Apache, L'
Titre original: Cry for me, Billy
Genre: Western , Drame
Année: 1972
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: William A. Graham
Casting:
Cliff Potts, Xochitl (Maria Potts), Harry Dean Stanton, Don Wilbanks...
Aka: Apache Massacre
 

Billy Williams est un chasseur de primes lassé de son existence, bien qu'encore jeune. Il débarque un jour dans un petit village où il retrouve Luke Todd, un ami d'enfance qui exerce la même profession. Avec le temps, leur amitié s'est transformée en rivalité, surtout de la part de Luke, obligé de reconnaître que Billy est un tireur d'élite meilleur que lui. Malgré cette relative jalousie, Todd ne reste pas indifférent aux difficultés matérielles de son compagnon, et lui propose un job bien payé dans une autre ville.
Mais pour l'heure, Billy semble plus concerné par un groupe d'Indiens fait prisonniers par l'armée américaine. En allant leur donner de l'eau, il s'est mis à dos les confédérés, même si ces derniers ont préféré éviter un affrontement. Peu de temps après, les Apaches tentent de s'évader. Il en résulte un véritable massacre. Seuls trois d'entre eux parviennent à s'échapper. Parmi eux, Little Sparrow, une Indienne à qui les Blancs ont arraché les vêtements mais qui est parvenue néanmoins à prendre la fuite. Une chasse à l'homme ne tarde pas à se mettre en place, c'est le moment que choisit Billy pour également quitter le village, laissant Todd seul dans le saloon avec son verre de whisky. Avant de partir, Billy s'est interposé devant le forgeron du village qui voulait achever un Indien à coup de masse.
Le chasseur de primes parcourt les étendues sauvages. Il rencontre trois des soldats et les envoient sur une fausse piste. Lors d'une halte, il aperçoit Little Sparrow. L'Indienne essaie de s'échapper, puis de se défendre. Finalement, Billy parvient à la neutraliser. Il tente de la rassurer, soigne son pied blessé durant l'évasion. Le plus dur reste à faire désormais, c'est-à-dire survivre au milieu d'une nature aussi belle qu'hostile, en étant traqué par des hommes encore plus hostiles. L'eau et la nourriture vont bientôt manquer, mais malgré des conditions extrêmes de survie, les deux fugitifs vont trouver au sein de cette nature une forme d'Eden, vont apprendre à se connaître, puis à s'aimer. Une liaison qui va à l'encontre des lois et de la morale édictées par l'Homme Blanc, qui n'aura dès lors qu'un seul but : mettre fin à leur bonheur éphémère.

 

 

Après plusieurs décennies dans lesquelles le western américain s'est acharné à dépeindre les Indiens comme des sauvages et des brutes sanguinaires, un tournant s'est amorcé à la fin des années 1960. Un film comme "Willie Boy" (réalisé par Abraham Polonsky en 1969), par exemple, a ouvert la voie d'un nouveau western dans lequel les Américains reconnaissaient la douleur des Indiens en butte au racisme ordinaire. "Little Big Man" (Arthur Penn, 1970) proposait aussi une relecture de la mythologie du far-west, une œuvre tout aussi révisionniste dépeignant les Etats-Unis sous un jour moins glorieux, mais plus conforme à la réalité.
Moins connu mais allant dans ce même courant, en y ajoutant une touche écologique (la communion de l'homme avec la nature) à la manière d'un "Jeremiah Johnson" (avec encore Redford, militant de la cause indienne) ou d'"Un Homme nommé Cheval", "L'Apache" est une œuvre délibérément pessimiste, dans laquelle l'être humain est décrit sous son jour véritable, ses faiblesses et ses défauts mis en exergue. Plus qu'un western "anti-blanc", "L'Apache" peut être vu comme un film "anti-homme". Car si l'on excepte le personnage de Billy, qui est parvenu à sublimer son existence de mortel, et celui de Little Sparrow, victime expiatoire de la cruauté de ses soi-disant semblables, les autres ont mérité leur ticket pour le purgatoire. Ou pour l'enfer, comme ces soldats confédérés qui partagent avec les habitants de la petite ville une haine viscérale des Indiens, mais qui ne réfutent pourtant pas l'idée de violer une squaw, même si celle-ci "pue", pour reprendre leur vocabulaire. A lui seul, le sergent qui commande la troupe des confédérés condense tout ce que l'on peut trouver de pire chez l'homme, allant jusqu'à abattre un cheval parce qu'il est trop vieux pour être utile. Cette scène se déroule lorsque les militaires ont retrouvé les deux fugitifs. Billy, blessé et attaché contre un arbre dans une pose "christique", assiste impuissant au viol collectif de Little Sparrow. En agissant ainsi, les soldats souillent non seulement la femme, mais aussi la nature. Ce qui aurait pu demeurer un havre de paix pour les amants s'est transformé en cauchemar, est devenu une douleur autant physique que morale, et restera ancrée de façon indélébile en chacune des victimes.



"L'Apache" est une œuvre d'une noirceur absolue. On peut la rapprocher en cela du "Soldier Blue" de Ralph Nelson, dans laquelle Peter Strauss campait aussi un personnage totalement désabusé. Là, le héros a pour nom Cliff Potts, acteur méconnu mais qui joue son rôle à la perfection. On le verra la même année dans le "Silent Running" de Douglas Trumbull. Le personnage de Billy Williams est intéressant à plus d'un titre. Bien qu'étant le meilleur des pistoleros, il n'abuse pas de son talent et n'utilisera son arme qu'en situation extrême. L'occasion ne se présentera d'ailleurs qu'une seule fois dans le film, quand il retrouve les confédérés lors d'un bivouac dans la forêt enneigée. Une scène nocturne où Billy liquide ses ennemis dans une quasi obscurité, comme si le réalisateur avait voulu faire de ces ordures de simples ombres anonymes, ne méritant pas de mourir glorieusement, et nous signifier que le mal n'a pas de visage dans la mesure où il se trouve en tout lieu.
L'actrice incarnant Little Sparrow, Maria Potts, est sa femme. Elle tournera dans seulement quelques films sous le pseudonyme de Xochitl ("fleur" en langage aztèque).
L'acteur le plus connu du film est évidemment Harry Dean Stanton, que l'on voit au début et à la fin du film. C'est probablement le personnage le plus proche de nous, et dont les faiblesses le rendent attachant. Il est jaloux de son ami, mais en même temps il souhaite l'aider. D'un autre côté, sa lâcheté l'empêche de prendre parti pour Billy. De même qu'il reste neutre, il est seul au début du film, et encore seul à la fin. Une manière de démontrer que sans idéal, l'existence est vaine.

 

 

"L'Apache" est sorti en France en 1976, dans un anonymat quasi général. La même année, un western italien a été tourné, présentant une histoire similaire à l'œuvre de William Graham : "Apache Woman", avec Al Cliver. Il serait bon de donner une nouvelle chance à un film dont le caractère résolument nihiliste contraste avec le cinéma d'aujourd'hui. Une négation des valeurs qui ne vaut pas pour "L'Apache".


Note : 8/10

Flint
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