Un horizon de cendres
Genre: Horreur , Zombies
Année: 2004
Pays d'origine: France
Editeur: Pocket
Auteur: Jean-Pierre Andrevon
 

La mort, il la connaît. Tous les jours, il la côtoie. En travaillant à la morgue, il prépare les corps pour leur dernier voyage, il les porte en terre et souvent il les brûle... Malgré les reproches de sa petite fille qui n'a de cesse de lui répéter que l'on ne brûle pas les gens, il continue son travail au crématorium de la ville. Jusqu'au jour où son voisin mort depuis un an réapparait devant lui. Puis un autre, encore un autre, et ils sont de plus en plus nombreux et peu à peu la frontière entre les vivants et les zombies ne tient plus qu'à un fil...

Vous l'aurez compris, "Un Horizon de cendres" est un livre de zombies, un fait assez rare pour être souligné. A ma connaissance, peu d'œuvres francophones traitent du sujet et très clairement le roman de Jean Pierre Andrevon est un petit bijou de noirceur, subversif, critique et plutôt dérangeant même à certains moments. Un horizon de cendre convoque tour à tour George Romero bien sûr, mais aussi Richard Matheson pour Je suis une légende...

On ne le dira jamais assez, le Zombie est avant tout une créature sociale, ou plutôt anti-sociale, et toutes les grandes œuvres utilisant ces monstres sont avant tout des brulots contre la société : le travail et la passion dans White Zombie, le racisme dans la Nuit des morts vivants, la société de consommation dans Zombie ou bien encore l'esprit militaire et guerrier dans Le jour des morts vivants pour ne citer que ceux là et sans rentrer plus dans les détails. Le roman de Jean Pierre Andrevon se hisse facilement parmi ces chefs d'œuvres, même si les habitués du genre pourront trouver à redire, entre autres sur l'originalité du roman. Ce n'est pas mon cas...

Le zombie c'est ce qui revient quant l'enfer et le paradis n'existent plus ("quand il y a trop de mort en enfer ils reviennent sur terre"), c'est avant tout des saccageurs de rêves, ceux qui viennent nous rappeler qu'il n'y a plus d'espoir. La grand-mère morte l'été dernier ne trouvera pas le lieu paisible qui lui était promis suite à une petite vie bien tranquille. Le zombie vient rompre les codes judéo-chrétiens sur lesquels notre société est toute basée (tout comme le vampire d'ailleurs), il vient rétablir l'équilibre nouveau car depuis la nuit des temps il y a bien plus de morts qui habitent la terre que de vivants...


Mais de cet équilibre va naître le déséquilibre, le chaos chez les vivants. Le narrateur note scrupuleusement dans un journal intime, sans rien nous épargner, tous les faits marquant cette invasion de mort-vivants et peu à peu toutes les structures sociales viennent à exploser sous l'impulsion de la mort, nous conduisant vers un horizon de cendres...

Tout d'abord les politiques et les scientifiques désarmés, s'accrochant à des théories et des concepts. Un président de la république planqué on ne sait où, coupé du reste du peuple qui continue à crier haut et fort qu'il faut aimer les morts même s'ils veulent vous bouffer la cervelle ! Preuve que nos politiciens et nos scientifiques ne sont pas capables de grand chose...

Autre structure à très vite exploser : la famille. Le narrateur menait jusqu'à présent une vie tranquille, un travail au crématorium (travail pratique par la suite quant il faut brûler du zombie !!), une petite fille, une femme, une belle maison. Mais cela aussi ne tient à presque rien et quand la mère de sa femme à moitié décomposée revient à la maison, l'amour n'est plus grand-chose. Ah les belles mères... La famille est alors détruite par cette mort qu'elle avait presque oublié et le narrateur se retrouve bientôt seul dans cette maison cernée de morts...

L'armée elle-même est inefficace et incompétente face à cette invasion et peu à peu la population est laissée à elle-même dans cet enfer... Le narrateur décide alors de partir à la recherche de sa femme et de sa fille, de son amour perdu. Mais avec le temps, réfugié dans un bunker, l'amour lui-même n'est plus une force et parfois, les matins dans l'odeur des lances flammes, on préfère avancer vers cet horizon de cendres, se laisser aller...

Si tout se détruit autour de lui, dans le bunker où d'autres hommes et femmes sont réfugiés se créer une nouvelle structure sociale sans racisme, sans véritable haine et où se mélangent les classes. Notons le travail superbe de Jean Pierre Andrevon sur les registres de langues, car le langage et notre niveau de langage est aussi ce qui nous définit. Et l'homme tranquille s'allie un temps avec un jeune noir issu des banlieues. Dans ce maelstrom tout le monde se mélange car tout le monde n'a enfin de compte qu'un seul but : survivre.


"Un horizon de cendres" est un livre rare, une véritable critique de la société, un véritable film de zombies, une vision apocalyptique servie par un style direct et sans compromis. Lorsque Jean Pierre Andrevon écrit on a la douce impression que c'est un premier jet d'une facilité déconcertante, les idées et les images surgissent directement dans l'esprit du lecteur et certains passages sont relativement violents : crémation de corps, luttes contre des hordes de zombies, explosions etc. On retrouve beaucoup d'éléments qui ne seront pas étranger aux amateurs de films "zombiesques" et le lecteur avisé marchera en terrain connu sans que cela n'enlève rien à la qualité de l'œuvre. Un horizon de cendres est une lecture captivante, prenante, dérangeant, intéressante.  Plus je lis du Jean Pierre Andrevon et plus j'aime... Les livres de Zombies sont plutôt rares et celui-ci fait partie des très bons romans écrits sur le sujet.


Note : 8,5/10

Le Cimmerien

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