Dernier jour de la colère, Le
Titre original: I Giorni dell'Ira
Genre: Western spaghetti
Année: 1967
Pays d'origine: Italie / Allemagne
Réalisateur: Tonino Valerii
Casting:
Giuliano Gemma, Lee Van Cleef, Walter Rilla, Christa Linder...
 

Scott (Giuliano Gemma) est le garçon à tout faire du village de Clifton, au Texas. De père inconnu, il est considéré comme un bâtard et est méprisé de tout le monde, à l'exception d'un vieux gardien d'écurie, d'un borgne et des prostituées. Mais son destin va croiser celui de Frank Talby (Lee Van Cleef), un pistolero qui va le prendre sous son aile pour lui apprendre son art. Scott assistera ainsi à la vengeance à laquelle se livre Talby, une vengeance qui l'amènera justement à chercher noises aux autorités de Clifton, pour la plupart des pourris... Mais Talby lui-même fera preuve d'un penchant fort prononcé pour la violence et pour l'injustice. Il prendra peu à peu le contrôle du village, avec l'aide d'un Scott devenu lui-même pistolero, et qui semble être sur la mauvaise pente.

 

 

Excellent film si il en est, "Le Dernier Jour de la Colère" est désormais avant tout connu pour s'être fait "emprunté" son excellent thème musical signé Riz Ortolani par Quentin Tarantino pour "Kill Bill". Mais le film de Tonino Valerii (et de Ernesto Gastaldi pour le scénario) n'est pas qu'une musique remarquable, c'est aussi un casting dominé brillamment par un Giuliano Gemma en petit jeune naïf et par un Lee Van Cleef manipulateur et très ambigu. Deux personnages qui se complètent, et à travers lesquels Valerii nous livre une sorte de mini fresque que l'on aurait apprécié voir plus longue mais qui en l'état reste très prenante. Ne cédant jamais au manichéisme souvent de mise dans le western, le réalisateur nous montre des personnages et des situations orientant le spectateur dans tous les sens. De l'affection qu'il éprouve pour le Talby libérateur à l'aversion pour un même Talby manipulateur et parvenant même à nous faire prendre en pitié les salopards de Clifton, le spectateur ne saura pas véritablement de quel côté se placer.
Scott, le héros, se retrouvera un peu dans la même position et naviguera du statut de pauvre souffre douleur à celui de pourri complet, à la fois en quête de vengeance par rapport à ceux qui le considéraient comme un bâtard et cherchant également à asseoir sa puissance via les leçons qui lui furent inculquées par Talby. Et, poussant bien plus loin que les simples combats armés (même si il y en a, et pas des des plus moches), Valerii montre aussi les coulisses de la politique, de la justice et des milieux financiers, tout ça se complétant pour dresser un portrait très sombre des arcanes du pouvoir et des perversions morales qui s'offrent à un personnage, Scott, ayant complètement révolutionné sa vie sous l'impulsion d'un mentor douteux.

 

 

C'est donc dans ce climat étrange, où des crapules présumées sont combattues par un bienfaiteur trop intéressé et trop omniprésent pour être honnête, que le film se déroulera, se concentrant sur les choix auxquels Scott doit faire face. Sachant tout de ce qui se passe, l'ex-tête de turc sera miné à la fois par des considérations personnelles et par les conseils de son entourage, de Talby à Murph, le fameux garçon d'écurie, que l'on apprend être un ancien shérif brave et glorieux. Plusieurs années avant "Mon Nom est Personne", Valerii affiche déjà une belle maîtrise des codes du western, Talby apparaissant comme un pistolero à la fois bon, brute et truand, et Murph comme un shériff à l'américaine façon John Wayne. Ce sera à Scott de choisir et d'orienter le futur de Clifton, et encore plus loin celui de l'avenir du western. Le côté moralisateur sur la tolérance est bel et bien présent, mais ce sera à Scott (et au spectateur) de le retrouver au milieu des nombreux faits dont il dispose, et de l'analyse qu'il est invité à en faire. Seule la fin, présentant une situation clarifiée, viendra apporter les clefs à toute cette prenante intrigue. Un peu facile, certes, mais le duel réservé pour l'occasion par Valerii n'a pas à pâlir des duels leoniens, énormes sources d'influence dans la mise en scène.
"Le Dernier Jour de la Colère" est véritablement le dessus du panier dans le genre western spaghetti, ne cédant jamais à l'iconisation facile de ses personnages malgré la présence d'un Giuliano Gemma au physique de jeune homme complètement adapté au rôle Scott et celle d'un Lee Van Cleef comme d'habitude impeccable et mystérieux. Un film très dense, même parfois trop (la transition entre le Scott opprimé et le Scott pistolero est un peu très rapide, pour citer l'un des tirages de cheveux les plus prononcés), avec de nombreux morceaux de bravoures formels (un duel à cheval au milieu du désert, très efficace) et venant apporter une belle pierre à un genre qui a énormément fait pour la renommée du cinéma d'exploitation italien. Rarement les coulisses du pouvoir, pourtant plusieurs fois illustrées à l'écran dans les westerns, n'auront été aussi bien rendues et auront connues un traitement aussi fascinant, à la fois violent et réflexif, mariant des notions comme la démagogie, la corruption, l'amitié, dans le but d'y placer des personnages face à leurs propres responsabilités, à la fois personnelles et citoyennes. Énormément d'enjeux pour un film que l'amateur de westerns spaghetti (et de cinéma en général) se doit d'avoir vu !

 


Note : 8/10

 

Walter Paisley
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