Le Prix Nebula du meilleur roman 2009, le Prix Hugo du meilleur roman 2010, le Prix Locus du meilleur premier roman 2010, le Prix John Wood Campbell Memorial 2010, le Prix Bob-Morane 2013 ainsi que le Grand prix de l'Imaginaire 2013... "La Fille automate", premier roman de Paolo Bacigalupi, n'en finit plus de récolter des prix et de se faire remarquer partout où il est traduit et publié. Un succès incontestable donc !

Au début des années 1980, des auteurs comme William Gibson, Neal Stephenson et Bruce Sterling lançaient le cyberpunk avec des romans comme "Neuromancien" ou "Le samouraï virtuel", prophétisant un monde où l'informatique et les multinationales serait partout, véritable cauchemar orwellien devenu réalité. Mais à l'aube du nouveau millénaire, les peurs ont changé et la génétique est le nouveau monstre comme on va le découvrir avec La Fille automate.
Pourquoi cette comparaison entre un genre et un roman qui n'ont a priori rien à voir ? Celles d'avoir des peurs en commun, celles des multinationales et surtout au-dessus des lois, massacrant la terre en introduisant de nouvelles espèces animales et des graines transgéniques aux effets nocifs, mais permettant les bénéfices. On y trouve aussi ce qui ressemble à des hackers, manipulant ici des bases de données génétiques.
C'est d'ailleurs un nouveau fruit apparu mystérieusement en Thaïlande qui va mettre Anderson, un agent des compagnies caloriques officiellement venu s'occuper d'une usine de piles révolutionnaire sur les traces d'une banque de données et d'un scientifique. Désireux de trouver cette poule aux oeufs d'or, il va trouver face à lui des chemises blanches, des policiers veillant à ce qu'on n'importe pas de produit illégaux dans leur pays.
Dans les produits interdit, il y a les automates, des individus dont le caractère est programmé génétiquement pour faire la guerre ou faire du personnel obéissant. Parmi ce nouveau peuple comme il s'appelle, on trouve Emiko, une créature qui ne peut se rebeller, entièrement soumise aux viols et aux humiliations qu'on lui fait subir dans le cloaque où elle a atterri, attendant de pouvoir s'enfuir de ce pays où on l'a déteste.
La fille automate est ainsi un roman mettant en scène de multiples personnages dans une Thaïlande hésitant encore tradition et modernité, entre un passé disparu et un avenir effrayant, où les japonnais jouent aux apprenti-Frankenstein pendant que l'occident essaye de s'enrichir en vendant aux prix fort des calories, véritable monnaie dans ce monde où l'ingénierie a déjà dévasté la Terre et provoqué des famines.
Dans la ligné des coups de poings donné par Norman Spinrad ou John Brunner en leur temps, La Fille automate nous plonge dans un nouvel enfer où la nourriture sera devenue l'enjeu de la guerre que se livreront gouvernement et industrie surpuissante à coup de corruption et de loi. C'est également au Fleuve des Dieux que nous fait penser ce roman, ne serait que par son décor et l'utilisation faite de la culture et de l'histoire de deux pays, presque voisin.

Au final, les prix sont mérités, car ce roman est un choc et annonciateur de ce qui nous attend d'ici quelques années, si on laisse certaines industries de biotechnologies poursuivre leurs expériences sans garde-fou. Un roman d'anticipation qui mérite donc bien ce titre et qui en plus de ses prévisions n'oublie pas de mettre en scène des personnages avec leurs peurs et leurs attentes, sans aucun manichéisme. Un grand roman donc !

Note : 9/10

 

Stegg

 

A propos de ce livre :

 

- Site de l'auteur : http://windupstories.com/

- Site de l'éditeur : http://www.jailu.com/