Soumissions
Titre original: Soft Places
Genre: Porno
Année: 1978
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: Joanna Williams (sous le pseudo Wray Hamilton)
Casting:
Annette Haven, Paul Thomas, China Leigh, John Seeman, John Rolling, Chrissy Petersen...
 

Monique vient d'assister aux funérailles de son mari Michael. Dans la limousine qui la reconduit, assise à côté de Marshall, qui était l'avocat et le meilleur ami de Michael, la jeune veuve se remémore les douloureux souvenirs du passé. Son mari était en effet un homme particulièrement brutal en amour, et qui reprochait à sa femme d'être frigide. Cela explique en partie la teneur pour le moins particulière de son testament, que Marshall fait écouter à Monique par le biais d'un magnétophone à bande, dans son bureau.
Si elle veut hériter de toute la fortune de son défunt mari, Monique devra remplir certaines conditions, accomplir des tâches bien précises que l'avocat sera en mesure de valider. Si elle refuse, elle ne touchera qu'une petite partie des biens de son mari.
A ton tour, tu dois apprendre à aimer librement et passionnément... Voilà en substance ce qu'explique Michael à sa femme depuis l'au-delà, justifiant les épreuves que sa charmante épouse va devoir accomplir si elle souhaite récupérer tous ses biens. Et les épreuves en question se rapportent évidemment à la sexualité de Monique, indigne d'une bonne épouse, à en juger le témoignage posthume de Michael. La jeune femme va devoir aborder sa sexualité sous un angle diamétralement opposé, et se plier à diverses expériences où il sera question de masturbation, d'exhibitionnisme, de saphisme, de sexe avec plusieurs hommes et enfin de soumission à un seul homme.
Choquée, Monique rentre chez elle en se demandant si elle sera capable d'honorer les dernières volontés de son mari. Toutefois, la jeune femme ne tarde pas à se désinhiber...

 

 

Joanna Williams fait partie des rares réalisatrices (s'il s'agit bien d'une femme, aucune information ne circulant vraiment à propos de cette personne) à avoir été en mesure de se faire une place dans l'univers machiste du porno. Cependant, les films de Joanna Williams se comptent sur les doigts d'une main, et parmi ceux-ci, les plus connus demeurent les deux volets de Little Girls Blue. Soft Places, malgré la présence de ses deux stars (Annette Haven et Paul Thomas), ne figure pas vraiment au rang des classiques du porno américain des années 70. Peut-être est-ce dû au fait qu'en dehors des deux vedettes précitées, les autres acteurs de ce film étaient (à l'exception de John Seeman) des inconnus (ou presque) dont les noms tomberont assez vite dans l'oubli ; la plupart, d'ailleurs, ne tourneront pas d'autres films.
Mais la raison principale tient probablement à sa réalisation, dans laquelle les aspects ludiques et excitants du sexe sont délibérément écartés au profit d'autres critères certes ambitieux, mais aussi à double tranchant dans le genre qui nous intéresse. Soft Places décrit l'immersion de son héroïne dans un univers de perversion alternant l'onirisme et la dépravation, la poésie et le glauque. Le spectateur passe également de scènes traditionnelles dans le porno (masturbation de l'héroïne dans un taxi, exhibition dans une cabine d'essayage...) à d'autres qui le sont beaucoup moins (le rêve avec l'homme sans visage, le salon de massage tenu par des hermaphrodites...). De toute évidence, Joanna Williams aime à jouer sur les contrastes, offrant tour à tour à son public une belle séquence d'onanisme mettant en lice Annette Haven sur son lit, puis, plus tard, la même Annette branlant deux poivrots dans un bar crasseux, lieu de rendez-vous de toute une faune d'individus sortis de la Cour des miracles.
En fait, la réalisatrice aurait tendance à privilégier le scabreux et le sordide, et son film n'offre que très rarement des moments affriolants, susceptibles d'émoustiller les sens. D'une certaine manière, l'ambiance tantôt glauque (le bar avec les clochards), tantôt étrange (le rêve de Monique) anticipe les futures œuvres de réalisateurs comme Francis Delia et Gregory Dark. L'atmosphère qui règne dans Soft Places rappelle en effet le climat de certains films qui verront le jour quelques années plus tard, parmi lesquels "Night Dreams", "Cafe Flesh" et "New Wave Hookers".

 

 

Et si la réalisatrice conclut la descente aux enfers de son héroïne d'une façon assez convenue, par une scène classique hétérosexuelle entre les deux principaux protagonistes (les deux "adversaires" se réconcilient sur l'oreiller – une scène a priori banale mais non exempte de symboles, lorsque la veuve désormais joyeuse retire son alliance après l'orgasme et recouvre le dos de son amant des cendres de son défunt mari), le spectateur aura au final une impression mitigée quant au spectacle auquel il vient d'assister. Agrémenté de surcroît d'une partition musicale aux accents dissonants, très expérimentale, Soft Places est un film hard ambitieux mais déroutant et, quoi qu'il en soit, inégal. Et l'on peut imaginer que, sans la présence d'Annette Haven et Paul Thomas, l'oeuvre n'aurait probablement pas été distribuée chez nous (par le biais d'Alpha France). Le film sortira bel et bien dans les salles de cinéma françaises, en trois occasions, et sous trois titres différents (ce qui était monnaie courante à l'époque pour recycler un film et abuser les spectateurs). Tour à tour baptisé Soumissions (1980), Initiation d'une veuve (1984) et Introductions (1985), on se demande quelle impression il a laissé sur un public plus habitué à des produits de "consommation courante".
Avec le recul, on peut estimer qu'aujourd'hui encore, Soft Places est un film autant déstabilisant que décevant par certains aspects, pour lequel Joanna Williams s'est montrée novatrice mais n'a pas été en mesure d'éviter, d'un autre côté, certains clichés ; et dans lequel les scènes de sexe auraient plus souvent tendance à faire baisser la libido que l'inverse. Par contre, la qualité des dialogues et la performance d'Annette Haven et Paul Thomas parviennent à atténuer en partie cette relative déception. A voir, donc, mais plus comme une curiosité, dans la mesure où Soft Places dégage un parfum du début des années 80, pour les raisons évoquées plus haut. Quoi qu'il en soit, avec ce film, Joanna Williams se démarque complètement de Little Girls Blue (alias Sans peur et sans culotte), pourtant tourné la même année.

 

 

Note : 6,5/10

 

Flint

 

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