Cynique, l'infâme, le violent, Le - The Ecstasy of Films |
Écrit par Mallox |
Région : Zone 2 PAL (dvd) - Zone B (blu-ray)
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Commentaire : Umberto Lenzi jouit d'une belle côte chez les amateurs de cinéma d'exploitation et, plus encore, chez les férus de poliziesco. Du coup, il va de soi que la sortie en France de Le cynique, l'infâme, le violent, dans un magnifique combo proposant une version restaurée, en formats dvd et blu-ray, est une aubaine. L'image est remarquable, dotée d'un piqué et de contrastes rehaussés respectant au plus près l’œuvre originale. Quelques scories neigeuses ici et là viennent de manière anecdotique rendre hommage au charme vintage du film. Au niveau sonore, la piste française est un peu plus sourde et moins ample que la piste italienne. On privilégiera tant qu'à faire cette dernière même si la piste française n'a rien de honteuse. Sa présence est même fort appréciable et rend un hommage déviant à une époque où la post-synchro italienne avait quelques boulons dans sa mécanique, se gaussant d'un futur mouvement geek aussi révolutionnaire qu'une machine à laver Calor.
Armed to the Teeth Again permet de retrouver Umberto Lenzi qui fait part de son admiration pour le film noir hollywoodien des années 40 et l'influence que ce cinéma eut sur le sien. Preminger, Jules Dassin, Ulmer, Walsh, des films qui furent pour lui une véritable formation cinématographique. Il rappelle comment le cinéma italien est très organisé par genres et comment le giallo, avec ses rapports hypocrites entre les individus et son érotisme naissant, fut un tremplin pour lui avec Orgasmo qui connut un succès en salles. Il rappelle que c'était aussi un genre qui permettait alors de lutter contre la société de consommation. Le cinéaste considère par ailleurs qu'Une folle envie d'aimer, Paranoia et "Si douces, si perverses" font partie de ses meilleurs films. Mais son premier film vraiment noir demeure "La Guerre des gangs" (Milano Rovente, avec Antonio Sabato et Philippe Leroy), produit par des industriels milanais. On y trouvait une ambiance des bas-fonds de la ville très réaliste. Umberto Lenzi regrette de n'avoir finalement tourné qu'un seul film de ce genre, qu'il qualifie de "à la Jean-Pierre Melville". Il fait ensuite un tour d'horizon de sa carrière et évoque sa "glorieuse" période au sein du poliziottechi. Plutôt lucide, il considère Brigade spéciale et La Rançon de la peur comme étant objectivement ses deux meilleurs travaux, même s'ils ne sont pas ses préférés. Quant au Cynique, l'infâme, le violent, il rappelle que le film est aussi une erreur de calcul de la part du producteur qui s'était mis en tête que ce serait un film sur un casse et l'obligea à mettre sur le clap de tournage un autre titre : "Ensemble pour un grand casse" (Insieme per una grande rapina), titre que l'on retrouve sur la bande-annonce d'origine.
Re-Armed to the Teeth est une interview de Tomas Milian réalisée par 441 Films et 88 Films. On retrouve l'acteur vieillissant faisant preuve d'humour en début d'entretien pour se faire plus sérieux ensuite. Plutôt nostalgique, il revient sur sa carrière en Italie et son approche de son métier de comédien. Milian considérait chaque nouveau rôle comme son meilleur mais devait se trouver un doubleur à cause de son accent. Il revient sur ses rapports avec Lenzi qui selon lui détestait devoir le diriger à cause de son caractère d'électron libre, parfois habité par ses rôles, habitude issue de sa formation Actor Studio. Mais Umberto Lenzi y était contraint, Milian étant une star à l'époque en Italie. Finalement Lenzi tournait plus pour Milian que Milian pour Lenzi. Mais chaque fois les deux hommes trouvaient un équilibre dans le compromis, même si à écouter Milian, Lenzi devait rentrer chez lui le soir en le maudissant. Un bonus sympathique lui aussi, bien que court, où l'acteur cubain revient sur sa timidité et comment jouer des rôles de fils de pute le conditionnait mentalement et émotionnellement, l'aidait à se relaxer dans la vie réelle, à s'y montrer moins agressif.
Je suis la violence est un entretien avec John Saxon tourné par Film Art. L'acteur évoque la fameuse scène de golf dont il se souvient parfaitement puis parle assez longuement de Tomas Milian pour qui il semble avoir beaucoup d'admiration. Il le retrouvera plus tard dans "Raid sur Entebbe" après que Milian soit revenu habiter à Miami et se soit procuré le numéro de téléphone de John Saxon. Il se montre plus circonspect à propos de Maurizio Merli qui parlait de lui à la troisième personne et qu'il qualifie "d'amusant" et de personne qui planait un peu, avec une confiance extrême en lui-même et en son talent. Quant au réalisateur, il le décrit comme étant constamment en colère, en train de crier, mais aussi comme quelqu'un qui travaillait très durement. D'origine italienne, John Saxon rappelle que son premier film dans ce pays fut "La Fille qui en savait trop" de Mario Bava (suite logique de "Confidences sur l'oreiller"). La petit cerise sur le gâteau niveau anecdote est que l'équipe du film, qui devait ensuite tourner en Russie, angoissait à l'idée de ce qu'elle allait bien pouvoir manger là-bas !
Franco Micalizzi n'est pas seulement un compositeur prolifique, c'est aussi une vraie cantatrice doublée d'une pipelette, ce dont on ne se plaint pas car celui-ci nous lourde trente-cinq minutes de mots qui slament. Évidemment, à lui poser des questions sur la provenance de sa passion pour la musique, il n'est pas étonnant que dans Conversation avec Franco Micalizzi, ce dernier nous débite sa vie depuis le berceau, âge tendre où, pendant qu'il faisait son rot et gros popo, sa mère chantait sans cesse de vieux tubes italiens. Comment s'en souvient-il ? Si on vous le demande, pensez tout bas que le sieur Micalizzi est un poil mytho, a fortiori lorsqu'il évoque à ce propos "sa première modulation sonore entendue".
Enfin, passons au bonus au titre aussi long que celui d'un film de Damianio Damiani, c'est-à-dire au documentaire Mike Malloy on The Cynic... (and yes) the Rat and the Fist (notez qu'étant payé au mot, seul notre fantomatique grand timonier tirera la tronche devant l'addition). On a posé Mike Malloy (auteur en 2012 du documentaire "Eurocrime! The Italian Cop and Gangster Films That Ruled the '70s") dans une petite pièce toute faite de lattes en bois, avec deux posters encadrés, façon torture porn à venir. Mike prend un air pénétré avant d'effectuer un vif mouvement de tabouret rotatif circulaire assidument répété, cadré alors en gros plan avec derrière lui un moustachu pourvu d'un gros gun en train de tirer son coup. Mike, passé maître es rotation sur tabouret, amorce un autre mouvement vif pour faire un doigt à un John Saxon qui tire un peu la gueule.
Concluons en mentionnant la présence en bonus rab de la bande-annonce originale ainsi qu'en remettant une petite couche de verni : Le cynique, l'infâme, le violent méritait une belle édition en France. Un rêve vigilant(e) devenu réalité grâce à un travail complet, peaufiné, effectué par The Ecstasy of Films. Une collection "Eurocrime" qui, soit dit en passant de façon cynique, mériterait une toute autre audience que celle, infâme, qui lui est pour le moment réservée. À bon(s) entendeur(s), sachez qu'il encore disponible et qu'il vous est fortement conseillé. À titre purement incitatif, sachez aussi que ce beau polar comblera tout à la fois les légalistes, les féministes, les golfeurs et les amateurs de nourriture pour chiens.
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