Si Stieg Larsson et sa trilogie "Millénium" ont lancé une mode du polar suédois, pour ne pas dire nordique, en France avec des auteurs comme Henning Mankell ou Jo Nesbo, les autres littératures de genre n'ont pas connu le même essor. On notera tout juste John Ajvide Lindqvist et son roman "Laisse-moi entrer" et Anders Fager, dont les éditions Mirobole propose aujourd'hui une compilation de nouvelles, issues des trois recueils de l'auteur.

La première nouvelle nous entraîne dans les basques d'un groupe d'adolescente sortant en bois de nuit, tout ce qu'il y a de plus normal, si ce n'est qu'elle semble redouter par beaucoup de monde. Le garçon dragué par l'une d'elle ne pensait probablement pas se retrouver dans la tourbière, victime d'un sabbat où des forces surnaturelles vont se déchaîner. L'idée de transformer les victimes habituelles en monstres fonctionne ici très bien, surtout que l'auteur ne lésine pas sur les détails glauques pour nous plonger dans une orgie gore et brutale.
La dernière nouvelle ainsi que plusieurs Fragments mettent en scène l'une des protagonistes de ce premier texte, permettant de construire tout un univers fantastique et horrifique, mais il devient du coup dur d'en parler sans risquer de révéler les chutes des nouvelles, même si certains méritent une lecture à eux-seuls. Le dernier texte finit donc de construire un univers occulte qu'on espère voir l'auteur poursuivre dans d'autres nouvelles et romans.
a seconde nouvelle nous plonge en plein dans l'hiver de l'an 1712 dans un petit village traversé par des soldats allant libérer Trondheim, en pillant, violant et tuant. Un paysan juste désireux de protéger sa famille va finir avec les membres cassés au milieu du froid et avec sa belle-mère va en appeler à un ancien dieux pour se venger. Le texte nous plonge donc dans une ambiance glaciale et une réalité brutale, très peu de fantastique dans la violence de ce récit, où le pire monstre est finalement l'homme.
Dans "Joue avec Liam", un jeune enfant s'enfuit de sa crèche et s'en va s'amuser sur la tourbière, chasser les lapins. C'est alors qu'il va trouver un trou qui n'a rien d'ordinaire, un trou qui lui réclame de la nourriture, acceptant d'accorder des voeux lorsqu'il sera rassasié. Une histoire d'épouvante assez classique que l'auteur va situer dans un contexte social réaliste, rendant plus effrayante la créature tapis dans la tourbière.
Dans "Trois semaines de bonheur", on suit une jeune femme étrange tenant un magasin d'Aquariophilie et pour qui les poissons semblent être une véritable passion, un peu trop peut-être puisqu'ils semblent même envahir ses fantasmes ! Cette nouvelle nous plonge dans le quotidien d'une jeune femme à peu près normal, mais plus le texte progresse, plus on se rend compte qu'il y a anguille sous roche et l'épouvante s'installe doucement, jusqu'à un final aussi déroutant qu'effrayant.
"Un point sur Västerbron" ressemble à un court essai ou un long article de journal témoignant d'un étrange suicide collectif, plusieurs personnes sans aucun lien s'étant jeté du haut d'un pont sans explication logique. Le texte se contente de dénombrer les victimes, de leur trouver des points communs et bien entendu essaye de comprendre cet acte, laissant douter d'un acte qui n'a visiblement rien de naturel. L'aspect journalistique sert plutôt bien ce texte étrange à l'atmosphère lugubre.
Dans "Encore plus fort", un jeune couple s'amuse pendant ses ébats amoureux à s'étrangler, cherchant à vivre une expérience de mort imminente qui les amène à rencontrer une dame étrange. Un texte constitué de dialogue, ceux de ce couple étrange, un brin perturbée, qui va s'enfoncer de plus en plus loin dans sa folie, à moins que leurs excursions ne soient pas aussi imaginaire qu'il y paraît. A l'instar de "Trois semaines de bonheur" et des "Furies de Boras" qui ouvre ce recueil, le sexe y est très présent, mais sans y être glamour, donnant plutôt dans le sordide et le violent.
Dans L'escalier de service, on se retrouve au début de la psychiatrie avec un médecin suivant une jeune femme de bonne famille, semblant souffrir de trouble du sommeil et plus particulière de crise de somnambulisme lui faisant descendre l'escalier de service. La jeune héroïne se retrouve ainsi coincée entre les codes strictes de l'époque et une médecine naissante qui ne pourra rien pour elle évidement ! Une histoire d'épouvante très classique où l'on découvrira que le monstre sous le lit existe bel et bien !

Des trois auteurs cité en quatrième de couverture, John Ajvide Lindqvist, Stephen King et Lovecraft, c'est du génie de Providence que se rapproche le plus Anders Fager avec ces anciens cultes qui semblent se cacher dans l'ombre, des créatures venues de la mer et le côté tentaculaire et indicible des monstres présents. Un Lovecraft qui serait passé au moule d'une littérature plus moderne, plus trash et plus sexualisé, nous laissant souvent sur les rotules à la fin de ces textes !

Note : 8/10

 

Stegg

 

A propos de ce livre :

 

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- Site de l'auteur : http://www.gottick.com/

- Site de l'éditeur : http://mirobole-editions.com/