Meurtres sous contrôle
Titre original: God Told Me To
Genre: Thriller , Fantastique
Année: 1976
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: Larry Cohen
Casting:
Tony Lo Bianco, Deborah Raffin, Sandy Dennis, James Dixon, Sylvia Sidney, Sam Levene, Robert Drivas, Mike Kellin, Richard Lynch...
 

Un tireur isolé fait un carton au fusil en pleines rues de New York, tuant une dizaine de passants. Le lieutenant de police Peter Nicolas est dépêché sur les lieux et parvient à entamer une discussion avec le tireur fou. Avant de retourner l'arme contre lui, celui-ci déclare que c'est dieu qui lui a demandé de tuer des gens. Chacun pense qu'il s'agit d'un fait isolé lorsque une recrudescence de meurtres gratuits et répondant au même mobile, fait son apparition et commence à contaminer la ville. Dieu semble demander soudainement des choses peu catholiques et dans son enquête, Peter Nicolas fera une drôle de descente aux enfers...

 

 

Autant "Epouvante sur New-York", avec le gros monstre Inca "pré Ben Ladenien" et ses tours, je m'en souviens, autant si j'ai vu celui-ci au temps des vidéo-clubs, je l'avais zappé... Quoi qu'il en soit l'indispensable Larry Cohen réalise ici un excellent thriller horrifique à marquer d'une pierre blanche et il est bon de se (re)pencher sur l'oeuvre de ce type extrêmement prolifique qui n'a cessé de faire le pied de nez à son cher pays, l'Amérique, lui renvoyant peurs et contradictions, ce avec une imagination souple et fertile. Le voici donc trois ans après l'un des meilleurs black exploitation, à savoir "Black Caesar" et sa suite "Casse dans la ville" ("Hell up in Harlem"), tournée en même temps que son classique "It's Alive" qui garde aujourd'hui la renommée que l'on sait. Pourtant si c'est ce dernier que l'on a tendance à garder lorsque l'on évoque son réalisateur, pour ma part, je garderai ce God Told Me To qui ne perd jamais de son intérêt tout le long d'une intrigue pourtant très bondissante qui part d'un postulat de simple polar, s'enfonce tranquillement vers le thriller d'investigation pour finir comme un film fantastique à haute tendance hérétique et dans sa forme et dans son fond. Tiens, tiens ! Ne voici pas le même mélange que dans le très grand Kiss me Deadly de Robert Aldrich où le polar finissait chez d'obscur "envahisseurs", nous laissant ainsi en plan sans trop que l'on sache où, comment, pourquoi ?
Bref, je soupçonne fortement Larry Cohen d'avoir pensé au gros Bob sur ce coup-là, une référence lourde à porter. Pourtant Cohen s'en sort parfaitement et dès l'entame du film, cela fonctionne totalement. En pleine rue de New-York, des gens se font abattre semble-t-il au hasard, par un tueur isolé et planqué en haut d'un building dans un jeu de massacre comme filmé à l'arrachée qui laisse d'entrée sur le cul, tuant en à peine une minute 14 personnes et il s'agit même d'un genre d'entame assez exemplaire vu le peu de moyen avec lequel le film a été tourné, et de quelle manière Larry Cohen détourne la chose à son profit.

 

 

Le reste ne démentira pas et si l'on devine un metteur en scène jubilant derrière sa caméra devant tant de provocation où christianisme et satanisme ne feront au final plus qu'un, l'un étant indissociable de l'autre, c'est ce qu'il nous dit comme un lutin talentueux, et de ce fait, God Told Me To se regarde à la fois au premier comme au second degré, traversant les genres avec une dextérité, une intelligence maligne et narquoise qui en fait l'un des meilleurs films de son auteur, peut-être même le meilleur. C'est avec un intérêt constant que l'on suit la quête à tout niveau du lieutenant Peter J. Nicholas excellemment campé par Tony Li Bianco ("Les Tueurs de la lune de miel" restant son film le plus connu, l'un des seuls où il interprète le personnage principal avec celui-ci), tour à tour, crédule, malmené pour finir lui-même en enfer où l'emmènera le non moins épatant Richard Lynch ici dans l'un de ses premiers rôles après la mésestimée voire trop méconnue Chasse sanglante en 1974 et qui deviendra au gré de sa filmographie un véritable "psychopathe movie" à lui seul, puisqu'on le retrouvera par la suite le plus souvent dans des rôles de cinglés au sein d'un peu tout et n'importe quoi ("Les Gladiateurs de l'an 3000" / Panics / Puppet master 3 / "Les Barbarians"). Il paraît clair que ses apparitions marquent également le film de son empreinte. Tant sa présence est aussi intrigante que l'histoire du film.
On sera reconnaissant également à Cohen d'avoir su utiliser Deborah Raffin revue l'année d'après dans un autre film bien trop souvent oublié, à savoir "La Sentinelle des maudits" de Michael Winner, ainsi qu'en cinéphile passionné d'être allé chercher Sylvia Sydney au crépuscule d'une riche carrière (Fury de fritz Lang en 1936) et certainement peu courtisée par les studios de l'époque.

 

 

Bref, Meurtres sous contrôle est un vrai tour de force dont l'"atypism"e semble résister au temps, en plus d'être un film qui fait regretter un temps où l'astuce emprunte de second degré ne tombait pas encore dans le ridicule redondant et savait faire de critiques politiques et sociales de vrais films de genre. Que dis-je, de vrais films d'auteurs...

 

Mallox

 

 

A propos du film :

 

 

# "Meurtres sous contrôle" reçu le prix spécial du jury au festival d'Avoriaz en 1977.


# A noter la présence dans un petit rôle d'Andy Kaufman dont Milos Forman en fera une sorte de biographie dans son très bon "Man on the moon".

# Le film fut peu de temps après sa sortie re-titré "Demon", le titre original mettant un peu trop frontalement et explicitement à mal la religion catholique...

# Et puis, l'une des choses que je regrette énormément, même si on ne saurait remettre en cause la très bonne partition de Frank Cordell ("Hell Boats" de Paul Wendkos en 1970), c'est que le fait que l'immense Bernard Hermann qui devait au préalable assurer la bande originale, mourut le lendemain de sa vision du film auquel il devait participer. Quand on sait toute l'ampleur que pouvait prendre le "Monstre est vivant" du même Larry cohen, on ne peut que se demander dans quelles mesures celui-ci nous aurait-il pas emmené le film encore un peu ailleurs, tout en le transcendant sans doute un plus. En l'état "God told me to" reste un excellent thriller science-fictionnel et corrosif.
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