Justice Sauvage : La trilogie |
Écrit par The Omega Man |
Retour sur une Trilogie Sauvage...
Justice sauvage / Walking Tall
L'Amérique étant une nation assez jeune, elle s'est vite façonnée des héros et des figures emblématiques qui, pour certaines, n'avaient rien de vraiment héroïques. Ainsi, hors-la-loi (Al Capone), assassins (Charles Manson), génocidaires (le général Custer) ont côtoyé militaires (Patton, Lee, Nimitz), explorateurs et aventuriers (Kit Carson), Al Capone étant aussi célèbre (voire plus) qu'Elliot Ness. Il était presque inévitable que l'histoire du shérif Buford Pusser entre dans le panthéon des héros cent pour cent américains.
L'un des points fort du film vient de sa vedette principale, Joe Don Baker, qui livre une interprétation mémorable. Le monolithique Baker utilise au mieux son jeu d'acteur limité, pour incarner un personnage bourru et grincheux mais hautement sympathique, qui par moments peut se montrer ingénieux et perspicace. Il utilise sa fameuse batte (en fait, un morceau de bois mal dégrossi) car sa femme lui interdisait d'user d'une arme à feu (elle changera d'avis suite aux diverses mésaventures de son mari).
Situé au croisement entre un "Vigilante" et un "Redneck", le film est typique des années septante. C'est ce que l'on appelait communément un hixploitation, un terme peu flatteur désignant un genre de films se passant à la campagne (de préférence dans le Sud) et mettant en scène des péquenauds, des policiers véreux, des trafiquants d'alcool ou des montagnards. Avec son héros fonceur, têtu et un peu lourdaud, le film se classe aisément dans le genre, le héros n'est pas un citadin mais un vrai gars de la campagne, qui aime avant tout sa famille, va à l'église et ne désire qu'une chose : vivre tranquille. Ces stéréotypes lénifiants n'empêchent pas Justice Sauvage d'être alarmiste (la corruption semble avoir envahi toutes les strates de la société) et complètement masochiste. Le héros en prend plein la tronche : lacéré, tabassé et criblé de balles, rien ne lui sera épargné (il perdra même son épouse) et pourtant, à chaque coup porté par ses ennemis, il ripostera de manière proportionnelle, voire carrément expéditive (la vieille maquerelle abattue d'une balle en pleine tête).
Acteur très populaire dans les années septante, Joe Don Baker débute par un petit rôle dans "Luke la main froide" (1967) de Stuart Rosenberg. Quelques années plus tard, Joe se fait remarquer en tueur manchot dans "Un colt pour les sept mercenaires" (1969) de Paul Wendkos, mais c'est évidemment sa prestation dans Justice Sauvage qui va le rendre célèbre. Il poursuivra une belle carrière dans la série B (Mitchell, The Pack, L'Aventurière de Hong Kong, Dallas Hostage...).
Justice sauvage 2 : La Revanche / Part 2 : Walking Tall
En 1973, lors de sa sortie en salles, Walking Tall se positionne en quatorzième position au box-office US avec 23 millions de dollars de bénéfices (uniquement pour les Etats-Unis), ce qui représente pour une modeste série B dont le budget était estimé à 500.000 $ un excellent résultat. Une suite est donc envisagée. A l'origine, le vrai shérif Pusser devait interpréter son propre rôle, mais c'était sans compter sur sa mort brutale dans un accident de voiture. C'est donc le massif Bo Svenson qui prendra la relève, choix excellent s'il en est car, si l'acteur n'arrive pas à retrouver l'interprétation brute de son prédécesseur, il livre un personnage moins manichéen qu'il y paraît (tout en restant dans le registre du justicier brutal). Bo Svenson, c'est un peu l'incarnation de la série B à l'état brut, faisant allégrement des aller-retour entre séries télé (Magnum, Hunter, L'Homme qui tombe à pic...) et séries B italiennes (Une poignée de salopards, Thunder 1 & 2...) ou US (Deep Space, Private Obsession... ), tout en faisant de temps en temps un peu de figuration ici et là (Delta Force, Speed 2, Le Maître de guerre...).
Le film débute là où finissait le premier ; on retrouve notre héros à l'hôpital, bien abîmé mais décidé à venger la mort de son épouse. Seulement la chose est loin d'être de tout repos, car de nouveau le shérif se retrouve dans le collimateur de la mafia locale, la fameuse Dixie Mafia qui opère dans le sud des Etats-Unis, incarnée par l'acteur Logan Ramsay. La main d’œuvre locale ayant échoué à éliminer l'encombrant shérif, une bande de tueurs assez folklorique est engagée pour faire le boulot. La fine équipe est composée d'un pilote de course psychopathe qui camoufle ses meurtres en accidents (Richard Jaeckel, acteur fétiche de Robert Aldrich), d'une mante religieuse (la magnifique Angel Tompkins, vue dans "The Bees", Prime Cut/Carnage) et d'un excité de la gâchette (John Davis Chandler, le chasseur de prime dans "Josey Wales hors-la-loi"). Notre shérif échappe de nouveau à divers attentats (soit par chance, soit grâce à son intuition) ; malheureusement l'un de ses adjoints y perdra la vie (en percutant un camion avec sa voiture).
Réalisé par un vétéran de la télévision (Earl Bellamy, 1917-2003), à qui l'on doit un peu plus de 1 600 épisodes de séries aussi diverses que variées de Rintintin (1954) à V (1985). Habitué aux tournages rapides et économiques, il semblait être la personne idéale pour emballer cette petite série B. Malheureusement, si l'efficacité est au rendez-vous, rien ne distingue ce petit film d'action des autres. Pour sa défense, précisons qu'il est difficile de maintenir l'intérêt lorsque le film n'a pas de commencement (puisqu'il reprend là où s'était arrêté le premier) ni de fin (un fondu enchaîné nous apprend la mort du vrai shérif avec constat d'accident à l'appui).
Justice Sauvage 3 : Le Héros / Final Chapter : Walking Tall
On retrouve une dernière fois notre brave shérif Pusser qui a bien du mal à faire son deuil, comme le montre le flashback qui ouvre le film et reprend la scène de poursuite du premier épisode, dans lequel sa femme trouve la mort (l'acteur Bo Svenson remplaçant Joe Don Baker). Pourtant, le veuf est fort sollicité par la gent féminine, entre sa secrétaire (Libby Boon) qui aimerait le réconforter, et une certaine Luan (un personnage apparu dans l'opus un et interprété à l'époque par Brenda Benet) qui souhaiterait renouer, ou plus si affinité. Cette dernière est incarnée cette fois par Margaret Blye, apparue dans diverses productions assez viriles comme "Hombre", "L’Or se barre", "L’Or des pistoleros" ou "Le Bagarreur", où ses cheveux blonds et son regard triste faisaient fureur. Pour ce film, elle accepta de se teindre en brune !
Comme toujours le destin forcera la main du shérif, et lorsque la pauvre Luan sera retrouvée morte, le sang de Pusser ne fera qu'un tour ; armé de son gourdin, il ira rosser les malotrus responsables de cette horreur. Paradoxalement, ce sera la dernière action de Pusser en tant que shérif (et la dernière grosse scène d'action de la série). En effet, suite à une campagne de dénigrement montée par l'avocat d'une de ses victimes (un trafiquant d'alcool violent interprété par Clay Tanner, gueule connue vue notamment dans La Course contre l'enfer), la population commence à avoir des doutes sur ses méthodes expéditives et le sanctionnent aux élections, en choisissant un autre shérif.
Réalisé par Jack Starrett (La Course contre l'enfer), la série commence sérieusement à s'essouffler (à part la scène du bar, il y a peu d'action !). Et contrairement aux deux épisodes précédents, le shérif n'a pas de véritable adversaire face à lui, excepté les tauliers (parmi lesquels on reconnaît l'affreux H.B. Haggerty) du bar dans lequel Luan travaille comme hôtesse. Mais ces derniers disparaissent aux deux tiers du film.
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