Pour qualifier "le prince écorché", Stephane Marsan, directeur éditorial chez Bragelonne, parle de "coup de poignard" ou de "coup de poing" plutôt que de coup de coeur : ces images sont parfaitement  bien choisies : ce roman, qu'on l'aime ou qu'on le déteste, ne laissera personne indifférent...

Jorg, presque quatorze ans, a une famille qui peut rappeler les Atrides, en pire... Après quatre années passées sur les grands chemins à la tête d'une petite troupe de mercenaires qu'il appelle ses "frères", l'adolescent décide subitement de rentrer à Chateau-Cime où il sait bien que personne ne l'attend, à commencer par le roi, son père. Sur ce scénario en apparence très simple et peu original, Mark Laurence bâtit une histoire forte, brutale, tragique, dérangeante.

La grande force du roman réside dans ses personnages exceptionnels, à commencer par Jorg, gamin cynique, meurtrier, violeur qui ne respecte aucune loi, aucun code. Il tue indistinctement et sans scrupule, ses amis comme ses ennemis, il n'a aucune conscience et rien ne vient racheter sa conduite. Pire, ses quatorze ans et son visage d'ange ne font que souligner un peu plus l'horreur de ses actes. Et malgré tout on s'attache à ce garçon, on essaie de lui trouver des excuses, on rentre dans son jeu, on accepte sa logique.

Les personnages secondaires évitent également tout manichéisme mais ils sont plus convenus : des mercenaires sans foi ni loi mais qui s'appellent mutuellement "frères", un vieux prêtre bougon, un capitaine de la garde royale tout dévoué à son prince, une princesse au caractère bien trempé qui n'hésites pas à jouer du couteau.

L'univers dépeint par l'auteur semble être de pure fantasy épique : un monde médiéval de royaumes en guerre les uns contre les autres, une époque indéterminée, quelques touches, discrètes, de magie. Et puis surprise : une citation de Plutarque, des indices quand à une chronologie possible, des allusions subtilement distillées jusqu'à des révélations surprenantes...

Un mot enfin sur le style : l'écriture est efficace, percutante, sans fioritures inutiles et fait mouche.

Un très bon premier tome donc, que j'ose comparer, pour son coté "réaliste" et donc imprévisible,  à la saga du trône de fer de Georges Martin. Et surtout un roman non consensuel, qui peut heurter certaines sensibilités mais qui mérite vraiment d'être lu.

9/10

Falline

A propos de ce livre:

Site de l'auteur : http://princeofthorns.com/

Site de l'éditeur : http://www.bragelonne.fr/