Piège infernal, Le
Titre original: The Squeeze
Genre: Polar , Drame , Action
Année: 1977
Pays d'origine: Royaume-Uni
Réalisateur: Michael Apted
Casting:
Stacy Keach, Stephen Boyd, David Hemmings, Edward Fox, Freddie Starr, Carol White, Alan Ford...
 

Jim Naboth (Stacy Keach) a tout perdu à cause de son alcoolisme devenu chronique : sa femme Jill (Carol White) qui l'a laissé tomber, ainsi que son travail depuis qu'il a été révoqué par Scotland Yard, où il officiait jadis en tant qu'inspecteur. Jim Naboth n'est donc plus que l'ombre de lui-même, une épave tentant de survivre en tant que détective privé...

Un soir, il reçoit la visite de Foreman (Edward Fox), le nouveau mari de Jill. Celui-ci lui annonce qu'elle et sa fille Christine ont disparu. Les ravisseurs contactent Foreman pour lui demander de fermer les yeux sur un braquage qu'ils prévoient de faire s'il veut revoir Jill et Christine vivantes. Mis au courant, Jim va dès lors agir tout en se désintoxiquant, afin de venir au secours de son ancienne épouse. Aidé par Teddy (Freddie Starr), fidèle homme de main et ami, il identifie maladroitement mais rapidement les ravisseurs : un gang mené par un certain Vic (Stephen Boyd) avec des hommes de main prêts à tout, dont un certain Keith (David Hemmings)...

 

 

Le piège infernal est à l'origine un roman d'un des spécialistes du genre polar, James Tucker, d'origine galloise, dont certains de ses récits sont sortis en France dans la collection Rivages/Noir, ce, sous différents pseudonymes : David Craig, Bill James ou encore Judith Jones. On peut ainsi citer "Le Lapin enragé", "Alerte à la fraîche" ou encore "L'inspecteur est mort". L'un des traits communs de ses écrits est qu'ils s'inscrivent à la quasi-unanimité dans un registre extrêmement violent avec, en toile de fond, des peintures crues et racées de cités en feu, au sein desquelles les gangs organisés non seulement règnent en maîtres, mais qui en plus sont prêts aux actes les plus âpres et cruels qui soient. On rappelle en passant que cet homme, né à Cardiff, fut avant tout journaliste pour le Daily Mirror et le Sunday Times, bien avant de s'improviser romancier. Tout cela pour dire que l'on retrouve clairement dans ses récits ses talents de chroniqueur des villes et de ses multiples faits divers. L'homme écrit encore à ce jour, mais c'était déjà le cas en 1977 avec ce The Squeeze, tiré d'un de ses romans, non édité en France : "Whose Little Girl Are You ?".

 

 

On remarque également au générique, et pour adapter celui-ci à l'écran, un certain Leon Griffiths, lequel commença sa carrière en tant que scénariste dans un horrifique que les amateurs connaissent bien : L'impasse aux violences de John Gilling. Quant au cinéaste qui le met en scène pour le compte de la Warner Bros, on le connaît mieux encore puisqu'il s'agit de Michael Apted. Un réalisateur qui, comme nombre de ses confrères, commença sa carrière à la télévision avant de livrer son premier film en 1972 : "Triple Echo", un drame dans lequel Oliver Reed se travestissait en femme pour déserter avant de rencontrer Glenda Jackson. Le réalisateur est bien entendu connu pour des films plus tardifs tels que "Gorky Park" ou "Gorilles dans la brume". Des films, outre leur relative notoriété, assez décevants, car dotés de mises en scènes quelconques, sans relief particulier.

 

 

Au regard de cette carrière, globalement moyenne donc, et sans aspérité particulière, The Squeeze apparaît au sein de celle-ci comme une espèce de diamant noir. Non pas que "Le piège infernal" soit un film parfait. Du reste, à ce sujet, sa mise en scène alternant nervosité et séquences plus anémiques annonce tous les défauts à venir inhérents au cinéaste ; mais il offre dans son ensemble (ainsi et surtout dans ses meilleurs moments) une plongée assez stupéfiante dans un Londres gangrené par la violence, la déchéance, la vengeance... Une cité demeurant obstinément grise, le tout dans un film noir aux allures crépusculaires qui ne sont pas sans évoquer le "Get Carter" de Mike Hodges et Du sang sur la Tamise que réalisera John Mackenzie trois ans plus tard. Il est en tout cas à classer dans ces polars nihilistes et sans retour que quasiment seuls les Britanniques ont su nous offrir. Ainsi par exemple a-t-on droit à une scène assez dérangeante de strip-tease forcée par les kidnappeurs sur la personne de Carol White. Il semble bien que Michael Apted était alors prêt à tout. Cependant, malgré la force qui se dégage de certaines scènes, Apted en fait peut-être parfois aussi un peu trop...

 

 

Comme dit avant, si la mise en scène alterne fulgurances et une relative platitude parfois, l'ensemble est d'une noirceur et revêt un esprit tant borderline (voir un ex-policier qui, pour faire justice, menace de tirer une balle à bout portant sur une petite fille est quasi inédit au cinéma) qu'il pourra paraître un peu forcé également. Disons qu'à ce niveau, son réalisateur semble surcharger son film de noirceur pour se faire remarquer, en même temps que de donner à sa pellicule du caractère que lui-même n'a pas forcément.

Cependant, grâce à ces partis pris et un final des plus surprenants, il arrive à remporter la partie. Son personnage principal déchu est surchargé de noir tant et si bien qu'il frôle la caricature. Néanmoins, campé par un Stacy Keach au meilleur de sa forme (on pense étonnamment parfois au Patrick Dewaere de "Série noire", autant physiquement que dans le rôle tenu), cela passe tout compte fait pas mal du tout.

 

 

Si Stacy Keach donne du relief au film, il est impossible de rester indifférent à l'incroyable prestation livrée par un Stephen Boyd autant déchaîné que semblant miné de l'intérieur : amaigri, arborant un visage émacié pourvu d'énormes rouflaquettes, on rappelle que l'acteur cassera sa pipe la même année, ce, d'une crise cardiaque, à l'âge précoce de 45 ans. Dans The Squeeze, il en paraît dix de plus au bas mot, distillant le sentiment troublant de n'avoir plus rien à perdre (tout comme le personnage de Jim Naboth de l'autre côté). Quoi qu'il en soit, il est ici le second maillon fort qui contribue à la réussite de ce polar noir comme une cité minière. Le reste du casting n'a pas forcément la même force, mais les interprétations, plus en retrait, de David Hemmings ou de Edward Fox, restent très solides. Il en va de même pour la très électrique présence de Alan Ford qu'on retrouvera d'ailleurs dans Racket.

 

 

En tout cas, même inégal dans ses intentions comme dans le résultat à l'écran, The Squeeze demeure un incontournable des polars urbains britanniques des années 70 qui reste encore à ce jour, à découvrir.

 

Mallox

 

 

* L'affiche française (et ses petites pliures) :

 

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