d'abord l'attitude du chaman sur l'influence du datura, mais alors que le vieil homme lui annonce sa propre mort durant cette même nuit, Duran le retrouve bel et bien décédé au petit matin.
Pendant ce temps se joue une autre histoire : Walker Chee, le président du conseil tribal, entend faire prospérer la réserve en exploitant des filons pétroliers ; en effet, selon lui, en dynamitant certaines cavernes, on peut planifier des ventes de prospections pétrolières au magnat local, Roger Piggott. C'est à ce sujet même que les deux amérindiens se livrent une guerre sans fin : d'un côté, un jeune indien qui compte sauvegarder le patrimoine de ses ancêtres, considérant que prospecter c'est profaner leur terre ; de l'autre, Walker Chee oppose une vision où la civilisation de l'homme blanc serait économiquement et sanitairement utile aux habitants de la réserve. Mais cette rugueuse opposition va vite culminer dès lors que des chauves-souris, porteuses d'une peste bubonique, commencent à agresser par milliers des être humains...

 

 

Tourné au Nouveau Mexique, à la fois à Albuquerque, Santa Fe et Cubero, Nightwing se base sur un roman éponyme signé Martin Cruz Smith en 1977. Evidemment, sans remettre en question l'originalité dudit roman, il n'y a qu'à voir le résultat à l'écran pour capter rapidement qu'il s'agit à la base d'un pur rip-off du Jaws de Spielberg, reprenant, animaux ailés aidant, les vieilles recettes initiées par Hitchcok pour "Les oiseaux". Le plus étonnant, finalement, n'est pas tant l'existence d'un tel roman ou d'un tel film mais le fait que son réalisateur, Athur Hiller, ait été choisi par la Columbia Pictures pour mettre en scène un script signé par l'auteur de roman lui-même, ainsi que Steve Shagan ("Le voyage des damnés", "La formule") et Bud Shrake. Etait-ce bien raisonnable de confier ce projet au réalisateur très hétéroclite de l'efficace "Tobrouk, commando pour l'enfer", de l'ineffable "Love Story", du corrosif et singulier "L'hôpital" ou encore du fort distrayant thriller-catastrophe "Transamerica Express" ? La question se pose forcément à la vision du film.

Soit, on arpente ici les même terres que les exploitations de l'époque, Morsures faisant sans conteste partie de la même famille que Grizzly, The Pack ou Piranhas pour ne citer qu'eux. Le problème est qu'il apparaît aussi très vite comme un produit bâtard dans lequel le pensum sur la condition indienne dans les réserves prend le dessus sur l'épouvante à base d'agressions animales. De ce fait on se retrouve, à la vision de Morsures, avec le sentiment de regarder deux films en un...

 

 

En effet, l'irruption de chiroptères vampires, bien qu'étant le fruit du vieux chaman de la tribu des Hopi, semble constamment évoluer en parallèle d'une autre histoire : celle des antagonismes entre une vision réactionnaire des réserves indiennes et une autre plus progressiste. A ce sujet, il n'est du reste pas moins aisé de constater l'apport du scénariste Bud Shrake qui signera l'année suivante l'excellent scénario de l'éclaireur indien Tom Horn. Seulement, entre deux batailles pour faire valoir ses arguments, on oublie ici trop souvent la partie action. De par son assimilation de la communauté indienne au thriller surnaturel, Morsures se retrouve également mis à mal au jeu des comparaisons : difficile de ne pas se souvenir que deux ans plus tard, Michael Wadleigh en dira autant sans tomber dans le discours pompeux avec son magnifique Wolfen. On peut rajouter que même un Ken Russell exploitait mieux son sujet sur la quête d'identité (les psilocybes peuvent ici être remplacés par le datura, omniprésent) avec son très baroque Au-delà du réel. Autant dire qu'à le classer dans cette mouvance aussi bien que dans la pure exploitation animalière, Nightwing se retrouve en mauvaise posture et échoue sur les deux plans, d'autant que le film manque cruellement de rythme.

 

 

Il n'y a pas ou peu de reproches à faire aux acteurs : Nick Mancuso (Le bateau de la mort) est plutôt convaincant à naviguer entre deux conceptions d'un nouveau monde indien. Son alter ego et rival, campé par Stephen Macht ("Galaxina"), s'en sort également très honorablement, parvenant à faire passer ses idées de manière sobre et fluide. Reste que le personnage campé par David Warner, malgré le talent de l'acteur, a du mal à convaincre et tient du pâle copié/collé de Robert Shaw ; il faut le voir expliquer les raisons de sa haine pour les chauves-souris vampires, pourquoi elles sont le mal incarné dans ce monde pour comprendre qu'à ce niveau, personne à l'écriture ne s'est foulé. Finalement, Arthur Hiller tombe dans le piège du film à thèse puis dans le pur pensum sur l'identité indienne, délaissant le plus souvent l'action pour des explications qui semblent annexes. Le suspense s'en trouve écrasé, anéanti parfois même, juste après une ouverture et mise en bouche prometteuses. Il est de plus trop facile de compter les moments forts de cette pellicule assez platement filmée : l'entame, ensuite une superbe scène de terreur mettant en lice Kathryn Harrold ("Le contrat" de John irvin), l'amie de Youngman Duran qui se retrouve agressée de nuit avec quatre autres personnes dans sa voiture, ainsi qu'un pré-final un peu moins impressionnant bien que potable, à base de choc électrique, et puis au film de se finir de manière un peu fadasse, laissant sur sa faim à bien des niveaux.

 

 

Les effets spéciaux de Carlo Rambaldi ont beau être un peu cheap, jouant sur la transparence, ils passent néanmoins suffisamment bien pour rendre le peu de scènes d'épouvante plus que fréquentables, idem pour la subtile partition de Henri Mancini. Mais il est dommage que le danger, qui aurait dû être de chaque instant, réussisse le tour de force de se faire oublier, faute à trop de discours.
Une chose étonne cependant à la vision de Morsures : les morts ne sont pas forcément le fait de nos chiroptères déchaînés, mais très souvent de l'être humain lui-même : ainsi une jeune femme meurt brûlée vive dans un feu de camp sans personne pour lui venir en aide, une autre femme se voit refuser de se faire ouvrir la porte de la voiture pour ensuite carrément se faire rouler dessus par le conducteur paniqué ; quant à notre chercheur, spécialiste ès chiroptera, il faut le voir électrocuter malencontreusement le dénommé Duran lors d'une attaque finale à demi-convaincante.

En l'état, Nightwing tient plus de la curiosité de voir un réalisateur, un peu à l'instar de John Frankenheimer et son Prophecy, perdu dans un genre qui lui sied très moyennement, ne parvenant pas vraiment à le marquer de son empreinte.

 

 

Mallox

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