La brune Carla (Marisa Mell), une arnaqueuse professionnelle extrêmement séduisante, a comme hobby de séduire puis de faire chanter ses proies. Après tout, il faut bien vivre ! Mais les choses changent le jour où Carla tombe sur Arturo (Stephen Boyd) qui tente de la séduire avant de découvrir qu'elle exerce le même art que lui : celui de la manipulation à des fins de spoliation. S'en apercevant réciproquement, ils décident de faire équipe. Carla avait déjà mis la main sur une proie a priori facile : Luis, un homme d'affaires plutôt fortuné (Fernando Rey), lequel fraye avec une jeune et jolie jeune femme blonde, Lola (Sylva Koscina). Mais une mort soudaine va changer les règles d'un jeu qui semblaient préétablies...
Historia de una traición débute calmement, Marisa Mell se tenant en haut d'une falaise située sur la côte d'Asturias. Non loin, au volant de sa Jeep, un bellâtre arborant un sourire sûr de lui (Stephen Boyd) la scrute. On le retrouve peu après en train d'exercer ses talents de peintre en haut de cette même falaise.
Le temps passe mais un soir de pluie, il vient sonner à la porte de Carla qui, isolée, le fait bien entendu entrer sans rechigner. Il se présente : Arthur, 37 ans, mais se montre cependant un peu trop équivoque et insistant. Du coup, Carla l'éconduit puis le raccompagne à la porte dès qu'il a fini son verre de Brandy. Carla lui demande de ne jamais revenir (encore qu'à l'intonation, tout le monde entende le contraire !). Peu après, elle s'envole pour Madrid où elle retrouve l'homme d'affaires campé par Fernado Rey et évoqué ci-dessus dans le synopsis. Arturo qui l'a suivie, se retrouve donc également à Madrid. De quoi foutre un beau bordel et lourder au spectateur un généreux spectacle rempli de manipulations, de coups de pute(s) et de meurtres ? Pas vraiment...
À énoncer ainsi sa mise en place, Historia de una traición n'a a priori rien de palpitant. Bien entendu, vu le casting, on aimerait se faire mentir mais cela n'ira guère plus loin ensuite. C'est d'ailleurs là que la mouvance giallesque déferlant sur les écrans à la fin des années 60 et au tout début des années 70, échoua très souvent, illustrant de manière plus ou moins inspirée des scripts outrageusement mécaniques à base de manipulations et de doubles, voire de triples manipulations.
Historia de una traición réunit pourtant des acteurs et actrices de belle envergure : il convoque non seulement les femmes les plus affriolantes du moment (Marisa Mell qui sort de Objectif: 500 millions et Perversion Story), Sylva Koscina qui n'a alors plus rien à prouver (Les Travaux d'Hercule, Hercule et la reine de Lydie, Les Faux jetons du sieur Fulci, "Judex" de Franju, "Juliette des esprits" de Fellini, Plus féroces que les mâles, Un détective à la dynamite, etc.) mais aussi quelques pointures masculines comme Stephen Boyd (voir son incroyable prestation dans le très bon Le Piège infernal, en 1977), Fernando Rey qu'il est inutile de présenter et Simón Andreu, qui, s'il n'est pas l'acteur le plus charismatique, "fait régulièrement le job !". Notons également les présences, en embuscade, de Massimo Serato, qui fait ici ses premières armes dans le giallo puisqu'on le reverra dans Un cas parfait de stratégie criminelle, Frissons d'horreur ou bien encore Terreur sur la lagune, et de Howard Ross (le demi-giallo L'Affaire de la fille au pyjama jaune mais aussi 5 donne per l'assassino, L'Assassin a réservé 9 fauteuils).
Pour la petite histoire et sans trop en dévoiler, dans Historia de una traición, tout comme dans Perversion Story, Marisa Mell se balade avec deux coupes de cheveux distinctes, l'une d'elles étant probablement censée correspondre à une fausse identité. Mais la comparaison entre les deux films s'arrête là et se fait largement au détriment du thriller pondu comme en batterie par José Antonio Nieves Conde.
Historia de una traición est un film resté rare à ce jour, a fortiori dans un genre plutôt fantasmé. Hélas, si la rareté fait le prix, elle n'est en revanche pas garante de qualité...
On a beau y trouver - comme il se doit - quelques retournements de situations, ils paraissent déjà, en 1971, bien galvaudés. Certes, la bobine n'est pas vraiment honteuse, mais a contre elle de paraître téléphonée au point de se faire assez vite languissante. Finalement, lorsque l'on échappe à l'ennui poli que distille le film, l'on (s')y perd encore, l'intrigue étant par moments tellement capillotractée et inutilement alambiquée qu'on n'y comprend plus grand-chose. Évoquons aussi le final dont le film est affublé : une sorte de happy end qui le fait ressembler de près (comme de loin) à une œuvre bridée - morale oblige - par une obligation de production !
Mais le plus frustrant au sortir de Historia de una traición est de se dire "Fichtre ! Tout ça pour ça ?" Le spectacle qui s'annonçait très prometteur ne vaudrait en effet pas tripette s'il était délesté de son casting trois étoiles et de son petit vernis pop qui en fait quasiment tout le charme.
Quant à son réalisateur, nul besoin de refaire la carrière de José Antonio Nieves Conde qui a débuté juste après la Seconde Guerre mondiale et est jalonnée de drames. Comme nombre de ses confrères, il a dû faire des concessions à un moment donné et surfer sur les succès du moment, pour le meilleur et parfois même, comme ici, non pas pour le pire mais pour des cardiogrammes plats et, tout compte fait, bien peu de plaisir distillé.
Ni meilleur ni pire que les gialli maritimes sans grands remous tels Top Sensation et Interrabang qui étaient, eux-mêmes des siamois de "Plein soleil" anémiés par une singulière absence de vagues, Historia de una traición évolue sur des bases également similaires au triptyque Riviera Lenzien qui vient de le précéder (Une folle envie d'aimer/"Si douces, si perverses"/Paranoia). Hélas, jamais le script de Historia de una traición n'arrive à la cheville des classiques de Réné Clément ou du très porteur "Les Diaboliques" de Henri-Georges Clouzot. Quant au spectacle qui nous est donné à voir, il reste à quai (et tout juste à flot), en tout cas inférieur à ses prédécesseurs en termes de pure exploitation.
Certains se montreront probablement plus indulgents que votre aimable serviteur mais, quoi qu'il en soit, on était en droit, en 1971, d'espérer un thriller giallesque plus émancipé, non pas un timide produit de série qui ne fait que reprendre, en moins bien et sans grain de folie aucun, ce que l'on avait déjà vu deux ou trois ans auparavant !
Mallox
* L'instant coquin pour midinettes et calendriers de gros routiers velus :