Prisonnière du vice
Titre original: Niizuma jigoku
Genre: Erotique , Drame , Roman Porno
Année: 1975
Pays d'origine: Japon
Réalisateur: Akira Kato
Casting:
Naomi Tani, Terumi Azuma, Hiroshi Gojo, Gô Awazu, Moeko Ezawa, Hirokazu Inoue, Eisuke Izumi, Wataru Kobayashi, Ikunosuke Koizumi, Hiroyuki Mikawa, Kunio Shimizu, Namiko Tainaka...
 

"Le corps d'une femme nue ne doit pas être seulement perçu comme un objet sensuel, mais il doit aussi être capable d'exprimer une émotion ; aussi ai-je fait de mon mieux pour conserver au corps de Naomi Tani une condition aussi proche que possible de la perfection". Naomi Tani, extrait de l'introduction de "Japanese Cinema Encyclopedia : The Sex Films".
Akira Kato est le plus souvent connu pour son "Tokyo Emmanuelle" (1975), le premier roman porno à avoir été distribué en Angleterre. Ayant réalisé près de quarante films pour la Nikkatsu, il n'en est pas pour autant devenu populaire et force est de constater, après avoir vu "Prisonnière du vice", que le public a plus ou moins "occulté" un cinéaste très doué. À l'arrivée des années 80, très certainement conscient du futur impact de la vidéo (et donc de l'avenir du pinku eiga), ce dernier quitte la Nikkatsu ; une décision sage qui l'entraîna vers le petit écran.

 

 

Avec "Prisonnière du vice" en 1975, Akira Kato s'attaque à l'un des plus grands romanciers SM japonais, Oniroku Dan. Si l'on connait cet auteur principalement pour les adaptations ciné d' "Hana to hebi" (la dernière en date est celle réalisée par Takashi Ishii, "Flower and Snake", en 2004), nombreux sont ses autres ouvrages qui furent adaptés dans le domaine du roman porno.
Naomi Tani (lancée par Akira Kato et amie d'Oniroku Dan), l'une des égéries du genre, fut l'actrice la plus récurrente de ces transpositions cinématographiques. L'un de ses plus grands succès restera le "Flower and Snake" (1974) de Masaru Konuma, un film devenu phare pour la Nikkatsu, non seulement pour avoir rempli les poches du studio, mais surtout pour avoir donné ses lettres de noblesse au sadomasochisme dans le roman porno.
Dans "Prisonnière du vice", Naomi Tani incarne donc Yuki, une jeune femme de retour dans son village natal, après une absence de près de six ans. Les éléments justifiant son retour (alors expliqués via de très habiles flash-back s'intégrant parfaitement à la narration du film) répondront progressivement à l'incompréhension palpable, face à la situation, de son frère et d'un ancien petit ami. Une incompréhension dont ce dernier, d'ailleurs, abusera, car, lorsqu'ils se reverront, ce sera pour tenter de la violer. Et en s'en allant, les seins à moitié à l'air et suite à un petit compromis, Yuki croisera le chemin d'un homme et de sa femme, ligotée car ne jouissant que par la pratique du bondage. Yuki a du mal à oublier son passé et voit soudainement en cet homme le moyen d'expier ses souffrances.

 

"Prisonnière du vice" est une oeuvre tout en nuance, une déambulation non dénuée d'amertume et à laquelle la photographie d' Hidenobu Nimura, dotée d'un ton quelque peu "doré", apportera son soutien sans une once de grossièreté. L'ensemble pourrait alors évoquer une certaine nostalgie, mais le secret du retour de Yuki, une fois révélé, est bien trop "brut" pour laisser de la place aux regrets.
Akira Kato, afin d'illustrer l'esprit torturé et souffrant de son héroïne, aura recours au surréalisme et au style "abstrait" le plus souple possible. Le plus souple au sens "classique" du terme puisque "La prisonnière du vice", d'un point de vue général, se veut tel un film monté de manière "fluide" et sophistiqué (comme cité plus haut, les transitions passé/présent sont admirables), sans être pour autant tape à l'oeil. Et le film touche à son but. Akira Kato a ici joué avec les obligations d'une production "rose", y compris donc, le budget, et a su dépasser le statut d'oeuvre d'exploitation, préférant toucher au film d'auteur intimiste et livrer une oeuvre moderne, que ce soit d'allure ou de fond. Le tout s'unissant alors dans une sorte de cercle profondément vicieux, satisfaisant les besoins d'un film à la perversité tendue (la symbolique de la corde n'a jamais été aussi bien utilisée) et à l'atmosphère recluse.
Après, il est possible que certains voient de la confusion dans l'abandon narratif de la dernière demi-heure. Ou alors, la perte d'une linéarité à laquelle nombreux sont ceux qui aiment se raccrocher. En tous les cas, on s'en passera aisément, le film en profitant pour offrir un bon nombre de pistes de réflexion, d'interprétations...
Voici donc une pellicule intelligente, qui aborde le besoin de souffrir pour se souvenir, et le besoin de se faire mal afin de peut-être mieux (se) comprendre et (s') oublier. Le besoin de se révéler tel que l'on est, de faire connaître à une personne choisie la façon dont l'on veut exorciser ses démons, d'avoir à ses côtés une personne à l'écoute. Ici, ce que veut Yuki, c'est un homme qui lui permettrait de rebondir dans sa vie. Bref, "La prisonnière du vice" laisse place à l'histoire d'un amour entre deux personnes qui se veut presque "obligatoire", pour que les deux soient épanouis.

 

Pour finir, on notera la présence de Terumi Azuma (qui avait déjà tourné aux côtés de Naomi Tani dans "Wife to be Sacrificed" en 1974) dans le rôle de l'épouse de l'homme que rencontre Yuki. Une actrice qui pourrait presque voler la vedette à Naomi Tani tant elle est, elle aussi, resplandissante dans ses cordes (pour l'anecdote, elle lui volera, plus tard, son petit ami).
Candaulisme, bondage, peintre pervers... Cette "Prisonnière du vice" est, plus qu'une sacrée curiosité, une oeuvre à la plastique surprenante, une perle majeure du roman porno, qui offre de quoi satisfaire aussi bien le spectateur assidu du genre que celui ayant coutume de s'installer devant des films plus "classiques".
Avec des films comme celui-là, la richesse du genre prend définitivement tout son sens.

 

 

The Hard

 

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