Brigade du Texas, La
Titre original: Posse
Genre: Western
Année: 1975
Pays d'origine: États-Unis
Réalisateur: Kirk Douglas
Casting:
Kirk Douglas, Bruce Dern, Bo Hopkins, James Stacy, Alfonso Arau, Luke Askew, Gus Greymountain, David Canary, Katherine Woodville, Beth Brickell, Mark Roberts, Dick O'Neill, Louie Elias...
Aka: Le détachement sauvage
 

Kirk Douglas, qui a pourtant cosigné certaines de ses productions ou tout du moins s'y est fortement impliqué (avec King Vidor (L'homme qui n'a pas d'étoile), Robert Aldrich (El Perdido) ou David Miller (Seuls sont les indomptés) ) n'a pas eu trop de chance avec ses propres réalisations. Son premier film fut un échec retentissant et est à ce jour quasi oublié ("Le trésor de Box Canyon", alias "Scalawag" en 1973) puis son second, celui-ci, fut plutôt bien accueilli en festivals en 1975 avant de se voir boudé en salle par le public.

 

 

Faut dire que le propos de Posse n'est pas très aimable, ni très manichéen, que l'ensemble peut laisser le spectateur déboussolé, avec un étrange sentiment de solitude. La fameuse brigade du Texas qui donne au film son titre est composée d'un shérif et de ses hommes, lesquels font régner la loi et l'ordre et, pour cela, pourchassent sans relâche des bandits, certains étant réputés comme étant dangereux, n'hésitant pas à tuer pour voler. À partir de là, on peut comprendre que justice rime avec fermeté et que pour une efficacité maximale, mettre de côté le sentimentalisme ou l'empathie peut s'imposer.

Dès son préambule, on assiste à un traquenard tendu par la brigade à une bande de bandits retranchés dans leur antre, où ils se sont barricadés avec 40 000 $ fraîchement pillés. Les hommes de Howard Nightingale, le shérif donc, ne laissent alors aucune chance à la poignée d'hommes confinés dans leur petit baraquement en bois, y foutent le feu, les obligeant ainsi à sortir, pour les abattre comme des lapins. Seul l'un d'eux, semble-t-il plus malin que les autres (ce que la suite confirmera), parvient à s'enfuir. Il s'agit de Jack Strawhorn, bandit notoire et prêt-à-tout (campé par Bruce Dern). La violence dont fait preuve Nightingale et sa brigade alerte un peu (mais pas trop encore), d'autant que l'argent volé brûle et que le récupérer ne semble pas leur préoccupation principale.

 

 

La suite ne sera que confirmation que le véritable but de Nightingale/Douglas n'est pas de faire régner la loi. La fin en soi est de se servir de l'insécurité pour se faire élire sénateur. Du coup, arrêter le dangereux Jack Strawhorn est une obligation primordiale pour lancer une campagne efficace, prouvant par les actes qu'il est le plus apte à lutter contre la criminalité.

Là où Posse est étonnant de modernité et enfonce le clou, c'est que de façon graduelle on s'aperçoit que le shérif, d'apparence si droit dans ses bottes, aime non seulement donner des meetings, tombant dans un populisme (qui n'est pas que le monopole des extrêmes, rappelons-le en cette douce période électoral(iste), mais qu'en plus ce dernier se sert d'une compagnie de chemin de fer en plein développement pour assoir son ambition et parvenir à ses fins. Durant ses speech tenus devant la population à qui il fait entendre ce qu'elle veut entendre, son discours énonce même ses ambitions réelles pour les réfuter ; par exemple minorer ses actions par une fausse modestie destinée à duper la populace et lui faire gober qu'il œuvre pour elle, rien que pour elle et que, sans elle, il ne serait rien.

Un drôle d'écho qui n'a cessé de rebondir jusqu'à nos jours. Comme quoi, si le ver est dans la pomme du citoyen et que le système est pourri, ce n'est pas d'aujourd'hui. Pour précision, si les hommes de Nightingale s'inquiètent pour leur avenir une fois leur patron devenu sénateur, ce dernier a déjà prévu la chose en passant un accord avec la compagnie de chemin de fer pour les embaucher et assurer la sécurité dudit chemin de fer. Seulement voilà, s'il veut paraître se préoccuper de ses fidèles assistants, il a déjà prévu de les brader à la compagnie et ceux-ci seront, soit, reconvertis, mais toucheront un salaire moindre que ce qu'ils touchent à présent.

 

 

Finalement, La Brigade du Texas brosse le portrait d'un bel enculé mu par l'ambition et ne distillant que démagogie. Mais les choses vont changer jusqu'à presque s'inverser, dès lors que Strawhorn/Dern parvient à s'évader de prison, prenant même en otage un Nightingale dont le principal souci à ce moment là est de sauver les apparences, de ne pas être vu en position de faiblesse, ni par ses hommes, ni par la population.

Et à Kirk Douglas d'offrir, sur les bases d'un très bon scénario signé Christopher Knopf (scénariste de l'excellent Terreur dans la montagne et comme par hasard scénariste pour Aldrich sur des films très acides tels que "L'empereur du Nord" ou "Bande de flics"), un étonnant western "moderne" qui pose plus de questions qu'il ne donne de réponses. Le personnage campé par Bruce Dern a beau être un tueur, on finit par se demander si le plus dangereux des deux hommes n'est pas celui aux ambitions politiques et que, peut-être, il y a une certaine noblesse et surtout plus de cohérence chez ce bandit qui refuse le système jusqu'à le combattre à sa manière, par ses exactions. En bref, Posse offre une singulière méditation sur la loi et l'ordre, les limites de celles-ci et les obscures raisons pour lesquelles ces valeurs sont parfois défendues.

 

 

Hélas, si Posse possède un scénario passionnant, s'interrogeant donc sur les limites du bien et du mal, de la justice, de la lisière entre l'intérêt individuel et celui collectif, il n'a pas la mise en scène qu'il mérite. Celle-ci manque d'un je-ne-sais-quoi, de caractère peut-être, de vigueur sans doute, et peut-être au final lui manque-t'il le recul propre à la satire, celle qu'on trouve dans "Le Reptile" par exemple (d'autant que le propos est foncièrement similaire), et cela en dépit d'un cynisme présent par petites touches. Cela en fait un film plus intéressant que réussi. On dira que c'est dommage mais que ce n'est déjà pas si mal.

Ceci étant, la partition de Maurice Jarre lui confère un certain relief, tout comme la présence d'acteurs fort appréciables, souvent des représentants occasionnels du western moderne et crépusculaire : Bo Hopkins et Alfonso Arau ("La Horde sauvage"), Bruce Dern ("Will Penny, le solitaire", "Les cow-boys", mais aussi The Trip, Psych-Out, Amok, l'homme à deux têtes, "Silent Running", "Retour", Driver...), Luke Askew ("La poussière, la sueur et la poudre", "La légende de Jesse James", "Pat Garrett et Billy le Kid") ainsi que l'acteur James Stacy qui avait perdu un bras et une jambe, en plus de sa petite amie, dans un grave accident de moto survenu deux ans avant. Du reste, l'acteur fut aidé par de nombreux amis dont Kirk Douglas qui créa le rôle pour lui et on trouve également dans Posse son frère, Louie Elias.

 

 

Mallox

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