Impossible témoin, L'
Titre original: Hide in Plain Sight
Genre: Drame
Année: 1980
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: James Caan
Casting:
James Caan, Jill Eikenberry, Robert Viharo, Joe Grifasi, Barbra Rae, Kenneth McMillan, Josef Sommer, Danny Aiello, Thomas Hill, Chuck Hicks, Andy Fenwick, Heather Bicknell, David Clennon, Peter Maloney, Ken Sylk...
Aka: Disparition commandée / Protection du FBI
 

1967, Buffalo, dans l’État de New-York. Séparé de sa femme, Thomas Hacklin s'est vu confier la garde de leurs deux enfants. Junie, son ex-épouse, est tombée amoureuse d'un certain Jack Scolese, un petit gangster qui s'apprête à participer à un hold-up. Mais l'opération tourne mal et Jack se voit offrir une remise de peine s'il accepte de témoigner contre ses complices. Le truand accepte et se retrouve bientôt placé au cœur d'un programme de surveillance pour témoins. Il s'installe en compagnie de Junie qui souhaite récupérer la garde de ses enfants. Elle décide de les emmener à l'insu de son ex-mari. Quand Thomas comprend qu'ils ont été enlevés, il se lance à leur recherche...

 

 

On connaît parfaitement James Caan acteur. Après de nombreuses apparitions dans des séries des années 60, c'est Walter Grauman qui lui donne sa chance pour "Une femme dans une cage" (Lady in a Cage, 1964). Une chance pas si facile à saisir puisqu'il affrontait dans ce thriller horrifique un monstre, mastodonte du cinéma : Olivia de Havilland. Bien que la star bouffait tout l'écran, cela suffit à Caan pour être remarqué par l'un des grands réalisateurs de Hollywood, Howard Hawks, avec qui il tournera successivement deux films : "Ligne rouge 7000" (Red Line 7000, 1965) puis "El Dorado" (1967), remake de "Rio Bravo" où il est pris en sandwich par John Wayne et Robert Mitchum, rien que ça ! Sa carrière est en tout cas lancée et, dès lors, on le retrouve chez Altman ("Objectif Lune"/Countdown,1967 ), chez Curtis Harrington ("Le diable à trois"/Games, 1967) ainsi que, déjà, chez Coppola ("Les gens de la pluie"/The Rain People, 1969). Sa carrière explose complètement dans les années 70 avec son rôle de Sonny Corleone dans "The Godfather", précédant des collaborations avec Karel Reisz ("The Gambler", 1974), Norman Jewison ("Rollerball", 1975), Sam Peckinpah ("The Killer Elite", 1975) etc. Il enchaînera même après ce coup d'essai derrière la caméra en tournant dans le premier long-métrage de Michael Mann, "Le solitaire" (Thief, 1981).

 

 

Hide in Plain Sight est un projet confié par la MGM à l'acteur, reconnu alors. Avec l'appui toutefois consistant de son ami Francis Ford Coppola et ses Zoetrope Studios. Il semblerait, en tout cas à en croire Caan lui-même, que jamais les producteurs n'aient eu foi en son film qui, pourtant, lui tenait à cœur.

A l'écran, cette histoire kafkaïenne, inédite et totalement ahurissante, semble pâtir d'un manque d'investissement mais trouve paradoxalement sa force grâce à un recul tout intimiste, loin du manichéisme et des effets faciles. Thomas Hacklin n'est pas à proprement parler un homme sympathique : patriote, il n'est ni "un pédé", ni "un putain de hippie", "il aime son pays". C'est là que la charge de L'impossible témoin, loin d'être dirigée contre la mafia, se fait la plus efficace : elle montre un homme ordinaire confronté à un événement qui dépasserait l'entendement pour tout un chacun. Pas d'excès lacrymal, ni de pamphlet anti-système.

Dans un premier temps, Hacklin est victime d'un effet de surprise. Ses gosses dont il a la garde ont disparu, son ex-femme avec. Il cherche à en comprendre les raisons et doit, pour cela, se montrer brutal, à la limite de l'illégalité. Après tout, il s'agit d'un programme secret de protection puis de délocalisation de témoins, négocié par le gouvernement même. Enfin, dans sa dernière ligne droite, cet ouvrier moyen, discret, rigide dans ses convictions, mais a priori peu porté sur les rapports de force, se retrouve, pour récupérer son droit, à enfoncer les portes de la bureaucratie et de la loi, puis à traquer une famille au main d'un ancien criminel, quand bien même repenti. A ce propos, on peut regretter le traitement chargé dont fait preuve Caan à l'égard de celui-ci, jusqu'à se demander en tant que spectateur ce que sa femme fiche avec, alors qu'il ne cesse de l'insulter puis de la maltraiter.

 

 

De fait, il est difficile de faire preuve d'empathie pour les personnages de Hide in Plain Sight. L'implication émotionnelle s'en trouvant annihilée, on reste avec un sentiment étrange de frustration. Toute la rage contenue en arrière-plan de L'impossible témoin n'explose que par paliers : le téléphone et la machine à écrire d'une secrétaire jetés dans bureau fédéral, un confrontation explosive entre Hacklin et l'ancien mafieux puis, enfin, un poing levé, ultime menace d'un homme acculé à la violence se retrouvant sur le banc des accusés.

James Caan, derrière la caméra, semble hésiter quant au chemin à prendre et, du coup, ne s'en tient qu'au seul fait divers. Hide in Plain Sight est un peu à l'image de la nouvelle compagne de son personnage principal, campée par Jill Eikenberry : enceinte, on ne sait pas trop ce qu'elle pense et, surtout, on ne la sent jamais touchée de près par l'aberrante histoire dont est victime son homme (et les enfants de celui-ci).

On est gré à James Caan de nous épargner le mélodrame, tout comme d'éviter de faire de cette édifiante et improbable affaire, un tremplin pour prestation oscarisable, mais l'on peut aussi lui faire procès de ne pas aller au fond de son sujet, quitte à faire voler en éclats les institutions, judiciaires comme d'état.

 

 

Finalement, on assiste à la naissance, sous péridurale, d'un réalisateur qui emprunterait les personnages de Martin Scorcese pour les emmener tour à tour chez John Cassavetes puis Sidney Lumet (*). S'il n'atteint pas le niveau de ces illustres modèles, James Caan, ne serait-ce que pour sonder plus profondément sa sensibilité, aurait mérité meilleur accueil et surtout une seconde chance derrière la caméra.

 

Mallox



En rapport avec le film :

(*) A propos de Sidney Lumet, il est à noter que "Hide in Plain Sight" est l'adaptation d'un roman de Leslie Waller, auteur (non crédité au générique) du fameux "Dog Day Afternoon" (1975).

# L'actrice Anne Helm a également un petit rôle dans le film (une secrétaire). Rappelons qu'elle jouait la "princesse en péril" dans L'épée enchantée de Bert I. Gordon. On a aussi pu la voir dans le Nightmare in Wax de Bud Townsend.

# Sorti au cinéma en France, uniquement en province, sous le titre "L'Impossible témoin", le film de James Caan a été édité en VHS, chez RCV, puis chez MGM/UA Home Vidéo, sous le titre "Disparition commandée".
(Sur VHSdb)

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