Spider Labyrinth
Titre original: Il nido del ragno
Genre: Horreur , Thriller , Fantastique
Année: 1988
Pays d'origine: Italie
Réalisateur: Gianfranco Giagni
Casting:
Roland Wybenga, Paola Rinaldi, Margareta Von Krauss, Stéphane Audran, Claudia Muzi, William Berger...
Aka: The Spider Labyrinth
 

Alan Whitmore (Roland Wybenga), jeune professeur en archéologie, est envoyé à Budapest afin de retrouver les traces du Professeur Roth. Ce dernier travaillait, avant qu'on perde sa trace, sur le décryptage de vieux manuscrits... Ce même professeur est, de plus, censé avoir envoyé un artefact trouvé sur les lieux d'un culte secret, mais la société à qui il l'a fait parvenir en urgence ne l'a étonnamment jamais reçu.

Notre jeune chercheur, dès son arrivée, est reçu par ce professeur qu'il retrouve facilement, mais cloîtré chez lui de peur. Whitmore le trouve dans un état de panique tellement avancé qu'il le croit atteint de paranoïa aiguë. Or, le lendemain, alors que ce dernier n'a pas eu le temps de lui révéler ses soit-disant secrets mortels, il est retrouvé pendu. Non pas à une corde, comme d'ordinaire, mais à d'épais filins de soie, comme tissés par une araignée. Petit à petit, alors qu'il est régulièrement abordé par un étrange inconnu (William Berger), lequel s'obstine à vouloir le prévenir d'un danger imminent, Alan Whitmore intègre une secte vouée à l'adoration d'une arachnide ancestrale tandis que certaines personnes qu'il croise dans son enquête ont la fâcheuse manie de disparaître dans des circonstances aussi mystérieuses que violentes.

 

 

Produit et scénarisé en grande partie par Tonino Cervi (5 gâchettes d'or, Les sorcières du bord du lac), Il nido del ragno est l'unique film réalisé par Gianfranco Giagni, lequel avait commencé sa carrière en 1976 comme assistant de Mauro Bolognini sur "L'héritage", avant de disparaître quelques années durant pour réapparaître à la fin des années 80, mettant alors principalement en scène des documentaires ainsi que deux séries pour la télévision italienne : "Donna" et "Valentina".
Parmi ses livraisons d'alors, on trouve donc Spider Labyrinth, oeuvre à la fois retardataire et atypique, film composite rassemblant plus de deux décennies de thrillers fantastico-horrifiques. Hommage aux pères et création des plus originales, on nage en plein thriller lovecraftien sur une base on ne peut plus classique et vue déjà bien des fois au sein, par exemple, du giallo : un homme est dépêché dans un milieu inconnu avant de se retrouver à l'état de jouet (ou de mouche pour le coup), au main d'une secte. On pense, outre "The Wicker Man", à L'alliance invisible de Sergio Martino ou encore à Je suis vivant, le contexte hongrois n'est d'ailleurs pas sans évoquer parfois la ville de Prague captée par Aldo Lado.

 

 

Niveau traitement cependant, les emprunts ne se voilent pas la face et tiennent de l'évidence ; ils sont à chercher du côté de cinéastes déjà consacrés alors : Spider Labyrinth use des effets bavesques (bonjour à "Opération peur" dont il reprend la trame) autant qu'il puise au niveau esthétique chez Dario Argento auquel certaines séquences clignent de l'oeil et lui font écho : un meurtre sauvage et sanglant dans des couloirs de draps éclairés de vert puise sans se cacher et sans complexe aucun dans "Suspiria". A ce sujet encore, si l'intrigue du film, toute en puzzle, fait penser à Inferno, l'ensemble, à quelques arrangements prêts, aurait pu faire un excellent troisième opus de la fameuse trilogie (inachevée ?) des trois mères par le père Argento. Plus l'intrigue avance, plus l'aspect fantastique prend le dessus jusqu'à carrément bouffer la pellicule dans une dernière bobine aussi inattendue qu'impressionnante. A ce titre, on n'oubliera pas de louer l'excellent travail de Sergio Stivaletti qui parvient à illustrer et à faire vivre de manière fracassante une idée déglinguée.

Empruntant au départ les rails d'un giallo classique, Spider Labyrinth se fait progressivement de plus en plus atmosphérique, piochant aussi en passant chez De Palma (Obsession puis "Body Double", sentiment renforcé parfois par l'excellente partition de Franco Piersanti, revisitant subtilement le répertoire Hermann/Donaggio) puis évoluant non loin d'un univers en putrescence digne d'un Lucio Fulci au meilleur de sa forme, ce avant d'éclater son cocon purement thrilleresque et de s'émanciper dans l'horreur pure et dégénérée.

 

 

La difficulté à ce jour à voir Il nido del ragno dans une copie lui rendant pleinement hommage (le film se trouve néanmoins sur le net, doté d'une image correcte et dans une version assez complète, permettant au minimum de se faire un véritable avis - quid cependant de cette supposée version de 120 minutes ?) ne joue évidemment pas en sa faveur. D'autant moins qu'il emprunte tant de directions singulières et prend à revers qu'il est difficile d'en parler sans trop en dire.

Spider Labyrinth a une qualité aussi énorme que rare : il est impossible d'anticiper ce que recèle la bobine suivante. Quant à sa classification dans un genre spécifique, celle-ci est si peu aisée que cela peut expliquer, en partie tout du moins, la raison de son manque de renommée et de reconnaissance à ce jour. Gianfranco Giagni fait pourtant se succéder les segments mémorables, accumule à la fois les bons points et les détours délicieusement surprenants, brasse mystère, suspense et morceaux de bravoure sanglants, voire gores, le tout en tissant une toile dotée d'une belle électricité statique : de celle qui fait que de scène en scène, rien à faire, on ne décroche pas !

 

 

Si l'on excepte les présences de William Berger et de Stéphane Audran (dans un rôle très proche de celui d'Alida Valli dans "Suspiria"), le casting est constitué d'acteurs finalement assez peu connus. Ils sont pourtant à l'unanimité très bons. C'est le premier film de Roland Wybenga qui enchaînera avec Sinbad of the Seven Seas de Castellari (dans lequel il se faisait piquer sa promise par Lou Ferrigno). L'acteur ne fera qu'une éphémère carrière puisqu'il y mettra fin deux ans après, au bout de cinq films seulement. Idem ou presque pour la très rare Paola Rinaldi qui, à elle seule, amène tout le romantisme vénéneux que ce genre de bande, pour être réussie, réclame : passant d'un vis-à-vis coquin à une influence trouble menant peut-être au sacrifice, il n'y rien à redire au couple qu'elle forme avec notre professeur. Enfin, dans le genre "fille de" pouvant se transformer en furie, harpie, sorcière sur balai ou encore, au choix, en épeire anthropophage, Margareta von Krauss possède le physique idéal et amène une présence aussi flippante, déchaînée par moments, qu'elle y s'y montre parfaite dans l'ensemble.

Il n'y a, outre un récit semblant parfois légèrement heurté, que peu de reproches à faire à cette excellente toile que l'on peut considérer sereinement comme l'une des dernières réussites transalpines du genre avec les oeuvres de Michele Soavi et que l'on pourrait grosso-modo ranger quelque part entre Il profumo della signora in nero de Francesco Barilli et La maison aux fenêtres qui rient de Pupi Avati.

 

 

Bref, avec toutes ces références à son avantage, Spider Labyrinth est une bien belle réussite que tout amateur de gialli et d'horrifiques italien se doit de visiter. L'auteur de ces quelques lignes regrettera quant à lui, qu'un aussi bel objet, en plus de n'être jamais sorti en France, n'ait jusqu'à présent bénéficié d'aucun dvd ou tout autre support moderne lui rendant pleinement hommage...

 

Mallox

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